Sandaleux


Sauf incident de dernière minute, le XVIe sommet de la Francophonie se tiendra à Antananarivo après moult péripéties. Les derniers doutes semblent être levés avec les inaugurations des nouvelles infrastructures dont la finition reste un sacré morceau et les travaux risquent de ne reprendre qu'à l'occasion du premier sommet des pays les plus pauvres qui se tiendra bien évidemment à Madagascar. L'État a gagné un premier pari mais le plus dur reste à faire en l'occurrence la maîtrise de l'organisation qui constitue une autre paire de manche. À en juger les couacs lors du sommet du Comesa, il y a lieu de s'inquiéter. Dans tous les cas, ce sommet aura définitivement marginalisé la population avec des mesures impopulaires, humiliantes et méprisantes prises à l'encontre des couches les plus défavorisées de la capitale pour faire les beaux yeux des illustres invités. Hier, les échoppes en bois ou en béton en bordure du By-Pass ont dû être toutes détruites pour effacer toute balafre de la difficulté de la population. Une chirurgie esthétique pratiquée à coup de bulldozer et de marteau piqueur. Eh oui, il faut faire souffrir pour faire le beau. Des mesures...sandaleuses qui resteront l'image marquante de ce sommet qu'elle que soit sa réussite sur d'autres plans. Faute d'une bonne communication, elles ont été gonflées à qui mieux mieux par les rumeurs les plus fantaisistes. Mais tout compte fait et eu égard à tant d'imbécilité, ces dernières semaines, on n'en était pas loin. Pourtant les quatre-vingt pays membres de l'OIF ne se font pas d'illusions et savent pertinemment qu'ils se trouvent dans un pays où la pauvreté est un spectacle permanent et omniprésent dans la rue comme dans les foyers. Certains se demandaient d'ailleurs s'il existait suffisamment d'établissements de cinq étoiles, outre la nature, au point d'hésiter jusqu'à la dernière minute. Ils ont dû attendre l'appréciation du secrétaire général de l'OIF, Michaelle Jean à l'issue de sa dernière visite pour se décider. Du coup, le comité d'organisation se trouve dans l'embarras étant donné que le nombre de chambres réservées est nettement dépassé. Le nombre de participants est passé pratiquement du simple au double. Une chance pour les bidonvilles qui vont pouvoir profiter des retombées de ce sommet. À se demander si grâce à la tenue de ce sommet, comme ses défenseurs l'affirment, il y aura un essor fulgurant du tourisme avec une ruée de cinq cent mille visiteurs pour le reste de la période de pointe, comment pourra-t-on les accueillir   Comme d'habitude, le rêve est très loin de la réalité. D'ailleurs, les éventuelles retombées, au-delà des infrastructures, de ce sommet restent abstraites et on n'en parle pas assez. Si le succès est défini en termes de propos laudatifs des participants et de l'autosatisfaction des autorités en mal de popularité et de performance, on aura fait un beau gâchis. C'est l'après sommet qui doit préoccuper les dirigeants, intéresser l'opinion et attendu par la population. Le sommet sortira-t-il des résolutions ou définira-t-il des perspectives concernant les préoccupations majeures de ses pays membres en général et de Madagascar en particulier ?  Il appartient à la partie malgache de tirer son épingle du jeu et de soigner son image à travers des décisions qui rendront moins visibles... la pauvreté et ne pas se contenter d'un satisfecit international et du protocole routinier d'un sommet. Depuis le sommet de Dakar, qu'est-ce qu'on a gagné, qu'est-ce-qui a changé  ? Elle aura alors gagné la médaille d'or sans devoir piller le gisement de Soamahamanina et d'ailleurs. Par Sylvain Ranjalahy
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