Aviation civile - Quand Madagascar voulait quitter l’Asecna


Un long résumé pour expliquer l’Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (Asecna) ; L’île-jardin Sainte-Marie honorée dans sa rubrique Histoires d’iles, avec ses ilots Madame, aux Nattes, aux Baleines, aux Forbans, aux Sables, sans oublier Boraha ; un petit détour dans le Sud aride pour terminer dans le Nord avec « l’or de Daraina », pas le minerai qui fait aussi la réputation de cette localité, mais l’espèce endémique de sifaka qu’est l’« Akombamalandy »… Ce sont autant de sujets abordés par Tom Andriamanoro dans sa chronique hebdomadaire. C’est peut-être ce qui s’appelle vouloir appliquer la politique de sa géographie à la place de celle de ses (vrais) intérêts. À regarder une carte de l’Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (Asecna), il est effectivement permis de se demander ce que fait Madagascar dans cet ensemble regroupant essentiellement l’Afrique de l’Ouest et une partie de l’Afrique centrale. La première explication est d’ordre historique, puisque c’est l’exacte transcription de l’ancien empire colonial français en Afrique subsaharien. Le cordon ombilical n’a d’ailleurs jamais été rompu puisque, si la direction générale de l’Agence revient selon l’usage à des ressortissants des pays membres, la présidence du Conseil d’administration et le contrôle financier ont, jusqu’au jour d’aujourd’hui, toujours été la chasse gardée de la France. Avec le temps, la géopolitique de l’Afrique indépendante a pris d’autres contours avec la création de groupements régionaux plus homogènes. Cela figurait déjà parmi les recommandations de l’Organisation de l’Unité Africaine qui y voyait un moyen d’activer le développement en misant sur la complémentarité des États d’une même zone. La froideur des sentiments des gouvernants malgaches de l’après 2002 envers la France étant bien connue, on ne s’étonnera point que des techniciens de la vice-primature en charge du transport aient concocté un plan de retrait se traduisant par la mise en place d’une «Asecna-bis» au niveau de la Comesa, au sein de laquelle Madagascar e t ses ressources humaines dans le domaine technique seraient assurés du leadership. Mais le projet, très peu viable du reste, a fuité et a été ressenti comme une véritable trahison par les pays membres, ne serait-ce que par le fait que Madagascar était un membre-fondateur de l’Asecna. Il a fallu aux dirigeants malgaches une belle somme de courbettes et d’humiliation pour faire accepter par les présidents africains que ce n’était qu’une étude de cas comme une autre, ce qui n’était pas tout à fait exact. Le projet n’a jamais été jeté aux oubliettes par la partie malgache, et prévoyait même un retrait effectif programmé pour mai 2008, au motif que les avantages tirés d’une appartenance à l’Agence par Madagascar étaient minimes. C’était ignorer certaines réalités. Après un éventuel départ, par exemple, Madagascar n’aurait plus pu bénéficier en matière d’investissements de l’économie d’échelle autorisée par les besoins groupés d’un bloc de seize États. Jouant désormais en solo ou presque, il aurait été amené à les payer au prix fort. Pour le contrôle en vol des aides radioélectriques en route et des aides à l’atterrissage (VOR et ILS ), l’Asecna dispose d’un avion laboratoire équipé d’un banc de calibration à la pointe de la technologie. Les normes internationales prévoient respecti­vement un et deux contrôles par an pour ces deux catégories d’instruments. Une fois en dehors de l’Asecna, Madagascar n’aurait plus été qu’un client comme un autre. Cela serait tout aussi valable pour l’accès aux Centres et écoles de formation d’ingénieurs et de techniciens supérieurs. À quoi ressemblait en ce temps-là déjà cet ensemble que le gouvernement malgache qui se trompait manifestement de nationalisme envisageait de quitter ? En quelques mots, il s’agissait, et s’agit toujours, d’un organisme transnational en charge de 16  000 000 km2 d’espace aérien couverts par seulement cinq régions d’informations en vol contre quarante quatre en Europe et vingt aux États-Unis, ce qui est déjà une performance mondiale. Il s’agit des Centres de Dakar, terrestre et océanique, de Niamey, de N’Djamena, de Brazzaville, et d’Antananarivo. À titre de comparaison, un vol Amsterdam-Francfort est de 40% plus long que ce qu’il devrait être du fait de cette balkanisation du ciel. Et quand il était président du Groupe Air France, Bernard Attali faisait remarquer que pour parcourir les 950 km séparant Paris de Prague, il fallait traverser sept espaces aériens distincts, gérés par des informatiques différentes, avant de se demander : « Comment parler d’Europe quand le ciel est géré de façon si peu européenne ? » Les missions de l’Asecna sont définies par la Convention de Dakar de 1974 dans ses Articles 2 (missions communautaires), 10 (activités nationales en vertu de contrats particuliers passés avec chaque État), 11 (coopération technique entre États en matière aéronautique et météorologique) et 12 (prestations en faveur d’États sollicitant l’expertise de l’Agence). La construction, l’extension et la gestion commerciale d’aéroports internationaux entrent dans les compétences de l’Asecna, pour ne citer que ceux d’Abidjan, de Lomé, et de Yaoundé. Il est donc permis de se demander si elle a soumissionné pour la rénovation de l’aéroport d’Ivato …
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