Des voyages à imprévus pour les colons


Les Français de Madagascar, pour aider les éventuels colons qui envisagent de s’installer dans la Grande ile, surtout dans les villes, leur distillent quelques conseils bien détaillés. Mises à part les précautions à prendre pendant le voyage, ils évoquent le coût du déplacement. Ils tiennent, cependant, à préciser qu’en principe, la question se traite « sur place et la solution dépend de l’offre et de la demande ». En général, deux options se présentent. Sur certains parcours, le forfait est appliqué pour le voyage. Sur d’autres, cela se paie à la journée. Ainsi, pour aller de Toamasina, port de débarquement par excellence, à Antanana­rivo, le prix est sensiblement supérieur à celui du déplacement en sens inverse. Sur Antanana­rivo-Fianarantsoa et Fianarantsoa- Mananjary, on pratique aussi le même système. Outre ce tarif du voyage, les porteurs reçoivent le prix de leur nourriture durant le voyage. Cette somme d’argent, appelée vatsy, leur est versée soit intégralement au départ soit au début de chaque journée. Suivant les conventions, elle est « retenue ou non sur le salaire ». L’itinéraire s’établit en se servant des conseils des colons déjà présents et des populations locales. « Mais sauf sur les chemins très fréquentés, on devra compter sur l’imprévu. » Il faut effectivement tenir compte de plusieurs réalités. À savoir que tel village mentionné, n’existera plus. Que tel gué sera déplacé. Que les pirogues promises seront absentes. Que les distances indiquées s’avèreront fausses… « Ces petites misères sont inévitables dans des pays comme Madagascar. On doit donc s’armer de patience et faire contre mauvaise fortune, bon cœur. » De plus, s’il n’y a pas urgence, il est inutile de se lancer dans les marches excessives, 40 à 50 km ou huit à neuf heures par jour constituent une bonne moyenne. On se lève de grand matin afin d’accomplir la plus longue traite avant la forte chaleur. Et après le déjeuner, on se repose un instant avant de reprendre la marche qui conduit à l’étape du soir.  En effet, le soleil est le principal ennemi. L’insolation, même légère, entraine des accès de fièvre. Plus grave, elle peut entrainer la mort ou des maladies très sérieuses. Le travail à l’air libre durant la grande chaleur, « fatigue énormément, occasionne l’anémie, épuise l’organisme qui a besoin de toutes ses forces contre le paludisme.» Les « conseillers» parlent alors du meilleur régime à suivre pour un homme vigoureux et bien constitué. Dans le domaine alimentaire, il faut éviter l’abus des mets «échauffants». Comme les légumes frais sont souvent rares, voire introuvables, et comme les conserves fatiguent l’estomac, il est bon de s’habituer au riz qui peut, à la rigueur, remplacer le pain. En matière de boissons, on usera des alcools avec modération. Le thé et le café sont aussi d’excellentes boissons, mais ne remplacent pas le vin. L’eau devra toujours être filtrée et, au besoin, bouillie. Et surtout, étant exposée aux influences du paludisme, tout étranger doit savoir soigner un accès de fièvre, en employant la quinine et les purgatifs. À souligner que le logement exerce «une influence très sérieuse sur la santé » des nouveaux colons. Aussi devront-ils, chaque fois qu’ils le pourront, en choisir l’emplacement et en surveiller l’exécution soigneusement.
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