Covid-19 - Y a-t-il des populations immunisées en Afrique ?


Bien qu’accusant un certain déficit en matière de santé publique par rapport aux autres continents dont l’Europe et l’Amérique, le continent Africain est le moins impacté par la Covid-19. Les faits sont là et ils sont têtus : Le continent africain reste peu touché par le coronavirus. Voulant en savoir plus, Radio France International a frappé à la bonne porte en s’adressant au médecin sénégalais Massamba Sassou Diop qui préside la Société sénégalaise d’anesthésie, de réanimation, et de médecine d’urgence. Leur entretien qui remonte à septembre a été repris par le Courrier International, et nous en avons extrait quelques idées-forces. Qu’on se le tienne d’abord pour dit : L’appellation de « coronavirus » n’est pas l’exclusivité de la Covid-19. II y a plusieurs types de coronavirus, la Covid-19 n’en est qu’un parmi d’autres, et là est peut-être l’explication du « mystère africain ». Peut-être, car le docteur Massamba Sassou Diop se défend d’émettre des affirmations, « il faut savoir rester modeste, je ne fais qu’ouvrir des pistes de recherche ». Car devant ce constat, il faut bien qu’on en trouve la raison. Pour étayer son raisonnement, il se réfère à ce qu’il appelle le facteur 100 : « Si on prend les 16 millions d’habitants du Sénégal et que l’on se met sur le modèle de Wuhan en Chine, si nous nous projetons de cette façon-là, il aurait dû y avoir 1,6 millions de contaminés, près de 80.000 personnes en réanimation, 40.000 décès. On aurait dû être sur des chiffres de plusieurs dizaines de milliers de morts alors qu’aujourd’hui nous arrivons tout juste à 300 ». Cela veut dire que dans plusieurs pays subsahariens comme le Sénégal, il y a 100 fois moins de morts qu’en Europe ou en Chine « alors qu’en plus, nous n’avons pas confiné ». Interrogé sur les grands rassemblements comme lors de la fête du sacrifice du mouton appelée Tabaski qui se tient début août, le docteur Massambat Sassou Diop fait remarquer : « On a eu une augmentation effective des cas dans les quinze jours qui ont suivi, mais cela n’a pas été si important que cela. Et surtout le nombre de cas graves et de décès descend très rapidement. C’est probablement lié au fait que le virus s’est retrouvé au contact d’une population qui est déjà immunisée contre la Covid-19 en nombre assez important, ce qui est en faveur d’une forme d’immunité collective ». Par ailleurs, il y a aussi probablement une immunité préexistante, car on constate au niveau des statistiques qu’il y a trois épidémies saisonnières de grippe dont deux, celles de mai-juin et de septembre, mettent en circulation dans la population des virus qui rentrent dans le rhinopharynx. Et quand on discute avec l’Institut Pasteur, toujours selon le docteur Massaamba Sassou Diopt, plus de 70% de ces virus sont des coronavirus. Est-ce à dire qu’avec les grippes saisonnières il y a des coronavirus qui circulent sur le continent et qui créent une immunité ? « Exactement. Si l’épidémie de janvier est une grippe classique, les deux autres selon les biologistes sont effectivement des coronavirus, et c’est pour cela que c’est extrêmement important. Il ne s’agit pas de la Covid-19, mais de quatre autres sérotypes qui circulent dans la population avec un effet immunisant. C’est ce que le docteur Massamba Sassou Diop appelle l’immunité croisée. Les anticorps développés pour lutter contre les autres types de coronavirus permettent aussi de neutraliser la Covid-19 ». Il ne serait donc pas faux d’avancer que les habitants du continent africain sont confrontés aux coronavirus, pluriel de rigueur, depuis des années, peut-être même sans le savoir. Ils ne s’en portent pas plus mal, tout au contraire…
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