Soyons juste des êtres humains


Encore un kidnapping. Tellement de mots ont été dit qu’on ne pourrait plus compter le nombre d’éditoriaux, d’articles et de post sur les réseaux sociaux à ce propos. Malheureusement, et c’est très inquiétant, c’est devenu finalement un fait divers. D’hiver en été, de Noël à la journée de l’indé­pendance, il n’y a plus de période pour ce fléau qui semble devenu un « sport national ». On sait tous qu’il s’agit de troquer des vies humaines : des hommes et des femmes, des enfants qui n’intéressent point les ravisseurs que pour leur pesant d’or. On a bien dit des vies humaines car il s’agit ici d’êtres humains. Le phénomène concerne, certes, tous les Malgaches mais c’est la com­munauté appelée « karana » qui semble être la première concernée. Aussi étonnant que cela puisse paraître, certains en sont satisfaits, d’autres trouvent la chose sarcastique, les plus humains sont attristés par ce qui se passe. Car lorsqu’on va au-delà de la couleur de la peau, du papier de nationalité, des comptes en banque ; on le dit et le redit, nous sommes tous des êtres humains. Nous ne voulons pas aller dans les discours polémiques qui disent que tous les jours des Malgaches vivent aussi l’insécurité et ne peuvent même pas se protéger. Au lieu de voir ce qui nous divise et ce qu’une poignée de mafia nous fait diviser (c’est de cela qu’il s’agit), allons plutôt dans ce qui nous rassemble. Une fois encore, sur cette île, il nous faut réussir ensemble comme des frères car nous allons tous mourir ensemble comme des idiots. Nous vivons tous la même insécurité faute d’un état fort. Ensemble, peu importe la classe sociale à laquelle nous appartenons, nous Malagasy nous sommes tous la proie d’une mafia qui nous terrorise de jour comme de nuit sans que l’état fasse vraiment un geste. Nous tous, nous craignons pour nos enfants, nos parents, nos maris, nos femmes, nos frères, nos voisins. Cette insécurité est grandissante et si ensemble nous ne nous donnons pas la main, elle finira par nous avoir tous sans exception. Qu’on le veuille ou non, cette communauté tient une place importante dans la société et la vie de notre pays. Des milliers sont nés ici, leurs parents et grands-parents étaient nés ici. Beaucoup parlent mieux le malagasy que les Malagasy de souche. Comme disait un vieux monsieur « karana » apatride dans un film du Haut-commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, ce mot Karana n’existe nulle part ailleurs. C’est un mot tout à fait inventé par la société malagasy pour désigner un groupe qui est finalement devenu « zanatany ». Certes, nous ne pouvons ni masquer ni occulter le malaise qu’il y a. Ce serait se mentir. Mais au point où nous en sommes, on gagnerait plus à commencer à vraiment se parler et trouver des points de départ car l’ennemi est commun. Nous sommes en train de nous faire avaler tout cru par une poignée de personnes qui jouent sur cette dualité. À nos frères. Il est bien triste à quel point les kidnappings touchent votre communauté. En tant qu’être humain, né de femmes, nous ne pouvons pas rester sans rien dire et contempler le malheur qui s’abat sur vous tous les jours. Nous tenons à exprimer notre tristesse et nos encouragements à toutes les familles des victimes. De même, par ce texto, nous tenons également à exprimer notre empathie à tous les Malgaches de souche qui subissent les mêmes torts, loin des caméras. Cela fera le sujet d’un autre papier. Mais, pour l’heure, l’être humain nous demande juste à tous d’être des humains et compatir.
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