Jean René, « Mpanjakamena » des Betsimisaraka


Deurant les XVIIe et XVIIIe siècles, la côte Est malgache sert plus d'une fois de refuge à diverses bandes de pirates de l'océan Indien. Dans ces zones de contact, les Zana-Malata (enfants mulâtres) descendants des pirates, réussissent à s'organiser au XVIIIe siècle et à dominer les clans voisins des Tsikoa. L'un d'eux, Ratsimilaho (ou Ramaromanompo) s'empare de l'autorité à Fenoarivo puis à Toamasina. Les habitants vaincus de la région sont nommés Betanimena et Ratsimilaho appelle Betsimisaraka l'ensemble de ces populations qui le suivent du Nord au Sud. Après sa mort en 1749 ou 1750, ses descendants, Zanahary puis Iavy vivent principalement d'un commerce basé sur la traite, mais aussi du pillage organisé vers les Comores et l'Afrique de l'Est; expéditions pour lesquelles se réunissent de véritables flottilles de grandes pirogues. Iavy meurt en 1791; en 1803, la mort violente de son fils Zakalova livre le pays à l'anarchie. Le royaume se réduit pratiquement à la région de Fenoarivo et de Foulpointe. C'est la période que choisit opportunément Jean René pour apparaître sur la scène politique. Jean René est né à Taolagnaro vers 1773. Il est le fils d'un Français nommé Boucher, agent de la Compagnie des Indes, et d'une Malgache Tatsimo (du Sud). Il étudie à l'Ile de France (Maurice) jusqu'à 15 ans. Son père l'envoie alors à Foulpointe où Dumaine, agent du gouvernement français, l'emploie dans ses « bureaux ». Comme Foulpointe est abandonné par les Français entre 1790 et 1795, Jean René regagne l'Ile de France. Il se retrouve en 1798 comme jeune traitant à Toamasina. De 1807 à 1810, il assume les fonctions d'interprète pour le compte de Sylvain Roux, l'agent français. Le 11 février 1811, les comptoirs français de Toamasina sont fermés après la soumission des autorités françaises en place à la flotte anglaise. Cette situation permettra à Jean René, sans emploi, à son frère Fiche (Fisa, chef de l'Ivondro) et à leur neveu Coroller d'acquérir une certaine importance en pays Betanimena. Vers 1817, après diverses intrigues, il réussit à faire expulser Tsihala, frère de Zakavola et son chef légitime. Jean René est alors élevé au trône au titre honorifique de « Chef de Tamatave », mais en fait, il est considéré comme le Mpanjakamena (roi). À partir de cette période, l'histoire de Jean René apparaît étroitement liée à l'évolution de la conquête et de la soumission de l'Est par le souverain merina, Radama Ier. Celui-ci se présente à l'ouest de Toamasina en 1817, à la tête d'une armée importante. Sagement conseillé, Jean René trouve prudent de reconnaître la suzeraineté de Radama. Le 9 juillet, un traité est conclu en ce sens, dans les termes duquel Jean René se prénomme lui-même « Roi de Tamatave et Dépendances ». Selon divers témoignages, il semble qu'il ait exercé depuis lors, un certain ascendant sur Radama. Il est, en tout cas, écouté par le souverain merina bien que peu estimé par James Hastie, son conseiller à plus d'un titre. Toujours est-il que suivant fidèlement Radama dans sa politique d'expansion et de soumission de l'Est, il participe en personne à deux expéditions armées au moins, l'une en 1820 contre Tseva, chef de Foulpointe, l'autre plus lointaine en 1823, contre les Vorimo. Jean René meurt en mars 1826 à Toamasina en instituant James Hastie son exécuteur testamentaire. Ce dernier ne lui survivra que de quelques mois: il décède à Antananarivo en octobre de la même année. Jean René est inhumé près de sa maison, sur la même colline à Ivoloina. À certaine époque, des vestiges d'offrandes se voient près de la sépulture, sur une pierre fichée en terre au pied de laquelle se trouve un certain nombre de bouteilles vides, rares présents de miel ou d'alcool. Aucun accès au caveau n'est visible, probablement parce que cette sépulture n'est destinée qu'au roi Jean René, exclusivement.
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