Hôpitaux - Girard et Robic, des noms qui sont restés


« Pour que la mer ne soit plus la limite de notre rizière »

On a eu beau le rebaptiser Centre Hospitalier de Soavinandriana, cet établissement historique est resté, aujourd’hui encore, Girard et Robic dans le quotidien des Tananariviens ou même, pour faire plus court, tout simplement « Girard ». Mais que sait-on au juste de ces noms devant lesquels le temps qui passe a fini par capituler ? C’est en 1907 que Georges Girard entre à l’École de Santé Navale de Bordeaux où il décroche une licence en Sciences en 1911, et son doctorat en médecine deux ans plus tard. Parti au front, il est démobilisé en 1917 pour blessure de guerre, et est affecté à l’hôpital de Diego Suarez comme médecin résident. Il rentre en France en 1920 pour suivre un stage à l’Institut Pasteur de Paris, ce qui le qualifie pour être le directeur de l’Institut Pasteur d’Antananarivo de 1922 à 1940. Cet Institut d’Antananarivo avait été ouvert en 1898 par Gallieni, sous son premier nom d’Institut antirabique et de vaccinogène. L’objectif était de lutter contre la rage, mais aussi la variole que Madagascar fut le premier pays au monde à éradiquer. À la suite d’une succession d’épidémies, notamment de méningite cérébro-spinale, de peste, de grippe espagnole, les autorités accordent au docteur Girard les crédits nécessaires pour équiper l’Institut d’un véritable laboratoire de microbiologie, d’hygiène générale, et de prophylaxie. [caption id="attachment_99712" align="aligncenter" width="2236"] Le Dr Georges Girard a assuré la direction de l’Institut Pasteur d’Antananarivo de 1922 à 1940.[/caption] Premier vaccin contre la peste En 1927, l’Institut Pasteur d’Antananarivo devient une fondation privée mais à vocation publique, placée sous la tutelle des autorités locales et bénéficiant de la garantie qualitative de l’Institut Pasteur de Paris. L’histoire a retenu du docteur Girard un scientifique qui s’illustra par ses nombreux travaux sur la peste. Cette maladie est entrée à Madagascar par le port de Toamasina en 1898, et apparut sur les Hauts-Plateaux en 1921 sous sa forme pulmonaire, la plus dangereuse de toutes. C‘est en 1931 que Girard et son collaborateur Jean Robic mettent au point un vaccin vivant atténué, c’est-à-dire non pathogène. C’est le vaccin EV, premier vaccin efficace contre la peste. Pour rassurer sur la parfaite innocuité de ce vaccin chez l’homme, les deux codécouvreurs et quelques collaborateurs se l’injectent plusieurs fois. Les campagnes de vaccination de masse commencent en 1932 avec des résultats spectaculaires. De 3 500 à 4 000 cas annuels, les chiffres tombent à 200-300. La peste n’est pas vaincue, mais elle est maîtrisée. De nombreux pays adoptent le vaccin EV. Les travaux du docteur Girard ne se limitent pas à la peste, mais couvrent tous les aspects de la pathologie malgache. Revenu à la maison-mère de Paris en 1940 en tant que chef du Service de la peste, il prend une retraite bien méritée en 1959, muni des plus hautes distinctions honorifiques, et s’éteint en 1985 à l’âge de 97 ans. Jean Robic, pour sa part, effectue sa première affectation outre-mer au Maroc, suivi d’un stage dans les laboratoires de l’Institut de Paris. Son séjour malgache commence en 1926 par l’Itasy. Il rejoint l’Institut Pasteur en 1927 à la demande de Girard dont il devient l’adjoint. Bien qu’homme de laboratoire, le docteur Robic ne rechigne pas à descendre sur le terrain pour observer et contrôler l’application des mesures préconisées. En plus de la direction de l’Institut qu’il assume à partir de 1940, il tient un rôle important à la tête des Services sanitaires de Madagascar. Il quitte définitivement la Grande Ile, le 30 décembre 1953 après vingt sept ans passés au service de ce pays. L’ancien hôpital colonial d’Antananarivo porta le nom de ces deux hommes de sciences et humanistes pendant vingt ans, de 1957 à 1977. Et l’Histoire suivit son cours, les effaçant du portail de l’établissement et des supports officiels, mais pas des mémoires. [caption id="attachment_99713" align="aligncenter" width="2148"] Girard et Robic ont donné leurs noms à l’ancien hôpital colonial.[/caption] [caption id="attachment_99714" align="aligncenter" width="1110"] Le Dr Georges Girard.[/caption] [caption id="attachment_99715" align="aligncenter" width="1150"] Le Dr Jean Robic.[/caption]
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