Noël pour la paix


Le brouhaha, les embouteillages, le centre-ville qui devient irrespirable, étouffant, etc. Bref, comme tous les ans, le monde est rythmé par Noël. Car c’est bien le monde entier qui vibre au toucher de cette fête universelle, c’est partout que résonne l’écho de l’ambiance de Noël, cette célébration d’origine romaine, véritable modèle d’adaptation au passage du temps. L’empereur romain Aurélien, qui prit la décision historique, motivée par son désir d’uniformisation de l’empire, de faire de la date d’anniversaire de Mithra (le 25 décembre) celle de la célébration de la naissance du Sol invictus (soleil invincible), était-il conscient qu’il était en train de poser les fondations d’un édifice qui résistera aux différentes mutations charriées par l’écoulement des âges ? Preuve de sa forte résistance : tous les ans, même les plus blasés sont forcés de sentir sa présence et ne peuvent démentir sa popularité qui est sûrement plus importante qu’au temps d’Aurélien. Mais qui se souvient du nom de l’empereur ? Un autre nom est associé, que dis-je consubs­tantiel à Noël. Arbitrairement, le 25 décem­bre est devenu le jour de la célébration de la naissance d’une personnalité née au cours des dernières années d’Hérode le Grand, soit entre -7 et -4. Paradoxalement donc, le Christ est en fait né avant J.C et sûrement pas un 25 décem­bre : la belle étoile où se trouvaient les bergers qui, ce jour-là, gardaient leurs troupeaux, n’est pas la plus attirante en décembre puisque l’hiver rend ses charmes impuissants que même le plus fou des hommes ne voudrait pas être enserré dans le froid ténébreux. Mais qu’on soit chrétien ou pas, on ne peut rayer Noël de notre vie. Durant la Seconde guerre mondiale, Jean-Paul Sartre, qui était athée, écrivit ceci quand il a fêté Noël avec ses camarades de captivité : « Aucune femme n’a eu de la sorte son Dieu pour elle seule. Un Dieu tout petit qu’on peut prendre dans ses bras et couvrir de baisers, un Dieu tout chaud qui sourit et qui respire, un Dieu qu’on peut toucher et qui vit. Et c’est dans un de ces moments-là que je peindrais Marie, si j’étais peintre, et j’essaierais de rendre l’air de hardiesse tendre et de timidité avec lequel elle avance le doigt pour toucher la douce petite peau de cet enfant-Dieu dont elle sent sur ses genoux le poids tiède et qui lui sourit. Et voilà pour Jésus et pour la Vierge Marie. » (Bariona, ou le Fils du tonnerre). On ne peut échapper à Noël. La vie en société nous impose sa présence : l’exclure de notre vie est un défi ardu. Qu’on le célèbre pour son côté religieux ou culturel, il inspire ce respect qui freine l’expression de nos pulsions violentes. Il a aussi cette vertu qui éteint, le temps des échanges de vœux optimistes, le pessimisme. Pour cette année pas comme les autres pour la jeune histoire de notre République, la bipolarisation politique a mis le Père Noël devant un casse-tête terrible : devant deux vœux incom­patibles, il n’aura d’autre choix que de satisfaire une partie au détriment de l’autre. Mais dans l’attente du verdict de ce dilemme, on souhaite que Noël exerce sur nous, citoyens divisés par la politique en deux camps hostiles, son pouvoir pacificateur et qu’il redonnera espoir à la vie comme il a redonné le goût de vivre à George Bailey dans le film La vie est belle (F. Capra, 1946). par Fenitra Ratefiarivony
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