Vonjy Andriamanga - « La privatisation de la jirama écartée »


Le directeur général de la Jirama, Vonjy Andrimanga, dresse un bilan succint de ses réalisations depuis sa nomination. Et exclut toute idée de privatiser la Jirama. Où en est la Jirama actuellement ? Est-ce que la situation s’est améliorée depuis votre nomination ? La mission assignée à l’actuelle Direction Générale de la Jirama est très claire : redresser notre société en atteignant l’équilibre opérationnel avant la fin de l’année 2021. Cette mission s’est accompagnée d’objectifs d’améliora tion de l’alimentation en électricité et en eau potable des chefs-lieu de district où la Jirama opère. Tout d’abord dans le domaine technique, nous avons mis fin au délestage massif connu sur Antananarivo, résolu progressivement les problèmes d’alimentation électrique des quartiers classés rouge écarlate avec le programme « une semaine, un quartier », engagé de nombreux travaux d’infrastructures en eau potable comme Mandroseza2, Manjakandriana, Vatomandry, lancé le programme de remise en place de l’éclairage public dans plus de 40 chefs-lieux de district, renégocié les contrats d’achat d’électricité qui ont pénalisé la Jirama ces dernières années, signé de nouveaux contrats favorables à la baisse des coûts de production Par ailleurs, nous avons également mené des actions significatives dans le domaine commercial comme l’amélioration de l’accueil clientèle par la mise en place d’un centre de relation client ouvert 24/7, la rénovation progressive de nos agences, la diversification des moyens de paiement… Après ces premiers mois d’actions, même si nos efforts restent à consolider, ces résultats sont mesurables et les clients commencent à nous donner des feedbacks positifs sur ces résultats. Les abonnés doivent-ils faire une croix sur la baisse des tarifs après l’échec des négociations avec les fournisseurs de la Jirama ? L’optimisation tarifaire est une des priorités de la Jirama et est inscrite dans notre feuille de route pour cette année 2020. Un des principaux objectifs de cette optimisation es t de corriger les écarts importants de tarifs entre les régions qui pénalisent le développement de certaines régions. À titre d’illustration, le prix de l’électricité est de 747 Ariary le KWh à Antsiranana soit deux fois plus cher qu’à Antananarivo. La Jirama mènera à bien cette réforme en 2020 pour accompagner le développement économique de notre pays. Il y a toujours des délestages sporadiques. Quelle est la réalité ? Est-ce un problème technique ou financier ? À ce jour, nous ne connaissons plus de délestage massif comme ces dernières années à Antananarivo. Bien entendu, nous ne sommes pas à l’abri d’incidents techniques sur nos réseaux de distribution, incidents qui génèrent des coupures d’électricité dans certains quartiers. C’est pour cela que la Jirama a lancé le programme « une semaine, un quartier » afin de résoudre progressivement mais sûrement ces coupures dues essentiellement à la surcharge de nos transformateurs. Ayant commencé avec un investissement de 100 millions d’ariary par semaine, nous sommes passés à 300 millions d’ariary sur fonds propres de la Jirama, pour accélérer les réalisations. Pour Antananarivo et ses environs, il nous reste à ce jour moins d’une quarantaine de quartiers à traiter sur les 74 quartiers classés « rouge écarlate » où, pour des raisons de surcharge, l’électricité est coupée tous les soirs. Quels sont les projets en cours à court ou moyen terme pour résoudre tous les problèmes d’eau et d’électricité ? En ce qui concerne l’alimentation en eau potable, nous devons redoubler nos efforts d’investissement afin que la Jirama puisse apporter sa contribution dans l’atteinte par notre pays de l’objectif de développement durable fixé par les Nations unies c’est-à-dire l’accès à l’eau potable pour tous avant l’année 2030. Avec le ministère en charge de l’eau et nos partenaires techniques et financiers, de nombreux projets d’amélioration d’infrastructures sont programmés dans les villes qui subissent des difficultés comme Mahajanga, Fianarantsoa, Toamasina, Antsiranana, Antsirabe… Pour Antananarivo en particulier, un financement de 73 millions d’euros a été mobilisé pour renforcer les infrastructures de production et de distribution d’eau de la capitale. Et pour l’électricité ? En ce qui concerne l’électricité, la réalisation des grands projets hydroélectriques comme Sahofika et Volobe restent la solution à terme pour réduire de manière significative le coût de production de l’électricité. Dans l’attente de ces ouvrages, nous développons les projets de centrales solaires comme celui mis en service à Antsirabe ou l’extension décidée de la centrale solaire d’Ambatolampy. D’autres projets sont actuellement en cours de conception en particulier pour hybrider (thermique+solaire) les centrales isolées. Pour les nombreuses centrales isolées de la Jirama, nous avons décidé une stratégie de renouvellement des groupes vieillissants. Par la suite, nous allons procéder à l’hybridation de chaque centrale avec des panneaux solaires afin de réduire le coût de production de l’électricité. Concernant les réseaux en particulier, nous continuerons le développement et le renforcement de ceux-ci afin de répondre aux demandes des consommateurs. Des financements octroyés par nos partenaires techniques et financiers nous aident dans ces investissements sur les réseaux. Votre décision de confier le relevé de la consommation aux abonnés est-elle rationnelle pour les deux parties ? N’y a-t-il pas risque de tricherie ? Où en est le compteur intelligent ? Dans le cadre de la lutte contre la propagation de la Covid-19, la Jirama a décidé d’accélérer le déploiement de son nouveau dispositif appelé « auto-relevé ». Il s’agit d’un dispositif sollicitant la collaboration des clients pour le relevé des index de consommation. Plusieurs moyens sont mis à disposition de nos clients afin de transmettre leur relevé comme le numéro vert 3547, l’e-mail, le message MP sur le site FB Jirama Ofisialy mais également de manière classique, en le déposant à l’agence. Un dispositif de contrôle est mis en place afin d’éviter les dérives et la « tricherie » de certains clients indélicats. Par ailleurs, le déploiement des compteurs intelligents et prépayés se poursuit progressivement. A ce jour, plus de 8 000 clients en sont déjà équipés. Dans combien d’années la situation de la Jirama sera définitivement rétablie ? Au-delà du redressement technique et commercial, le redressement financier de la Jirama est également une priorité absolue car indispensable pour financer les investissements nécessaires aussi bien sur les infrastructures que sur l’amélioration de la relation client. Ce redressement financier est prévu en deux étapes : l’atteinte de l’équilibre opérationnel d’ici la fin de l’année 2021 et le retour à des comptes bénéficiaires estimé dans les cinq prochaines années. La Jirama n’envisage-t-elle pas d’investir dans les barrages hydroélectriques comme Andekaleka au lieu de dépendre des fournisseurs ? Bien entendu, la capacité future de la Jirama d’assurer son propre investissement dans des grands ouvrages comme les centrales hydroélectriques ou les grands réseaux de transport reste un enjeu primordial. Elle ne deviendra une réalité qu’à condition que la société réussisse son redressement. Où en est-on avec les énergies renouvelables ? La transition énergétique est-elle en bonne voie ? Où en sont les différents projets ? La transition énergétique n’est pas un choix mais une nécessité pour le redressement de la Jirama. L’enjeu de la réduction des coûts de production de l’électricité n’est atteignable que par un investissement massif dans les énergies renouvelables comme l’hydraulique, le solaire, l’éolien, la biomasse… Actuellement, au-delà des grands projets d’infrastructures hydroélectriques, de nombreux projets de type solaire sont en construction ou en conception. L’indépendance énergétique est-elle réaliste ou est-ce une utopie ? Si actuellement, plus de 70% de la production d’électricité à Madagascar restent issues d’énergie fossile (gasoil, fuel lourd), nous allons radicalement changer de configuration dans les prochaines années en augmentant de manière significative la part des énergies renouvelables, c’est-à-dire notre indépendance énergétique. La privatisation de la JIRAMA est-elle envisageable ? La privatisation de la JIRAMA n’est pas à l’ordre du jour de la Direction Générale. Les efforts déployés dans le redressement actuel ont pour seul objectif d’améliorer et de renforcer la qualité de la mission de service public de l’électricité et de l’eau potable assurée de par la loi par notre société nationale. Plusieurs quartiers de Tana sont privés d’eau depuis plusieurs jours. Comment expliquez-vous une coupure aussi longue ? Par ailleurs, la population souffre du manque de communication de la Jirama. Comment y remédier ? Effectivement, le chantier de déviation de grosse canalisation menée par la Jirama dans le cadre de la création du nouveau rondpoint By-pass à Nanisana a connu des difficultés importantes et a généré de longues coupures d’alimentation de plusieurs quartiers environnants. Au nom de la Jirama, je renouvelle ici toutes nos excuses auprès des clients victimes de ces coupures. La longueur exceptionnelle de ces coupures est due à l’apparition de nombreuses fuites d’eau importante une fois les travaux de déviation terminés. La réparation de trois fuites successives nous a amenés à chaque fois à couper l’alimentation. La priorité de la Jirama reste le retour à la situation normale de l’alimentation en eau potable des quartiers concernés. Dans cette attente, la Jirama a mis en place un dispositif d’urgence de distribution d’eau par camion-citerne dans les quartiers impactés par ces incidents. Bien entendu, il y a certainement des erreurs dans la manière dont nous avons entrepris ces travaux et dans un souci d’amélioration continue, nous allons tirer rapidement tous les enseignements de ces incidents aussi bien du point de vue de la gestion technique du chantier que du point de vue de la gestion de la communication vers les clients.
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