Campagne électorale - L’argent biaise le jeu démocratique


De mauvaises pratiques en pratiques malsaines. C’est l’attaque du « policy paper », publié, hier, traitant des déviances de la campagne électorale. Du pain et des jeux. « Les candidats sont présentés comme des produits commerciaux et non comme des porteurs d’idées », déplore Lova Rabary, journaliste, et auteur du « policy paper », publié, hier. Durant la présentation de son travail intitulé « De mauvaises pratiques en pratiques malsaines. Contribution à une amélioration des pratiques politiques sur la Grande île », elle épingle les débauches financières de la précampagne et de la campagne électorale. La journaliste regrette, que les moyens ostentatoires engagés qui privilégient le marketing politique « occulte les débats d’idée ». Parlant de « candidat-produit », l’ouvrage reprend les termes de Donna Andreolle, professeur en études américaines de l’Université du Havre, selon lequel, dans « [dans les publicités de campagne] le candidat [est] traité comme un bien de consommation [qu’il faut vendre aux électeurs-consommateurs] ». Cadrant avec le contexte de la présidentielle, le travail de Lova Rabary fait ressortir que les pratiques liées à la dictature financière dans la campagne électorale et avant, durant la précampagne « pourraient facilement passer pour des formes d’achats de voix, voire de corruption d’électeurs ». Elle constate, par ailleurs, que « face à des dispositions légales bancales, les candidats se permettent tout pour acheter l’élection ». Ces pratiques malsaines comme l’avance l’auteur, les électeurs s’en délectent. Elles semblent être devenues des « habitudes ancrées dans la vie politique et devenues presque normales pour les citoyens, (…) », relève la journaliste, qui ajoute qu’il existe des cas « de plus en plus nom­breux où ce sont les électeurs eux-mêmes qui réclament des cadeaux et de l’argent en échange de leur vote ». Tout dans bling-bling Le « policy paper », rapporte les expériences de politiciens qui se sont heurtées à des tentatives de monnayage de voix à l’initiative d’électeurs. Toavina Ralambo­mahay, candidat aux législatives de 2013, déclare que « mametraha kely », traduit librement en « laissez-en un peu », que ce soit de l’argent ou des cadeaux, était une formule d’usage que le candidat entendait durant ses tournées de campagne. La formule « prendre l’argent dont ses propriétaires ne savent que faire, mais de ne pas voter pour ceux qui les donnent », est de plus en plus reprise dans les recommandations contre les achats de voix. Ce qui démontre la gravité de la situation. À part l’achat de voix, les shows électoraux qui, boostés par des concerts gratuits de star sont devenus des « attrape-électeurs », les plus prisés. Alors que les idées sont dans l’ombre du bling-bling, « plus qu’un lieu de débat, le meeting devient une vitrine pour l’image du parti ou du candidat [et] sert moins à convaincre qu’à entretenir le moral du candidat et de ses électeurs ». Servant surtout à démon­trer la capacité de mobilisation d’un candidat, même si l’assistance n’est pas toujours acquise à sa cause, « les comptes-rendus qui en sont ensuite faits ont parfois des visées de manipulation de l’opinion (…) », déplore Lova Rabary. La dictature financière et commerciale de la campagne électorale, également, sur l’indépendance et la pertinence des contenus éditoriaux des médias, rappelant des faits durant le processus électoral de 2013. Le « policy paper », regrette la continuité de la méthode selon laquelle, la couverture médiatique se fait en fonction des espaces publicitaires achetés par un candidat et l’ambigüité du contenu éditorial qui se confond aux publi-reportages. Durant la présentation du « policy paper », hier, le format de la campagne, notamment, la durée qui ne permet pas de s’étaler sur un discours programme, ou encore, le manque de préparatif de certaines écuries politiques ou candidats ont été soulevés. Seulement, « quelles que soient les préparations de terrain, elles seront toujours aisément occultées par le rouleaux compresseurs d’un candidat aux gros moyens », déclare Lova Rabary. Le plafonnement des fonds de campagne pourrait être une solution afin de limiter la casse.  
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