Bon vent !


Il est rare que je m’émeuve de la politique malgache. Mais, j’ai particulièrement aimé le tableau de la Ministre sortante, Lantosoa Rakotomalala, flanquée de son mari et de ses enfants, lors de la cérémonie de passation. Dans cette politique de brutes, la présence de ses enfants à ses côtés avait quelque chose de fondamentalement civilisé. Les enfants étaient silencieux et je me demande bien ce qu’ils pouvaient penser de toute cette curée pour se retrouver au premier plan : les journalistes qui avaient littéralement mis le siège autour de la table et barré la vue de leur dos ; les partisans de l’une ou de l’autre jouant des coudes dans une salle trop petite ; tout le personnel qui se sent obligé de faire acte d’assiduité. Je me demande d’ailleurs qui avait instauré cette formalité devenue «coutume». Depuis la toute première passation à laquelle j’avais assisté, en 1998, et toutes les autres depuis, c’est toujours la même scène un peu navrante. Faut-il, chaque fois, toute cette foule ? Dans son allocution finale, l’ancienne Ministre avait rapidement évoqué les absences répétées de Maman à la maison. Elle voulait dire auprès des enfants. J’ai pu lire que «les féministes scandinaves avaient identifié trois conditions pour réussir en politique : le temps, l’argent et les réseaux». Trois paramètres dont disposeraient moins les femmes : «La fameuse réunion informelle dans le bureau du patron, au cours de laquelle se nouent les décisions des jours à venir et les responsabilités qui seront redistribuées, a toujours lieu entre 19 h et 20 h 30, heure à laquelle les femmes sont, soit déjà parties s’occuper des enfants, soit regardent leur montre, rongées de culpabilité» (in «Les femmes en politique», Laurence Rossignol, dans Après-Demain, 2013/2 (N°26, NF), p. 24-25). Sitôt la passation effectuée, le mari, la femme, les enfants ont embarqué dans leur voiture personnelle. Laissant «V8» et plaque rouge à l’administration : quelque chose de basiquement civilisé.
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