Chronique de VANF - Connaître ou Croire ?


La crucifixion signait ses auteurs méconnus : Perses, Séleucides, Carthaginois, Romains. Mais, la crucifixion est mondialement célèbre depuis qu’en fut victime Jésus de Nazareth : un Juif de Palestine, fondateur du Christianisme. Et c’est pour lui rendre hommage que l’empereur romain Constantin, qui s’était converti au Christianisme, fit abolir cette méthode d’exécution capitale au IVème siècle. Les messages de Joyeux Noël n’ont cure des prétextes culturels que cette date permettrait au-delà de la (trop) classique joyeuseté familiale et religieuse. Et pourtant, Jérusalem, la ville du supplice du Christ et son lieu de sépulture, est une invite permanente à toujours plus de culture générale. Ainsi, de ce sarcophage presque anonyme au musée du Louvre, à Paris. Tzada Malchata, pour seule inscription gravée en hébreu et araméen. Il se pourrait que ce soit celui de Hélène (nom grec) ou Sadan (nom persan) d’Adiabène, épouse de Monobaze, souverain de l’actuel Kurdistan irakien et dont la capitale était Irbil. Convertie au judaïsme vers l’an 30, vingt-cinq ans avant sa mort, « la reine Sadan » avait été ensevelie à Jérusalem avec ses fils Monobaze II et Izates II. En 1863, le Français Félicien de Saulcy réalise les premières fouilles en terre sainte. à Jérusalem-Est, près de la porte de Damas, il découvre ce qu’il croit être l’hypogée des rois Salomon et David, fondateurs d’Israël, mais il s’agit en fait du tombeau de la famille d’Adiabène. Il extrait les sarcophages de leur tombe souterraine et obtient du pacha ottoman que celui-ci les lui vende. De Saulcy ramène les sarcophages en France et en fait don au Louvre. En 1878, les frères Pereire (Jacob-Emile 1800-1875, Isaac 1806-1880), des banquiers français juifs, achètent le site avant de le céder à la France. C’est ainsi que, depuis 1886, le « tombeau des rois » fait partie du domaine national français, au même titre que trois autres sites de Jérusalem : la basilique de l’Eleona sur le mont des Oliviers, offerte à la France par la princesse Héloïse de la Tour d’Auvergne en 1874 ; l’église Sainte-Anne dans la vieille ville de Jérusalem et Abou Gosh dans le village arabe du même nom entre Jérusalem et Tel-Aviv : deux églises romanes construites par les Croisés et offertes en 1856 à la France de Napoléon III par l’empire ottoman. Début décembre 2019, le « Hekdesh du tombeau des rois », une association juive cultuelle, conteste la propriété française du Tombeau des rois et assigne le Ministère des Affaires étrangères devant le tribunal de Grande instance de Paris : fermé pour travaux depuis 2010, rouvert au public le 27 juin 2019, le site est aussitôt refermé après une altercation avec des ultra-orthodoxes juifs. La même association a également assigné le musée du Louvre et le Ministère français de la Culture devant le Tribunal de Paris pour pouvoir récupérer des ossements contenus dans les sarcophages que mentionne une notice d’inventaire effectué en 1876 par un conservateur du Louvre. Magnifique exemple d’architecture funéraire de l’époque romaine, pour les archéologues, le « tombeau des rois » à Jérusalem et les sarcophages du Louvre sont des « biens sacrés ou cérémoniels sans utilité artistique », pour les orthodoxes. Querelle classique de la science qui ne cesse de vouloir connaître, face à la religion qui veut cesser de connaître pour enfin croire.
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