Crise sanitaire - Les entreprises franches restent debout


Contre toute attente, des entreprises franches ont pu tirer profit de la crise sanitaire. Pourtant celle-ci a inhibé les activités économiques à l’échelle planétaire. Alors qu’elles, ces rescapées du coronavirus, sont tournées vers les exportations. Si l’on se fie à la note de conjoncture économique de Madagascar, récemment publiée par la Banque centrale, elles se présentent comme étant les plus résilientes à cette perturbation qui perdure dans le temps, par rapport aux autres secteurs nourriciers de la croissance économique tant attendue et phares sur le front de l’exportation de la Grande île. Le régime spécifique des zones franches Au début des années 80, le pouvoir révolutionnaire de Didier Ratsiraka, contraint d’amorcer des négociations avec le Fonds monétaire international, FMI, et la Banque mondiale devai t changer de cap et d’orientation économique. Il a été imposé une pirouette à 360°. Par l’abandon progressif de l’économie planifiée, calquée sur les modèles soviétique et nord-coréen, au profit d’un libéralisme à pas comptés. Des mesures contraignantes ont accompagné ce début des réformes structurelles. Comme la dévaluation par vagues successives du FMG, à la place des parités fixes. Ou la hausse graduelle des prix du carburant. Dix ans plus tard, pour attirer les investisseurs étrangers et aspirer des capitaux frais, il a été instauré le régime des zones franches. Avec ses incitations. Les entreprises bénéficient d'un certain nombre d'avantages fiscaux, douaniers, en termes commerciaux et de mouvement de capitaux. Pour les impôts sur les bénéfices (lBS), exonération totale pendant une période de grâce allant de deux à quinze ans selon le type d'entreprises, et un taux fixe de 10 % les années suivantes. Cependant, elles peuvent bénéficier d'une réduction d'impôts sur les bénéfices égale à l'impôt correspondant à 75 % du montant des nouveaux investissements.
  • Exemption de tous droits et taxes à l'exportation et à l'importation (à l'exception de la TVA qui est remboursée par la suite). De même, exemption des droits d'accises.
  • Les entreprises sont assujetties à l'impôt sur les dividendes distribués, au taux fixe de 10 % (contre 25 % en droit commun).
  • Elles sont soumises au paiement de la TVA au taux de 20 % sur les achats locaux et importés, une taxe qui est remboursée par la suite dans un délai de 40 jours.
  • Elles bénéficient des régimes commerciaux préférentiels accordés à Madagascar.
  • Elles ont un libre accès aux devises et une totale liberté de transfert des capitaux.
  • Elles ne sont pas obligées à Madagascar de s'installer dans des zones spécifiques.
Conditions de travail - Des hauts et débat Sur deux points, les entreprises franches ont fait l’unanimité. Depuis leur installation jusqu’à aujourd’hui, elles ont rempli les missions qui leur sont dévolues. Créer des emplois et générer des richesses. Par les recettes en devises des exportations et les contributions au paiement des impôts auxquels elles sont soumises. Mais le volet social a toujours soulevé des contestations et des reproches. «Salaires de misères», «Zones franches, zones de souffrances», «L’enfer du décor», «Licenciements abusifs », «Travail de nuit pour des mineurs», «Des leaders syndicaux jetés en prison ». Un échantillon des titres de la presse écrite de la capitale suite à des cas avérés de non-respect du Code de travail. Ce sentiment se nourrit de la piètre image des zones franches au niveau international (travail forcé, en rôlement des enfants. Et semblent conforter à Madagascar certains abus dûment identifiés et dénoncés dans les médias locaux. Il est également entretenu par la suspicion largement partagée par la population vis-à-vis des intérêts étrangers, dont les entreprises franches constitueraient la tête de pont. Aujourd'hui encore, la crise sanitaire et ses conséquences, a engendré une tension sociale entre employeurs et salariés qui a semblé plus marquée dans la zone franche que dans les autres secteurs productifs. Mais plusieurs études approfondies et indépendantes ont quand même démontré que les salaires dans ces présumés « chantres de l’esclavage moderne » sont au–dessus de la moyenne des rémunérations requises par les dispositions légales. En atteste l’engouement manifesté par des chercheurs d’emplois, composés en majeure partie par des femmes, dans les 80% de l’ensemble des effectifs, devant les usines qui recrutent. Des longues files d’attente se forment aussitôt après l’affichage de l’annonce. Tout le monde a encore en mémoire l’effet dévastateur qu’a eu l’exclusion de Madagascar du giron de l’AGOA par l’Administration américaine qui n’a pas reconnu le régime transitoire, né de la grave crise politique de 2009. Selon des statistiques disponibles à l’époque, 120 000 personnes ont été jetées à la rue, devenues des marchands ambulants sur les trottoirs d’Analakely et de Tsaralalanà. L’AGOA permet aux produits venus des pays choisis par les autorités américaines de pénétrer le marché américain sans être soumis aux taxes d’importations.
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