Réseaux-sociocratie


La loi des réseaux sociaux a dépassé le simple cadre du virtuel, depuis qu’on a laissé s’écouler ces années, peu nombreuses mais dévastatrices pour l’esprit critique et la capacité de discernement. Une nouvelle époque qui voit l’émergence et le formatage des cerveaux qui sont contrôlés par la puissance de mots, images et vidéos brefs et très souvent d’un niveau abyssal mais d’une efficacité qu’auraient enviée les écrits pointus de Karl Marx ou de Victor Hugo. Une force qui est surtout un symptôme de la muta­tion qui donne aux cerveaux une porosité, une perméabilité d’une vulnérabilité redoutable. Si au Moyen Âge la voix du prêtre était la détentrice de l’ordre suprême, elle a passé, entre-temps, son pouvoir à la « vox populi ». L’erreur c’est de croire qu’on vit toujours dans ce para­digme, la vie à Madagascar se décide actuellement sur les réseaux sociaux dont les fils d’actualité ont la toute puissance d’une bulle papale du Moyen Âge. La maîtrise de ce canal est devenue le critère de puissance pour quiconque veut contrôler les esprits. Comme l’anneau de Gygès dans le mythe de Platon ou l’anneau unique du Seigneur des anneaux (J.R.R. Tolkien), le toucher de Midas, ... savoir trouver les mots et choisir (ou retoucher ou rogner) la bonne image sont maintenant les instruments, les clés de la domination des volontés. Bien éloignée déjà (10 ans), selon notre échelle humaine du temps, l’époque où Facebook a fait tomber les potentats des pays arabes. Mais si les bombes révolutionnaires ont explosé après avoir été actionnées par Facebook, aujourd’hui les réseaux sociaux allument des flammes, pas de la même envergure que les détona­tions de la révolte, mais qui engendrent les feux de la haine et brûlent ce qui reste du réflexe de recoupement. Avec une célérité qui défie la vitesse de la lumière, la chute des publications, qui constituent une soupe avariée par la prolifération des intox et des fake news, fissure encore plus les miettes de l’esprit critique qui se trouve pétrifié et ankylosé. Pendant que l’esprit boit les eaux de la cascade empoisonnée qui endort l’intelligence intoxiquée par l’inondation, la réflexion est bloquée. Et tout se décide sur les réseaux sociaux: le vrai et le faux, le bien et le mal, le juste et l’injuste, ... Une emprise rendue possible par une carence intellectuelle qui s’incarne, entre autres, dans notre prédisposition à adhérer machinalement, sans l’emploi du filtre du discernement qui se trouve dans un état léthargique, aux verdicts des milliers de juges improvisés qui font la justice sur les réseaux sociaux, le tribunal ultime dont la condamnation est la plus redoutée. Nous sommes en train de traverser une nouvelle ère: celle de la réseauxsociocratie.
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