Filière tabacole - Le poids des mégots sur la balance fiscale


Aujourd’hui c’est la journée mondiale anti-tabac. Où les débats se focalisent sur les effets nuisibles de la cigarette sur la santé publique. Mais derrière l’écran de fumée, des milliards d’ariary pour le fisc. Une hécatombe. huit mille trois cents personnes meurent chaque année des effets nocifs, directs ou induits, du tabagisme dans le pays, selon les indications de l’OMS Madagascar. Fumeurs actifs ou passifs, ce nombre représente dix fois plus que celui des victimes du coronavirus en une année de pandémie. Avec des millions de dollars des bailleurs de fonds pour évincer la Covid-19. Mais la filière, aussi décriée soit-elle par des militants « invétérés » de la société civile pour son caractère « malsain », si l’on peut dire, assure une recette fiscale importante, sinon vitale pour l’État. Pas moins de 10% de l’ensemble, selon des statistiques disponibles au début des années 2000. Ce qui a augmenté, certainement, depuis cette évaluation plus qu’évasive. La société d’envergure et de dimension internationale, présente sur le marché, qui englobe et gère les chaînes de valeurs autour du réseau tabacole, de la matière première aux produits finis- plantation-préparation-conditionnement manufactures-distribution et vente de cigarettes a affirmé avoir versé 302 milliards d’ariary à la caisse de l’État en 2018. Elle a prévu de rehausser cette contribution financière à 1000 milliards d’ariary pour les trois exercices à venir. Manne financière Il se peut que la crise sanitaire consécutive à la propagation du coronavirus de 2020 jusqu’à aujourd’hui, ait eu raison de cette bonne volonté. Un haut responsable de ce conglomérat tentaculaire a aussi révélé que l’État, au-delà de ses impôts et taxes, à travers sa participation au capital à hauteur de 30%, avec ses bras financiers, a perçu 9,5 millions d’euros sur la période 2015- 2017 sous forme de dividendes. Conscients de cette manne financière à portée de main, ceux qui ont élaboré le projet de loi de finances 2020, adopté les yeux fermés par la majorité des députés, ont imposé un droit d’accise de 1390 ariary par paquet de cigarette. L’État va en récupérer 15 milliards d’ariary de bonus fiscal. La société constate que l’interdiction de la publicité, la suppression des insignes sur les paquets de cigarettes, remplacées par des images terribles des éventuelles conséquences de l’addiction aux tiges sur la santé humaine, n’ont pas affecté outre mesure son chiffre d’affaires. Elle a même renforcé son circuit de distribution par l’installation de nouvelles agences commerciales. De leur côté, des épiciers de quartiers avouent que la vente de « clopes » constitue une grosse part de leur fonds de roulement, au jour le jour. Il est aussi vrai que la cigarette électronique, en vogue dans les pays développés, n’a pas encore eu le succès escompté ici. À part quelques nantis, abandonnant la traditionnelle pipe, un mode ringard, le tube à vape n’a pas drainé la foule des accros. D’autant que les adolescents sont les plus fidèles des clients, la population malgache en offre un inépuisable vivier. Autant dire que la lutte contre le tabagisme risque d’être de longue haleine. Qu’il soit accusé d’être cancérigène. À part l’aspect fiscal, les multiples activités liées à l’industrie du tabac à chiquer ou de cigarettes à fumer, génèrent de nombreux emplois permanents et saisonniers, faisant vivre plusieurs familles. Ne serait-ce que la tabaculture. Pour avoir un ordre d’idée, 21 660 planteurs ont été recensés en 2003. La nette diminution de la production 2625 tonnes en 1982, 1484 en 2001 et 679 en 2002, a abouti à la réorganisation du travail à la base. Pour plus de rentabilité.
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