Madagascar 2023 : écoles en ruines, enseignants à l’aumône


Mon fils de dix-sept ans ricane chaque fois qu’il voit un cortège de gros 4x4, arborant la plaque rouge de leur appartenance à l’administration, donc au Trésor public. Et trop souvent pour promener une seule personnalité flanquée d’une escouade absurde d’accompagnateurs. «Voilà vos impôts» raille-t-il. J’ai répondu à l’appel du Rotary Club «Ainga» à contribuer à «Ny Asako Rahampitso», orientation professionnelle à l’intention des futurs bacheliers. J’aime me déplacer dans ces vieux lycées (Gallieni Andohalo, Jules Ferry Faravohitra) dont l’architecture possède une réelle personnalité et dont l’antiquité des murs me rappelle mon vieux collège Saint-Michel (since 1898 pour les plus vieux bâtiments d’Ampari(a)be). Malheureusement, dans les lycées publics privés de budget d’entretien, le temps a occasionné des ravages que ne masque plus la patine d’un centenaire, comme celui de Jules Ferry Faravohitra. Rien de nouveau depuis les premières fissures à l’édifice et le dénuement patent que j’avais déjà constatés au CEG Tsimbazaza (et au lycée Ampefiloha, et au lycée Rabearivelo) où ma mère enseignait, il y a quarante ans. Si, dans la Capitale, les écoles sont à ce point sinistrées, il faut craindre le pire pour les EPP et CEG des «tany lavitra Andriana», régions lointaines qui commencent parfois à vingt kilomètres du Rova d’Antananarivo. Je me demande combien d’écoles pourraient être correctement entretenues pour le prix d’une seule «Toyota by CFAO» (au demeurant, excellent compromis automobile). Les gesticulations d’un ministre ou d’un parlementaire me laissent sceptique. Par contre, je n’ai aucun doute quant à la nécessité vitale de l’Instruction publique et de l’Éducation nationale pour l’avenir d’un pays. Un arbitrage budgétaire de simple bon sens devrait privilégier systématiquement une EPP, un CEG, un lycée, par rapport aux dépenses superfétatoires d’une personnalité imbue de sa petite importance. Cette semaine toujours, j’avais également répondu à la sollicitation du Département d’Histoire de l’Université d’Antananarivo. En une seule matinée, j’ai compté cinq délestages. L’amphi 24 de la Faculté des Lettres tombe doucement en ruines. Quant aux toilettes, dans tous les bâtiments publics, nul besoin d’en indiquer la direction : il suffit de remonter à la source de la puanteur d’ammoniaque (au pire) ou de l’odeur de détergent bon marché (au mieux). Les enseignants-chercheurs de l’Université se plaignent de ces heures complémentaires de 2018, toujours pas acquittées en 2023. Écoles en ruines, enseignants qui attendent l’aumône de leur dû Madagascar marche clairement sur la tête : le «pays d’avenir» des années cinquante, est devenu un pays de conditionnel incertain.
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