Pesticule


Black-out sur les nouvelles sur la peste. Le ministère de la Santé a ainsi décidé de ne plus rien communiquer à la presse. Des rédactions et des journalistes se sont faits admonester pour avoir publié les premiers morts de l’épidémie. Eh oui, on revient à l’époque des ténèbres à un moment où, grâce à la nouvelle technologie, la circulation des informations devient simultanée et vraie ou pas, on ne peut rien empêcher. Justement, il reste quelques spécimens de bons journalistes qui daignent recouper l’information aux autorités sanitaires. Désormais, même la gendarmerie n’a pas le droit de communiquer le nombre de morts de peste ou d’autres maladies aux journalistes sans avoir eu au préalable l’autorisation des autorités sanitaires. C’est clair, les autorités veulent filtrer l’information et ne communiquer que les nouvelles qui les arrange. Il est vrai que la peste terrorise toujours la population et on sait très bien l’impact d’une épidémie de peste sur le tourisme en particulier et l’économie en général. Sans oublier l’élection qui risque d’être reportée en cas d’une pandémie. Il faut donc s’attendre à un bilan maquillé de l’épidémie dans l’objectif de ne pas dramatiser l’affaire et de garder la population dans l’ignorance. À qui va profiter le crime ? Avec le retard pris dans la prise en charge des malades l’année dernière, malgré l’alerte donnée par les médias, on est arrivé à deux cents morts. Un bilan jugé honorable par les instances internationales qui ont félicité le ministère de la Santé et l’État dans la maîtrise de l’épidémie. Il y a quelques années, un ministre de la Santé avait reproché à la presse de complicité avec les pays de la région en diffusant les informations sur l’épidémie de dengue. Il faut faire un choix entre la santé de la population, le risque d’une hécatombe et les conséquences touristiques dues à la publication d’information relative à l’évolution de l’épidémie. Justement, en ce moment et depuis plusieurs mois, une épidémie de dengue sévit à La Réunion mais cela semble n’avoir aucune incidence sur le tourisme à en juger le nombre de visiteurs enregistrés cette année. Pourtant la presse en parle au quotidien. Le fait est que le protocole de traitement de l’épidémie a de quoi rassurer les touristes et les étrangers. Le meilleur moyen de combattre l’épidémie est donc de communiquer et de prendre les premières mesures nécessaires pour juguler l’avancée du mal. En dépit de toutes les sensibilisations intensives, toutes les communications massives autour de la peste effectuées l’année dernière, les proches des victimes se montraient incrédules et refusaient de croire à l’évidence. Pour beaucoup, la peste était une invention de l’État pour avouir des sous de l’étranger en vue de l’élection. Leur conviction sera davantage confortée par l’imminence de l’élection et surtout par cet excès de zèle des autorités à museler les informations face à un danger dont moins on en parle plus c’est mortel. L’État veut absolument « pesticuler » afin de limiter les dégâts mais cela aura pour conséquence néfaste d’inciter les gens à ne pas se faire soigner dans les centres de santé. Il est complètement débile d’en vouloir à la presse et d’en faire une peste noire.
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