Délestage...


Le délestage est revenu en force, la semaine dernière, paralysant Antananarivo pendant plusieurs heures, de jour comme de nuit. La Jirama, sans doute histoire de donner du grain à moudre à la foule de révoltés du délestage, accuse la sécheresse causée par la pratique du tavy qui tarit les grands fleuves. Pas de pluie, pas d’électricité, en somme. Une explication qui pouvait se concevoir, il y a encore quelques années, voire peut-être soulever une petite indignation empathique de la part du grand public – si par « grand public », l’on désigne les 14% de Malgaches théoriquement bénéficiaires de l’électricité… Mais en l’occurrence, le petit com­muniqué énerve plus qu’autre chose. Ils en sont là, tous ces usagers malmenés : à l’énervement. Après dix heures sans pouvoir ni travailler, ni utiliser les appareils basiques, ni vaquer à ses occupations quotidiennes, tout en recevant sa facture mensuelle – et pour ceux qui auraient eu le malheur d’accuser un retard de paiement, se voir couper du peu d’électricité qu’ils pouvaient glaner – il n’y a pas vraiment de place à la compréhension. On ne lit pas un tel communiqué en se tapant le front et en se disant « Ah oui, c’est donc cela… ». Bien au contraire : on se demande si l’on ne serait pas le dernier pigeon à plumer dans la grande volière de Madagascar. Puisque de tout temps, la pratique du tavy est connue pour sa haute nuisibilité environnementale, sociale et économique, et maintenant pour ses impacts ahurissants sur l’approvisionnement en électricité, on aurait pu prévoir des années auparavant, des actions plus soutenues contre ces feux de brousse et ces cultures sur brûlis. Un président de la République qui promettait, autrefois, de solutionner le délestage en trois mois, aurait pu se battre plus que ça pour que ces pratiques cessent, puisque voilà que leurs consé­quences atteignent des pics quasiment insurmontables pour tous. Mais à quoi bon s’étaler sur la question qui ressemble, d’ailleurs, à une petite diversion, puisque les racines du fléau sont ailleurs. Le tavy n’est-il pas la petite flamme au milieu du bûcher d’une gouvernance qui laisse à désirer  ? La grande chance de la Jirama – car elle reste chanceuse, en comparaison aux usagers qui paient pour l’obscurité -, c’est que ces consommateurs sont si fatigués qu’ils ont du mal à se mobiliser pour contester ensemble et bruyamment. Mais c’est un autre problème, sans doute, plus culturel et social qu’autre chose, n’accusons pas les feux de brousse pour notre propre incapacité à rester solidaires. Au bout de plusieurs années de ce rythme difficile, 2017 a intérêt à devenir une année de vraies solutions. Mais qu’elles soient des solutions qui résolvent réellement le délestage et non quelques pirouettes de propagande à la veille de l’année électorale, comme l’on sait si bien faire pour attirer une foule aux abois dans son escarcelle. Que ces ratés et ces promesses foireuses soient l’aune de la décision des urnes : quand une fourchette de trois mois devient un râteau de trois ans, les candidats de 2018 devraient réfléchir à deux fois avant de trop la ramener. On pourrait écrire bien des choses sur cette calamité de délestage mais… oh, juste ciel, plus d’électricité ! Par Mialisoa Randriamampianina
Plus récente Plus ancienne