Invasion fiscale


Il fallait s'y attendre. Avec la pression des bailleurs de fonds pour améliorer les recettes fiscales, l'État n'a trouvé mieux que de créer de nouveaux impôts et taxes pour tenter de renflouer sa caisse. Quatre nouvelles taxes ont été ainsi créées dans la loi de finances 2017. Il s'agit de la taxe de protection civile de 5000 ariary pour chaque chien et pour les animaux domestiques, de la taxe de résidence de 5000 ariary pour tout citoyen âgé de 21 à 60 ans, de la taxe de séjour de 2000 ariary par chambre et par nuitée passée dans un établissement hôtelier de 4 à 5 étoiles, de 1000 ariary de 1 à 3 étoiles et de la taxe sur l'eau et l'électricité de 10 % du montant hors taxe de la facture. Une invasion fiscale qui va étouffer davantage les pauvres contribuables qui ont toutes les peines du monde à joindre les deux bouts. On doute fort que cette initiative n'aboutisse à rien non pas par mauvaise volonté des contribuables mais tout simplement faute de moyens. C'est bien beau de faire payer les chiens, les tortues et les perroquets, de surcroît une somme symbolique pour une année mais dans cette pauvreté chronique, toute taxe est de trop. On ne prête qu'aux riches et on ne pompe que les pauvres. Plus les impôts et taxes sont nombreux et chers, moins les gens paient. Trop d'impôts tue l'impôt aiment dire les fiscalistes. Pour l'État, cela devrait faire une sacrée somme si on part de l'hypothèse qu'il y a autant de chiens, de zébus que d'habitants à Madagascar. En attendant le chiffre exact après un recensement national dont le coût engloutira toutes les recettes recueillies à travers ces nouvelles taxes, on peut estimer à pas moins de 40 millions d'individus imposables potentiellement. Le problème n'est pas de créer de nouvelles taxes même si on sait pertinemment que ce n'est pas la meilleure solution pour améliorer les recettes mais de les recouvrer. L'assiette fiscale de Madagascar est très loin de la moyenne en Afrique depuis plusieurs années. L'État, enlisé dans une corruption chronique, n'a jamais fait aucun effort pour l'améliorer. Le budget est assuré en grande partie par les subventions internationales, vu que les dépenses demeurent nettement supérieures aux recettes. On se retrouve exactement dans la situation de la Grèce en...1858 où tous les budgets sont en déficit, le pays vit en totale banqueroute et que sa survie est assurée par trois puissances protectrices, l'équivalent des bailleurs de fonds actuels. Pauvreté étant, les impôts étaient payés en nature mais la population refusait de s'exécuter sachant que l'État n'avait aucun moyen de les contraindre. Et quand l'État lui-même décide de faire le recouvrement, les recettes étaient bien loin de couvrir les frais des percepteurs. Les riches propriétaires, personnages influents, intimident ou achètent les percepteurs mal payés et sans avenir assuré qui préfèrent se faire des amis, ménager les amis et gagner de l'argent sur le dos de l'État. Quant aux petits propriétaires, ils sont protégés par un ami puissant ou par leur propre misère. La loi n'est pas cette personne intraitable. Les percepteurs sympathisent avec les contribuables. Il y a toujours un moyen de s'entendre quand tout le monde se connaît mais méprise cet être abstrait qu'est l'État. Ainsi va la Grèce. 158 ans après rien n'a changé au pays du marathon. La Grèce a toujours des problèmes de budget et vit sous perfusion de l'Union européenne. Il ne s'agit ni de prédiction ni de mauvais présage mais d'un simple rapprochement des faits particulièrement similaires. Sommes-nous condamnés à l'état de...Grèce Sylvain Ranjalahy
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