Associations et ONG - Des aides socio-économiques à ne pas minimiser


Plusieurs centaines d‘associations et d‘ONG travaillent à travers les différentes régions de la Grande île dans des domaines assez variés. Le dernier recensement effectué par l‘Institut national de la statistique (Instat) a fait état de six cent quatre vingt associations et ONG humanitaires en activité à Madagascar. La situation de précarité dans laquelle se trouve la majorité de la population explique en partie ce chiffre : cela équivaut, en effet, à environ six ONG pour chaque district du pays. Cependant, pour des raisons administratives, la plupart des ONG et associations travaillant dans la Grande île ont préféré implanter leur siège dans la région d‘Antananarivo. Tous les milieux sociaux sont concernés par les activités des ONG. On peut noter toutefois que « les ONG/Associations entreprenant des actions exclusivement en milieu rural ont représenté 80% de l‘ensemble, contre 20% en milieu urbain » d‘après l‘Instat, qui spécifie dans le même temps que « 48,6% d‘ONG/ Associations ont entrepris leurs activités à la fois dans le milieu urbain et dans le milieu rural ». A Madagascar, c‘est la loi 96.030 du 14 août 1997 portant régime particulier des ONG qui définit les activités et la nature de ces organisations. On y parle de « groupement de personnes physiques ou morales, autonome, privé, structuré, légalement déclaré et agréé, à but non lucratif, à vocation humanitaire, exerçant de façon professionnelle et permanente des activités à caractère caritatif, socio-économique, socio-éducatif et culturel sous de prestations de services en vue du développement humain durable, de l‘auto-promotion de la communauté ainsi que de la protection de l‘environnement ». Transparence Il n‘y a pas eu beaucoup d‘analyses sur les activités des associations et ONG dans la Grande île, au cours des derniers temps, du fait de l‘opacité des systèmes de financement dans certains cas. Mais il y a quelques années, l‘Instat a publié une étude assez édifiante sur le sujet. «L‘enquête a permis d‘évaluer à 366,3 milliards d‘ariary, le niveau des financements reçus par les Organisations Non Gouvernementales (ONG) » à Madagascar en une année à cette époque. Outre les bailleurs de fonds multilatéraux comme le système des Nations Unies et la Banque Mondiale « les Etats-Unis, l‘Union Européenne et la France sont restés les principaux pourvoyeurs de fonds des ONG/Associations » qui œuvrent à Madagascar selon l‘étude. Les sources de financement peuvent cependant être de plus en plus multiples. Les apports des bailleurs de fonds et des donateurs extérieurs comptent beaucoup, mais les cotisations et les levées de fonds au niveau national ne sont pas à négliger, en sachant que certaines organisations sont soutenues par des grands groupes industriels, voire des multinationales. C‘est ce qui explique en partie, quelquefois, « l‘opacité » des sources de financement et de leurs montants. Des outils permettent toutefois aujourd‘hui de lever un pan de voile sur ce sujet quelquefois épineux. On peut citer à titre d‘exemple l‘Initiative internationale pour la Transparence de l‘aide (IITA). Laquelle a récemment fait savoir que « l‘analyse du gouvernement (de Madagascar) a montré qu‘au cours des dix dernières années, l‘IITA a révélé 830 millions de dollars US d‘engagements de dépenses qui ne figuraient pas dans les données que le gouvernement avait obtenues ». Il a été spécifié aussi que « grâce aux données de l‘IITA, le gouvernement collabore désormais mieux avec les donateurs et d‘autres organisations qui ne lui transmettent pas directement d‘informations sur leurs activités de développement ou d‘aide humanitaire ». Des aides aux plus démunis… Outre les aides directes apportées aux populations vulnérables, les associations et ONG contribuent d‘une manière ou d‘une autre à la lutte contre la pauvreté dans le pays, notamment à travers la création d‘emplois. « L‘effectif du personnel employé par les ONG ou associations à Madagascar est estimé à 15 568 personnes dont 48% sont permanents et 52% temporaires » selon l‘étude de l‘Instat. Ce qui fait qu‘en moyenne « une ONG a employé dix sept permanents et quinze temporaires ». D‘une manière générale, ces différentes organisations souhaitent une contribution de l‘administration publique pour faciliter leur « mission » et pour pouvoir aider au mieux les populations dans le besoin. « La difficulté majeure d‘une ONG à Madagascar actuellement est le paiement de la taxe. Même reconnue d‘utilité publique, notre fondation n‘est pas exonérée pour les achats que nous effectuons localement et à l‘extérieur », explique une responsable auprès d‘une fondation œuvrant dans le domaine de l‘éducation. « A quelques exceptions près, les matériels et équipements que nous achetons ici ou que nous importons pour nos constructions ne sont pas exonérés, alors qu‘ils sont généralement destinés aux démunis », continue-t-elle.
« Outre les bailleurs de fonds multilatéraux comme le système des Nations Unies et la Banque Mondiale « les Etats-Unis, l’Union Européenne et la France sont restés les principaux pourvoyeurs de fonds des ONG/Associations » qui œuvrent à Madagascar selon l’étude. »
[caption id="attachment_120400" align="aligncenter" width="750"] Type d‘action humanitaire, ici l‘association APFMada pour l‘éclairage et la réhabilitation d‘une EPP avec l‘aide de la Fondation EDF-France.[/caption]

Tiphaine et Marc RAMANANTSOA - Une année dans une école de brousse

Dans le cadre d‘une mission humanitaire, ils ont posé le pied dans un petit village isolé à 50 km de Mahajanga, au début de l‘année 2020. Une année sabbatique à Madagascar qui a changé la vie de ces deux cadres parisiens… aux racines malgaches. L’air est chaud et chargé d’une humidité qui semble tout envelopper. Sur les plaines désertiques se dessinent les ombres des zébus en train de paître. Le soleil rougeoyant perce les nuages et illumine les cases sur pilotis du village de Besely et sa belle école. C’est ici que Marc (39ans) et son épouse Tiphaine (27 ans) ont consacré une année de leur vie à former les institutrices de l‘ONG Ecoles du Monde. Pourtant, sur le papier, rien ne prédestinait ce couple de vazaha à une telle aventure. A Paris, Tiphaine, diplômée d‘HEC, conseille la stratégie des grandes entreprises du CAC40 au sein du Boston Consulting Group. Quant à Marc, une revue de presse nous apprend qu’il est titulaire de huit masters parmi lesquels HEC, UCLA, Sciences Po, Dauphine, la Sorbonne, l‘Université Panthéon-Assas…qu‘il a débuté sa carrière comme conseiller économique au sein du cabinet du ministère des finances (sous le gouvernement Villepin) avant de rejoindre le cabinet d‘avocats new-yorkais Sullivan & Cromwell, puis de devenir banquier en fusions-acquisitions chez Lehman Brothers… la banque d’affaires de Wall Street dont il démissionnera la veille de la faillite de 2008 pour devenir, à 28 ans, directeur général de Cacharel, la maison de parfum et de mode parisienne. Il a depuis fondé plusieurs entreprises (dans les secteurs de la mode et de l’informatique) dont il est aujourd’hui toujours à la tête. Au-delà de ces parcours atypiques, ce qui, en pleine brousse, surprend le plus les villageois, c’est leur patronyme malgache : « Ramanantsoa ». Ils découvriront alors que Marc, ce grand blond d’1m90, est le petit-neveu de l‘ancien chef d‘Etat Gabriel Ramanantsoa et le fils du professeur Bernard Ramanantsoa, ex-directeur général d‘HEC Paris. « Quand je présente mon passeport malgache avec mon nom de famille, l‘étonnement le côtoie toujours à une bienveillante curiosité » s‘amuse Marc, évoquant les raisons de son engagement: « J‘avais envie de me rapprocher de mes racines. Mon père m‘a transmis la nationalité malgache, une origine dont je suis très fier. A l’approche de mes quarante ans, j‘ai ressenti le besoin de découvrir l‘île d‘une manière plus intime, plus utile. J‘ai alors suggéré à Tiphaine que nous renoncions temporairement à notre confort de vie pour venir en aide aux populations défavorisées de Madagascar. Elle n‘a pas hésité une seconde. » Pour préparer leur immersion en brousse, le couple commence par se rendre à Antanarivo où ils séjournent quelques jours dans la famille du Général G. Ramanantsoa. Ils y confectionnent du matériel scolaire inspiré de la pédagogie Montessori, capitalisant sur l‘expérience acquise par Tiphaine lors de ses deux précédentes missions humanitaires dans des écoles au Cambodge et en Inde. La veille de leur départ pour la région Boeny, ils déjeunent avec le Père Pedro « Une rencontre éblouissante et inspirante. Lors de cette après-midi passée à ses côtés, nous avons été les témoins privilégiés des merveilles d‘Akamasoa auxquelles on aboutit cinquante années de don total de soi. » Savourer la quiétude Avant de se séparer, le Père Pedro leur donnera un dernier conseil « Dans votre vie, n‘oubliez jamais que tout ce qui n’est pas donné est perdu ». C’est en méditant cette philosophie que le couple découvre bientôt la précarité de la brousse…et son légendaire « mora mora ».« Quand nous sommes arrivés, nous avions envie de tout changer rapidement, saisis par un sentiment d‘urgence devant une pauvreté omni-présente. Nous voulions être efficaces immédiatement… Puis, au fil des mois les villageois et les équipes nous ont appris à ralentir, à ne rien expédier, à savourer la quiétude du quotidien, à prendre le temps de la contemplation. L‘apprentissage de ce rapport au temps si lointain de la conception qu‘on peut en avoir en Occident nous a semblé relever d‘une vraie sagesse dont nous devrions collectivement nous inspirer » se souvient Tiphaine. L‘extrême fragilité de la vie dans ces territoires où tout vient à manquer n‘aura pas découragé Tiphaine et Marc. Vite surnommés les «Vazah‘Gazy » par les autochtones, ils auront ainsi passé une année à transmettre leur savoir aux enseignants et aux enfants de l‘école de Besely, transformant ce lieu en une oasis de joie. « En brousse, le tragique et le merveilleux se mêlent en permanence. On ignore toujours de quoi sera fait le lendemain et les villageois, bien souvent, non pas d‘autre choix que de s‘en remettre au destin. C’est une invitation à goûter les bonheurs simples du présent et les moments intenses de partage. Une tel expérience est une école de vie et d‘humilité que nous souhaitons à tout le monde de fréquenter ». Tiphaine et Marc Ramanantsoa sont désormais de retour en France où ils ont repris leurs activités professionnelles. Ils racontent leur aventure malgache sur leur blog www.perma-alter.org et viennent de lancer « One Year for Good », un programme de collaboration avec des ONG, dédié aux étudiants désireux de s‘engager dans l‘humanitaire à Madagascar…Des missions de terrain sont d‘ores-et-déjà prévues dès cet été dans les régions d‘Antsirabe et de Mahajanga. Nul doute que nous entendrons à nouveau bientôt parler d‘eux.
« Au-delà de ces parcours atypiques, ce qui, en pleine brousse, surprend le plus les villageois, c‘est leur patronyme malgache : « Ramanantsoa ». »
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