La fête des morts


Une fois de plus le Président est passé à côté de son devoir humain, de ses obligations ancestrales. Il n'a pas pipé mot sur l'hécatombe de Beroroho où les dahalo ont massacré presque trente- et -une personnes entassées dans un camion. Ou plutôt si, mais pour répéter ce qu'il avait dit, il y a plusieurs mois, presque dans les mêmes circonstances lorsque les dahalo avaient tendu une embuscade aux forces de l'ordre dont plusieurs éléments y avaient laissé leur vie. «C'est une provocation contre l'État» avait -il asséné dans une voix qui trahissait l'impuissance sinon l'indifférence, et qui exhalait un relent d'apathie et une odeur de discrimination. Pas un mot de condoléances même si on sait que cela ne viendrait pas du coeur , pas un mot de compassion même si on sait qu'il aurait  été dicté par sa fonction de Président que par son statut de raiamandreny vénéré dans la pure tradition malgache. Pourtant, pour moins que cela, il était venu à Ankasina au milieu de la nuit avec une lourde délégation gouvernementale, voir les sinistrés d'un incendie et apporter des secours d'urgence . Il n' y avait ni mort ni blessé . Il aurait dû demander à Ratsiraka comment envoyer un télégramme. C'était le champion et il le faisait les yeux fermés . L'éloignement ne doit pas être retenu comme prétexte pour ne pas aller apporter un soutien moral aux proches des victimes, étant donné qu'il avait sillonné le pays de part en part lors de sa campagne électorale en 2013. Il est vrai que le contexte n'est pas le même . Pourquoi accourir pour des gens qui n'iront plus voter ? On ne lui demande pas de décréter un deuil national d'un ou plusieurs jours selon le souhait de certaines personnes,  étant donné que, pour beaucoup, la vie est déjà un enfer au quotidien, la mort une délivrance, mais juste une considération, un respect. Y-a-t-il pire deuil que la faim, le froid, le manque de toit, l'insécurité, le manque de soins, la déscolarisation Un deuil national en plus avec un écran noir ,des chants évangéliques toute la semaine , aucun spectacle autorisé n’enleverait l'illusion de bonheur de beaucoup de gens dont les footeux et ne servirait pas en plus les intérêts de l'État avec le programme festif de la célébration de la fête nationale. Mais le drapeau en berne conviendrait bien à ceux qui comptent conspuer le Chef de l'État à Mahamasina le jour du défilé. Pas question de gâcher la fête avec des morts qui ont mal choisi leur réservation. Certes, il a dépêché le Premier ministre à Berenty mais ce n'est pas lui que les électeurs ont voté. Se faire représenter est une forme d'esquive, une façon de montrer qu'il a peu de considération pour les victimes. Rien ne vaut une présence. L'important n'est pas d'envoyer une délégation qui ne pourra plus rien faire mais de montrer qu'il y a un Président sensible à tout ce qui arrive à son peuple, qui réagit avec sincérité et promptitude aux évènements. Cela se traduit dans les actes et les comportements et non pas dans les discours et les grands mots. Mais il faut dire aussi qu'il est plus facile de prendre des ordonnances que d'envoyer des condoléances. Les premières sont gratuites, les secondes doivent être assorties d'enveloppes, voire de mallettes .
Plus récente Plus ancienne