Pestilence


La peste est de retour. Quoi de plus naturel, disent les spécialistes de la santé, sans froncer les sourcils. C’est la saison. C’est ainsi, depuis plusieurs années, depuis qu’on brûle les forêts et les tanety dans la brousse et depuis que les montagnes d’ordures font partie du paysage classique en ville. Dans les deux cas, c’est une situation profitable aux rats. Alors que la peste était une maladie presque éradiquée depuis longtemps, elle est revenue au triple galop à la même allure que la pauvreté et l’insalubrité. Et il semble qu’elle a signé un long bail avec la société et la population que sa visite régulière est devenue incontournable et qu’on ne daigne plus chercher à mettre un terme à cette routine. C’est, en tout cas, l’impression que dégage l’attitude des responsables de santé peu enclins à coopérer avec les médias pour la diffusion des informations autour d’une épidémie comme la peste et le coronavirus. Ils sont irrités et se sentent dérangés par le harcèlement des journalistes obligés de recouper les informations dans les milieux officiels pour ne pas publier que des nouvelles dont le seul objectif est de booster la vente ou de faire du sensationnel auprès de l’opinion. Occuper un poste de haute responsabilité, c’est accepter d’être importuné par les journalistes, c’est élémentaire. D’ailleurs, lors de la présentation de vœux par les journalistes à Iavoloha en janvier, le président de la République Andry Rajoelina lui-même avait annoncé qu’il demanderait à tous les ministères de communiquer sans restriction avec la presse. Ce qui n’est visiblement pas le cas pour certains ministères qui semblent vivre encore à l’époque de La Pravda. Pour que la presse n’affabule pas, il faut lui donner des informations authentiques. Or, la tendance générale est de filtrer les informations afin d’étouffer, autant que possible, une épidémie ou un virus pour éviter une panique au sein de la population. La peur est telle qu’un directeur risque d’être relevé de sa fonction si on découvre qu’il vendait la mèche à la presse. Une mauvaise stratégie, en somme, étant donné que ce ne sont pas les articles dans les journaux qui peuvent favoriser ou empêcher la propagation d’un virus ou d’une épidémie. Au contraire, moins la population est informée, plus les risques sont énormes. Les responsables feraient mieux de s’occuper de l’entourage des victimes de la peste à Ambositra qui n’ont jamais été soignées à l’hôpital, que de chercher les moyens à museler la presse au point de ne plus répondre aux appels et limiter la communication au moyen d’une conférence de presse hebdomadaire. à ce rythme, l’info qui est une denrée périssable, risque une pestilence insupportable pour l’opinion. Les morts seraient en état de décomposition avancée. Peste à leur âme.
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