Code de la communication - Le glas sonne pour la presse et la démocratie


Les députés vont voter demain le code de la communication particulièrement contraignante pour la presse et la démocratie. Les journa­listes effectueront une marche vers Tsimbazaza pour tenter de convaincre les députés d'ajourner le vote de ce code controversé. Jour fatidique demain pour l'avenir de la presse et de la liberté d'expression, base de la démocratie. Le nouveau code de la communication passera à l'Assemblée nationale pour adoption. Il a été déjà validé par le Sénat malgré les réserves et les contestations du monde du journalisme étant donné que le texte adopté est celui qui a fait l'objet de plusieurs ateliers initiés par le Pnud. Les journalistes tenteront un dernier baroud d'honneur ce jour en organisant une marche vers Tsimbazaza pour tenter de faire comprendre aux députés les dangers de ce code. Plusieurs articles de ce code cherchent purement et simplement à exterminer la presse, du moins une certaine catégorie de presse : celle qui ose dénoncer, interpeller, relater les faits rien que les faits. Mais comme il n'y a que la vérité qui blesse, l'Etat a cherché tous les moyens pour museler, pour bâillonner voire anéantir les titres, les stations qui gênent. Autant Ratsiraka était pris pour dictateur avec l'instauration de la censure, autant Ravalomanana  l'avait payé de son poste pour avoir fermé abusivement des stations de radio et TV, autant Rajao­narimampianina restera dans l'histoire comme le Président le plus «médiaticide» en légalisant l'emprisonnement des journalistes, la fermeture de journaux ou stations de radio ou télé , la confiscation de matériel des titres condamnés pour les délits presse qualifiés dans ce code. A tout seigneur tout honneur,  le plus contestable est l'article 85 amendé par le Sénat qui oblige le propriétaire ou l'actionnaire d'un organe de presse à être le directeur de publication. Une disposition à la fois contraire à la liberté d'entreprise et de la liberté et de l'indépendance des journalistes qui deviendront la caisse de résonance du propriétaire. L'objectif inavoué de cet article est d'embrigader les propriétaires de groupe de presse qui se trouvent comme par hasard et pour la plupart des personnalités politiques de l'opposition non déclarée. A la moindre inadvertance, ils risquent d'être condamnés et de rater la présidentielle de 2018. Le pouvoir a une suite dans les idées. Risque De deux choses l'une. Soit le propriétaire accepte de prendre le risque et tient tête au pouvoir qui l'attend au tournant, soit il décide de tout abandonner à la grande joie du pouvoir mais au détriment du droit à l'information et de la démocratie. Les articles 43 et 44 ne sont pas moins redoutés en ce sens qu'ils menacent tout simplement l'existence d'un organe de presse écrite ou audio-visuel. En cas de condamnation, le juge peut ordonner la confiscation de matériel de l'organe au profit de l'Etat ou d'un organisme public. En cas de récidive, la fermeture définitive de l'organe peut-être prononcée par l'Autorité nationale de régulation des communications médiatisées (ANRCM) dont la neutralité est douteuse avec onze membres dont sept du secteur public. Le journaliste peut-être radié par l'Ordre des journalistes après l'envoi de deux lettres de mise en demeure. L'Etat a pris soin de mettre sous sa coupe l'Ordre des journalistes pour s'assurer de l'exécution de cette disposition. L'ANRCM est l'organisme chargé d'instruire les demandes de licence de diffusion de programme de radio et TV. Cependant, le dernier mot appartiendra au ministère de la Commu­nication qui donnera l’autorisation, sans l'ombre d'un doute, à la tête du client, comme il le fait actuellement, où des chaînes de TV et radio soutenant le pouvoir émettent, alors que l'octroi de fréquence est officiellement suspendu. L'article 125 limite la diffusion nationale exclusivement aux médias publics. Mais le plus grave est l'article 131 qui souligne que la licence est incessible et non transférable. Autrement dit, l'entreprise ne pourra pas être vendue si jamais son propriétaire décide de s'en débarrasser, code de la communication oblige. Et ce n'est pas tout  et il n'y pas que les hommes des médias qui sont menacés par ce code. Simples citoyens et surtout députés risquent également de passer à la trappe avec les articles 20, 30 ,34 ,35 et 36 qui limitent carrément la liberté d'expression sous peine d'être condamné pour diffamation. La loi sur la cybercriminalité est plus sévère que la loi sur les crimes tout court. On risque d'écoper de cinq ans de prison à la cybercriminalité et deux ans pour viol d'un mineur ou attentat à la grenade. A vous de choisir. Les députés sont en tout cas en face d'une lourde responsabilité devant l'histoire. Ce code est trop important pour la démocratie et pour toute la Nation pour être réduit en une vengeance contre les journalistes ou au froissement des liasses. Autant on peut faire passer une loi de finances rectificatives qui n'a aucune incidence sur la liberté, autant on ne peut pas s'amuser avec une loi dont les conséquences peuvent être tragiques. Pour une fois les députés doivent voter en leur âme et conscience même si on sait qu'ils ont été préalablement conditionnés pour faire passer la pilule. La Rédaction
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