Architecture Bois


J’ai beaucoup appris des étudiants de 3e année en licence professionnelle du parcours Bois ESSA-IST, lors de la présentation de leurs TD du Cours «Architecture Bois». Cette espièglerie à figurer une maison scandinave en rondins de pin avec du pain rassis : allusion ironique au bâtard ordinaire aussi dur qu’un madrier après un jour sur un étal en plein air. Et j’ai d’abord confondu la structure de la maison longue iroquoise avec celle d’un «Tranobe» qui serait l’alignement en longueur de plusieurs «Trano Kotona». Cette maison longue collective existe également chez les Dayaks d’Indonésie. Ou en Scandinavie : en juin 2020, la Reine Margrethe de Danemark avait inauguré la plus grande maison longue viking, reconstituée d’après des recherches archéologiques, au centre archéologique de Sagnlandet Lejre. Pour la reconstitution de cette maison de 31 mètres de long, 1 000 tonnes de chêne danois avaient été nécessaires. En Indonésie, avec la disparition des forêts, les constructions traditionnelles intègrent de plus en plus souvent des incongruités modernes. À Antananarivo, la menace des incendies, qui ravageaient régulièrement une ville de Trano Kotona en bois, doublée de l’éloignement grandissant des distances d’approvisionnement en bois de forêt, ont finalement imposé de fait le recours à l’adobe et au pisé, bien avant la levée de l’interdit de la brique et de la pierre sur la colline royale en 1868. À ce titre, il est toujours bon de savoir qu’aux trois critères cumulés du degré de stabilité au feu, du degré pare-flamme et du degré coupe-feu (ou de la capacité portante + étanchéité au feu + isolation thermique), le bois est un bien meilleur matériau de construction que le béton. «Architecture en bois» : certes, mais comment ? Construire en bois nécessite une politique sylvicole cohérente en amont: comment disposer de bois sans attenter à la forêt, ce qui pourrait paraître contradictoire aux yeux de l’opinion dans un pays, comme Madagascar, dont le reboisement est inversement proportionnel aux ravages de la culture sur brûlis, des feux de brousse et du charbonnage. Au Japon, pour marquer ses 350 ans d’existence, l’entreprise Sumitomo Forestry s’est lancée dans la construction d’un gratte-ciel en bois de 350 mètres de haut, avec 70 étages : où trouver un million de tonnes de bois ? Qui ne s’est jamais ému de la beauté, si simple et tellement complexe (soulager l’arbalétrier par une contre-fiche, recourir à la moise pour ne pas affaiblir une pièce essentielle, etc.), des poutres apparentes d’une charpente ne peut pas comprendre que je m’émoustille de l’association tenon-mortaise. De nos anciens cours de dessin industriel, en classe de sixième, c’est finalement tout ce que j’aurai retenu. Le Dictionnaire professionnel du BTP (aux éditions Eyrolles) en donne des définitions qu’on devrait apprendre aux adeptes du kit marteau-clou-tenaille. «Tenon : partie d’une pièce de bois à assembler, taillée en saillie de manière à s’ajuster avec la pièce correspondante. Mortaise: évidemment destiné à recevoir le tenon. Embrèvement : type d’assemblage à entaille de deux pièces de bois de travers (obliques ou perpendiculaires) avec tenons et mortaises biaisés». Le Tsugite japonais offre un raffinement supplémentaire dans cet assemblage sans clou. Les Ntaolo malgaches savaient également s’en passer quand ils assemblaient les éléments bois de leur Trano Kotona : une résurrection des Arts et Métiers d’autrefois, enrichis d’acquis internationaux, autorise à rêver d’une Trano Kotona tout en tsugite.
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