Forme grave


Plus de dix mille cas et une centaine de morts. Soit 0,04 % de la population. Certes, la propagation de la Covid-19 a de quoi inquiéter mais il semble qu’on oublie que vingt-quatre-millions-quatre-cent-quatre-vingt-dix-mille Malgaches sont bien portants. Déjà dans les statistiques, le nombre de guéris est le double de celui des personnes en traitement. Mais il est clair qu’on n’a jamais été confronté à une telle réalité où le BMH est débordé par les demandes d’autorisation d’enterrement. Les morgues manquent de tiroirs pour conserver les corps. Les agences de pompes funèbres n’ont jamais été autant sollicitées. Les fabricants de cercueil n’ont jamais reçu autant de commandes. Les vendeurs de linceuls sont aux anges. Une image funeste que l’on croyait surréaliste et qui ne se passait qu’en Équateur ou au Guatemala. Hélas, cela arrive aussi à Tananarive et ailleurs. Face à cette relative hécatombe, l’État déploie les grands moyens, mobilise l’armée pour juguler l’avancée de la pandémie. Pour le moment, les résultats sont relativement mitigés malgré les efforts colossaux consentis. Les bailleurs de fonds ont octroyé une somme astronomique pour lutter contre cette pandémie. Le fait est que, dans cette histoire, ce sont les bien-portants qui boivent la tasse. Le confinement punit tout le monde et est en train de détruire complètement la structure socio-économique du pays. Les sociétés et entreprises ferment les unes après les autres à l’image de la Star, poussée au chômage technique, et qui a fermé ses cinq usines de production. Des centaines de milliers d’employés se retrouvent sans rien. Les traditions sont complètement bousculées par les contraintes sanitaires imposées par la Covid-19. La forme grave affecte surtout le secteur privé et le monde de l’emploi. De quoi demain sera-t-il fait? Avec une économie littéralement déchiquetée, comment pourrait-on réaliser les projets d’émergence? Comment pourrait-on garantir une santé publique et une sécurité sociale à la population alors qu’on constate actuellement que pour n’avoir rien fait en soixante ans, on est confronté aujourd’hui à des problèmes de cadres, d’infrastructures, d’équipements? Seule une économie prospère peut s’occuper d’une politique de santé appropriée. On se demande si les bailleurs de fonds n’auraient pas fait mieux en consacrant une telle somme pour préserver l’économie et la santé en temps normal et non pour les pompes funèbres. Avec une telle somme investie dans des projets de développement, on aurait gagné au moins une bataille contre la pauvreté. Charité bien ordonnée commence toujours par ça même.
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