Soamahamanina - Le lenteur des procédures inquiète


Les présumés meneurs des manifestations de Soamahamanina sont toujours en détention préventive, depuis plus d'un mois pour certains. Arbitraire. À l'écoute des déclarations faites par maître Willy Raza­finjatovo, avocat de la défense, de quelques proches des présumés meneurs des mouvements de contestation et de quelques habitants de la commune rurale hier, c'est ainsi qu'ils jugent la détention préventive des cinq contestataires de l'exploitation minière à Soamahamanina. Les habitants de la commune rurale de la région Itasy ont, une nouvelle fois, tenu une manifestation hier. La société minière ayant quitté le site d'exploitation, la libération de leurs camarades placés sous mandat de dépôt, à la maison centrale d'Antanimora, est devenue le mot d'ordre des revendicateurs. Outre le leitmotiv, « libérez nos familles, nos amis, ils ont lutté pour la patrie », la durée de la détention provisoire des prévenus a été fortement critiquée. Pierre Robson, Tsiho­arana Andrianony, Tony Guillaume Andriarajoniaina, Fenohasina Randriahen­drikarivo et Augustin Ranaivoarivelo sont écroués à Antanimora, depuis un peu plus d'un mois pour les deux premiers, et un peu moins pour les trois autres. « Il n'est pas logique que leur détention préventive dure aussi longtemps. Les charges retenues contre eux sont qualifiées de flagrant délit, ce qui ne devrait pas nécessiter une longue investigation. Donc, les procès auraient dû se faire seulement quelques jours après les faits », affirme maître Razafinjatovo. L'avocat parle même d'une « politisation de l'affaire », en s'interrogeant : « Sinon, pourquoi le dossier a été transféré au ministère [de la justice], et pourquoi n'y a-t-il pas encore de procès   ». En réponse, lors d'un entretien téléphonique hier, Odette Balisama Razafimelisoa, procureure de la République, soutient juste qu'« il y a des points à éclaircir, le traitement des dossiers de ces prévenus ne dérogent pas aux procédures légales ». Usure L’autre point soulevé hier à Soamahamanina est « l'interdiction aux proches des prévenus de leur rendre visite en prison ». Devant les villageois, maître Razafinjatovo a soutenu qu'« ils n'ont pas encore reçu de permis de communiquer [permettant les visites], malgré les demandes ». La procureure du tribunal de première instance d'Antananarivo réplique cependant que, contrairement à ce qu'affirme l'avocat de la défense et quelques villageois, « j'ai  déjà répondu favorablement à  des demandes d'autorisation de communiquer de la part des prévenus de Soamahamanina. Ils leur ont même déjà rendu visite à plusieurs reprises ». Odette Balisama Razafi­melisoa explique qu'un permis donne un droit de visite à un prévenu, pour trois personnes. Contacté, un autre avocat membre de l'équipe de défense des présumés meneurs des manifestations de Soamahamanina confirme que des autorisations de communiquer ont déjà été délivrées par le tribunal. « Il est probable que certains n'aient pas encore fait de demande », indique-t-il. Un villageois contacté hier, déclare cependant que « la mère de l'un des prévenus ayant fait le déplacement à Antananarivo, la semaine dernière, est revenue en larmes car elle n'a pas eu l'autorisation de le faire ». Une confusion d'informations circule, visiblement, à Soamahamanina. En principe, une détention préventive peut durer jusqu'à 3 mois et est renouvelable, si nécessaire. Les villageois affirment qu'un bruit selon lequel l'exploitation minière « reprendra au début de l'année prochaine », court dans la commune rurale. « Nous pensons que cette longue détention de nos camarades n’est qu'une intimidation face à toute nouvelle initiative de contestation. Déjà ces derniers temps, au moindre mouvement, nos jeunes sont menacés d'arrestation », déplore une dame âgée, parmi les ferventes revendicatrices. Face à la ténacité des irréductibles villageois, les autorités semblent opter pour une guerre d'usure afin d'éteindre, sans heurt, les contestations. Au regard de la journée de manifestation d'hier, il semble que la stratégie pourrait être payante. Une poignée d'habitants ont osé braver les forces de l'ordre, largement en surnombre, pour une revendication publique de la libération des cinq prévenus. Garry Fabrice Ranaivoson
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