Rangers d’ailleurs et d’ici...


Le 31 juillet dernier était la journée internationale des rangers. Le terme « ranger » désigne de manière générale des personnes dont le travail consiste à assurer la garde et de la surveillance des aires protégées. Dans certains pays, ce sont des personnes formées, parfois armées, qui appartiennent à une catégorie socio-professionnelle bien définie, ayant un statut d’employé, comme c’est le cas aux Etats-Unis ou plus proche de nous, en Afrique du Sud. Selon l’endroit et le contexte, le terme ranger inclut les « garde forestiers », « éco-gardes », « gardiens de faune », etc. La journée internationale des rangers a été instaurée à l’initiative de la Fédération Internationale des Rangers afin de commémorer ceux et celles qui «ont perdu la vie ou ont été blessés dans l’exercice de leurs fonctions et célébrer le travail que font les rangers pour protéger les trésors naturels et l’héritage culturel de la planète ». En plus de cette journée, tous les trois ans les rangers du monde entier se retrouvent pour échanger sur leurs défis communs lors du congrès mondial des rangers. Cette journée internationale des rangers n’est pas une journée connue chez nous et pour preuve, pas de célébration prévue au programme. Est-ce à dire que nous n’avons pas de « rangers » ? Nous avons aujourd’hui une centaine d’aires protégées couvrant une superficie de 7 millions d’ha et quelques, et en 2014, nous nous sommes engagés à étendre le nombre des aires marines protégées. Alors qui en assure la protection au quotidien ? En fait, mis à part le cas des parcs gérés par Madagascar National Parks, ce sont principalement les membres des communautés locales vivant autour des aires protégées, réunies au sein des associations communautaires de base qui gèrent les ressources naturelles. Polisin’ala, Comité Forestier Local, Comité Local de Surveillance, Comité Local de Base, etc. Nous avons diverses façons de les désigner, mais le fait est que ce sont eux qui vont parcourir régulièrement des dizaines de kilomètres pour assurer la surveillance des aires protégées. Les zones où la nature mérite encore d’être protégée sont de plus en plus reculées et difficilement accessibles, il faut se déplacer à pied ou en pirogue. Leur travail consiste à faire le suivi de l’état de santé de la faune et de la flore, relever les problèmes, en particulier les signes de menaces – pièges à lémuriens, tronc d’arbre coupé, défrichements. Les informations qu’ils recueillent sont cruciales pour orienter les actions de gestion de ces zones protégées. Leurs patrouilles servent aussi à constater et dissuader les intrusions et infractions en tous genres –tâche peu aisée quand les autorités chargées de l’application de la loi sont éloignées, ont des ressources limitées ou encore sont gangrenées par la corruption. Les auteurs de délits sont de mieux en mieux organisés et souvent armés, que ce soit de machettes, haches et même d’armes à feu ; les menaces de représailles en cas de dénonciation sont monnaie courante. En avril dernier, la maison du trésorier de la Communauté Locale de Base d’Ankazomborona, commune de Beramanja, district d’Ambilobe, région DIANA, a été incendiée volontairement par les délinquants après que ces derniers aient été pris sanctionnés à travers l’application du dina communautaire. En juin dernier, les pêcheurs membres du comité de gestion de l’aire marine d’Itampolo, région Atsimo Andrefana, ont dû intercepter quatre vedettes de sri-lankais, équipées de filets et d’hameçons, qui s’apprêtaient à pêcher dans leur zone de gestion, sans autorisation ni permis, et avec des matériels dépassant largement la capacité de la zone et les règles convenues dans leur dina. Comme quoi les intérêts en jeu dépassent souvent la capacité de ces communautés locales. Et pourtant ces polisin’ala sont les premiers remparts contre toutes les formes d’exploitation illicites des ressources naturelles. C’est une grande responsabilité qui pèse sur leurs épaules pour souvent peu de droits en retour. Alors en attendant la professionnalisation de ces « rangers » - et il va falloir y penser si nous voulons sérieusement sécuriser et gérer de manière efficace ces aires protégées – saluons leur courage et leur dévouement. par Nanie Ratsifandrihamanana
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