Radama, mais surtout Ranavalona


La 16ème promotion du CEDS (Centre d’Études Diplomatiques et Stratégiques) a choisi de porter le nom de Radama 1er. Voulant faire, autant oeuvre utile que mondaine, ils m’ont sollicité pour com­mettre un court texte sur le personnage. Il faut croire que le CEDS, avec ses peu ou prou 750 auditeurs, constitue une vraie communauté pour que, sortant de la première promotion baptisée «Rahaniraka Raombana», je me découvre une fidélité vieille maintenant de 15 ans. RADAMA, PREMIER ROI DE MADAGASCAR Lahidama était Avaradrano par son père Andrianampoinimerina, et Marovatana par sa mère Rambolamasoandro. Il est né vers 1792, après qu’Andrianampoinimerina, d’abord roi d’Ambohimanga et d’Avaradrano, eut définitivement réunifié l’Imerina. Radama accéda au trône en 1810, à la mort de son père. Il fut le premier roi Merina à s’entourer de conseillers étrangers, en l’occurrence européens: Français jusqu’en 1814 et Britanniques après que l’île de France devint l’île Maurice sous le gouvernorat de Robert Farquhar. RECONNAISSANCE INTERNATIONALE Le 23 octobre 1817 était signé à Toamasina le traité malgachobritannique qui reconnaît Radama comme «Roi de Madagascar». Le traité sera ratifié à Antananarivo par Radama, le 19 février 1818 ; et par le roi d’Angleterre, pendant le séjour à Londres de Robert Farquhar qui en avait adressé copie à Lord Bathurst, Secrétaire d’État à la Guerre et aux Colonies, par une dépêche du 18 novembre 1817. Le bicentenaire de ce traité avait été marqué par le voyage à Madagascar de la Princesse Royale Anne d’Angleterre, en octobre 2017. TRANSFERT DE TECHNOLOGIES ET PREMIÈRES ÉCOLES En septembre 1816, Radama envoie ses jeunes frères, les jumeaux Rahovy et Ratafika, étudier à l’île Maurice pendant un an. En vertu d’un second traité, signé le 11 octobre 1820, des artisans britanniques viendront en Imerina tandis que des stagiaires malgaches séjourneront à l’île Maurice. Neuf étudiants devaient quant à eux séjourner en Grande-Bretagne de mai 1821 à juin 1829. Parmi eux, les jumeaux Rahaniraka et Raombana qui devinrent les précepteurs de deux enfants du Premier Ministre Rainiharo, les futurs Rainivoninahi­triniony et Rainilaiarivony. C’est ainsi également que David Jones, de la London Missionary Society, ouvrit la toute première école d’Antananarivo, le 8 décembre 1820. CRÉATION D’UNE ARMÉE Le 21 décembre 1816, le capitaine B. Lesage, deuxième envoyé de Robert Farquhar, arrive à Antananarivo, accompagné de 30 soldats britanniques, chargés de créer et d’organiser l’armée de Radama. La première revue militaire à l’européenne eut lieu au printemps 1822 à Isahafa, près d’Ambohimanga, devant près de 70.000 personnes. C’est en juillet 1824 qu’eut lieu la campagne militaire contre le Boina, dernière campagne militaire que Radama 1er mena personnelle­ment. RADAMA ET JAMES HASTIE James Hastie vint en Imerina en août 1817, raccompagner les frères de Radama dont il avait été le précepteur à l’île Maurice. À l’occasion de l’un de ses nombreux séjours à Antananarivo, il con­vaincra Radama de se faire vacciner contre la variole. Cette première vaccination se passa le 16 février 1818. Nommé agent britannique auprès de Radama, le 18 août 1820, et en résidence permanente à Antananarivo depuis avril 1821, James Hastie mourut dans sa maison d’Amboasarikely-Antsahavola, le 18 octobre 1826. Contrairement à la coutume qui interdit à un souverain d’entrer dans la maison d’un mort, Radama tint à «visiter» celui qui était devenu son ami et qui l’avait accompagné dans ses nombreuses campagnes militaires. LA SUCCESSION DE RADAMA Radama «tourna le dos» le 28 juillet 1828. Ramavo lui succéda sous le nom de Ranavalona. Cette succession, la première à laquelle purent assister des Européens, a fait couler beaucoup d’encre, mais surtout d’incapacité à comprendre le principe de la double désignation couvrant deux générations et désignant en dernier lieu le «zanak’anabavy», l’enfant de la soeur (cf. Tantara ny Andriana et la typologie dégagée par Alain Delivré et Paul Ottino). Or, la future Ranavalona était fille adoptive de Ralesoka, la soeur tant aimée d’Andrianampoinimerina. Rabodonandrianampoinimerina accéda au trône, moins parce qu’elle était épouse d’État du roi défunt, mais parce qu’elle était nièce de Nampoina qui l’avait désignée en dernier. L’accession de Ranavalona au trône, la première documentée «en direct», mérite une deuxième lecture moins radamienne. Les «reporters» européens de 1828 méconnaissent généralement l’assas­- sinat en règle des membres de la famille de la future Ranavalona pour asseoir le pouvoir de Radama. «Fanjakana ifanoavana» (vassalité consentie), «fanjakana arindra» (de l’ordre dans la succession) «anio tontolo andro» (entièreté de la première période), «amin’ny farany» (en second lieu), «tompon’ny farany» (plénitude de la souveraineté en dernier): ce sont là les princi­pes successoraux qui ont survécu à la transition de la «Maison Vazimba» à la «Maison Andriana». À filiation utérine, ultimo-géniture et en rotation, on dit que cette succession est d’essence sud-est asiatique. Snobés comme de vulgaires traditions orales simplificatrices, les témoignages des Tantara ny Andriana recèlent une «encre sympathique» qu’il nous faut encore révéler. En chambre noire «tsy tsilovina».
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