« Zana-Bahoaka, le néo rebelle malagasy »


Des voix quelquefois graves, des propos généralement pessimistes, des postures et gestes lents qui mettent en avant l’image de la société malgache, à la « mora mora ». Des têtes bien connues dans le domaine politique, l’administration, la recherche, les médias, la culture ou la société civile. À cela s’ajoutent des anonymes dont les propos sont tout aussi graves que profonds. Des scènes forts de sens et qui nous plongent dans la dichotomie devenue banalisée de cette population en quête d’identité et de repères communs. Chaque personnage, les uns après les autres essaient, à sa façon, de répondre à cinq  questions qui, dans un autre pays, auraient eu des répondants ayant des réponses. Qu’est-ce que le pouvoir à Madagascar, quels sont les principaux clivages de la société,  quelles sont les capacités de mobilisation, comment sortir du statu quo et finalement, y a-t-il un rebelle malgache  Cinq interrogations sur lesquelles chaque malgache devrait essayer d’approfondir des pensées personnelles, des réflexions en groupe, en famille, entre amis pour voir où nous  en sommes dans la construction commune de notre passé, de la situation d’aujourd’hui et surtout, où allons-nous. Il fallait le trouver ce titre, une sacrée phrase qui suscitera sûrement à plus d’un, l’envie d’aller voir le film. Oui, « Zana-bahoaka, le néo rebelle malagasy », c’est un film atypique qui met en scène de multiples acteurs de la vie de la société à Madagascar. « Zana-bahoaka » ou littéralement traduit « l’enfant du peuple » qui évoque une initiative endogène. Dans l’esprit de la chanson phare dudit film, « Lendrema » du groupe icône Mahaleo, « Zana-bahoaka » inspire également l’image d’un rebelle né d’une société qui, contradictoirement, a peur de lui. Toujours sur le titre, « le néo rebelle mala­gasy » rend bien cette énergie mais avec une tournure recherchée vers le positif.  Une composition de mot à la fois sucrée et pimentée. Alban Biaussat et Michel Tabet de Colateral Creation mettent en scène une trentaine de personnes dans leur élément pour partager leurs points de vue sur la relation des Malgaches au pouvoir étatique et les pouvoirs de contestation de la population. Sa finalité serait de fournir les débats et d’impulser des actions d’éducation citoyenne. Il en sort que la dynamique de revendication, d’impulsion, de cohésion, de changement, de rébellion des malgaches n’est pas encore dans les esprits. Trouver un nom, des noms, des contemporains qui fassent l’unanimité n’est pas évident. L’on se réfère au passé, mais quel passé ? Année 2013, lors de la tournée européenne du même légendaire groupe Mahaleo, avant de chanter « jomaka », Bekoto prononce trois phrases qui remettent chacun face à ses responsabilités: « la délinquance est la conséquence des inégalités sociales, il n'y a jamais de délinquant dans le ventre de sa mère, c'est nous, la société qui les fabriquons». Par extrapolation,  le néo rebelle est ainsi l’enfant des inégalités sociales dans une société ou dans le monde, il n’y a jamais de néo rebelles dans le ventre de sa mère, c’est nous, la société qui les fabriquons. Alors, donnera-t-on la chance à ces rebelles de naître, de grandir, de prendre le leadership  La première chose serait de croire que cela peut se faire, qu’ils peuvent exister et qu’on peut leur donner le pouvoir de changer les choses. Mais finalement, le néo rebelle cela pourrait être chacun de nous car le changement ne peut être le fruit d’une poignée de personnes, c’est l’affaire de tous. Osons donc faire naitre en chacun de nous le néo rebelle que nous devons être, ne soyons plus à la recherche du messie qui n’est pas aussi loin que nous le pensons. Car chacun de nous est un « zana-bahoaka ». Par Mbolatiana Raveloarimisa
Plus récente Plus ancienne