Pas de développement sans adhésion populaire 


«… L’Antandroy, éprouve au plus haut point le besoin d’être compris, aimé et respecté… Nous ne saurions trop insister sur la prudence avec laquelle ceux qui sont amenés à travailler en Androy doivent y intervenir. Ce n’est que par l’amitié, le respect des personnes et des coutumes, la délicatesse, la courtoisie, la qualité des relations établies avec la communauté villageoise qu’ils réussiront à se faire pardonner l’aide qu’ils viennent apporter » (Guérin, Enquête socio-économique). En 1972, un an après le cri de détresse qui s’est élevé dans le bush du Sud profond, une forte délégation dirigée par le président Philibert Tsiranana se dirige à Beratro, à quelques kilomètres d’Ambovombe, sur la route de Tsihombe. Les jeunes plants mis en terre à grand renfort de publicité, sans être spectaculaires sont toujours en vie. Selon le journaliste Jean Lacarrieu, « on a voulu en faire une opération symbolique d’union nationale autour d’un grand objectif et l’on n’a pas, pour cela, lésiné sur la dépense. Certains ont pu trouver cela excessif et estimer que le déplacement vers le Sud- par des routes impossibles, de tant d’hommes politiques dont les compétences sylvicoles restent à démontrer- aurait pu être utilement économisé et servir à financer le reboisement de plus vastes surfaces par des gens du pays ». Rudolf P. Bos, expert de la FAO à Ambovombe, confie, de son côté, avec force « qu’il n’y a pas de problème technique ; ou plus exactement, à chaque problème technique, il y a une solution technique et aucune n’est au-dessus des forces humaines. Encore faut-il que cette solution technique soit comprise et souhaitée par la population et que celle-ci se sente concernée… » Autrement dit, sans l’adhésion de la population ciblée, aucun projet de développement ne peut réussir car son ultime objectif est l’épanouissement de l’Homme. Se référant aux exemples du Sud, Jean Lacarrieu s’interroge, se demande si la mise en valeur en elle-même, dans certaines conditions, n’est pas un crime contre l’homme. « À quoi sert de créer de belles et immenses plantations de sisal, ou de coton, ou d’arachides, des kolkhozes d’élevages, des sovkhozes de riz, de tournesol ou de ricin, ou tout ce que l’on voudra, si sur les terres ainsi mises en valeur habitent désormais des mercenaires prolétaires au lieu de paysans libres et dignes, conscients de leur liberté et de leur dignité ? » Partout dans l’Androy, un constat est ainsi fait : la population préfère partout la culture attelée. La raison en est simple : les Antandroy connaissent et aiment leurs bœufs et apprennent facilement à les mener. De plus, l’investissement indispensable est à la portée du cultivateur. De même, dans la ferme expérimentale de la FAO, les études portent de préférence sur l’amélioration et la diffusion des cultures qui, traditionnellement, intéressent les gens du pays: maïs, haricots, voanemba, sorgho, antaka, arachides, patates douces, ricin, etc. Dans la zone autour du secteur pilote de Sampona, près d’Amboasary, de nombreux paysans demandent à bénéficier de l’assistance technique des volontaires de Misereor. Il s’agit d’un organisme catholique allemand analogue au Secours catholique. Si les fonds recueillis sont d’origine catholique, les experts ne le sont pas forcément. Ils sont sélectionnés en fonction des compétences et des besoins des pays selon leur niveau. Le principe d’action du Misereor est que les paysans ne reçoivent pas de cadeaux. Les engagements réciproques sont précis et doivent être strictement observés. Ainsi on est certain qu’il ne s’agit pas chez eux de velléités sans lendemain, dont la motivation réelle serait le désir d’obtenir des dons.
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