Assimilation forcée - Marieval, une tache sombre dans l’histoire du Canada


Marieval est un site dans l’ouest canadien où se trouvait un pensionnat pour enfants autochtones. Ce n’était pas le seul établissement de ce genre puisque, de 1831 à 1996, le Canada en comptait environ cent trente répartis sur tout le territoire, et dont certains, comme celui de Marieval, étaient gérés par des congrégations catholiques. Mais pourquoi spécialement pour enfants autochtones ? C’est ainsi que s’ouvre aujourd’hui la chronique hebdomadaire de Tom Andriamanoro. Cette discrimination répondait au souci d’assimiler de force ces enfants à la culture de l’entité dominante en les arrachant à leur environnement, et d’en faire une catégorie sociale contrebalançant la masse des autochtones. Elle a existé, peut-être sous d’autres formes, partout où le colonialisme est passé. Aux Iles Canaries, les Guanche préféraient se jeter du haut des rochers plutôt que de s’y soumettre ou d’être vendus comme esclaves. À Marieval comme sur un autre site, celui de Kamloop dans la province de Colombie britannique, l’assimilation forcée des enfants vira au drame sans que l’on sache encore au jour d’aujourd’hui ce qui s’est réellement passé. On y a, en effet, découvert sept cent cinquante et une tombes anonymes d’enfants, faisant craindre l’hypothèse extrême : celle d'un génocide d’innocents. Le Premier ministre Justin Trudeau a fait part de sa tristesse et du choc qu’il a ressenti en apprenant la macabre découverte  :  « Aucun enfant n’aurait dû être arraché à sa famille et à sa communauté, et privé de sa langue, de sa culture, de son identité. Aucun enfant n’aurait dû passer sa précieuse jeunesse soumis à une terrible solitude et à des abus. Aucun enfant n’aurait dû passer ses derniers instants dans un endroit où il vivait dans la peur, sans jamais revoir ses proches. Et aucune famille n’aurait dû être privée des rires et de la joie de ses enfants qui s’amusent, et de la fierté de les voir grandir au sein de leur communauté. » Et Justin Trudeau d’ajouter que les découvertes de Marieval et de Kamloop  rappellent de manière honteuse le racisme, la discrimination, et l’injustice systématique auxquels les peuples autochtones ont été, et sont toujours confrontés dans ce pays. « Ensemble nous devons reconnaître cette vérité, tirer les leçons de notre passé, et avancer ensemble sur le chemin de la réconciliation. » Réconciliation, le mot est lâché, car contrairement à l’image et à l’idée que l’on se fait du Canada à l’étranger, ce pays est aujourd’hui déchiré au point qu’un Comité Vérité et réconciliation a été mis sur pied. Le Premier ministre a présenté ses excuses aux peuples autochtones et déclaré qu’il ne fermera pas la porte à la tenue d’une enquête criminelle pour comprendre ce qui s’est passé, et situer les responsabilités. « Je suis ouvert à prendre toutes les mesures nécessaires pour en apprendre plus sur la vérité, et s’assurer qu’il y ait des conséquences sur les systèmes, sur les organismes, sur les institutions, et peut-être dans un certain sens, sur les individus.  » Pour Jagmeet Singh, chef du Nouveau Parti Démocrate, quatrième force politique à l’Assemblée, « ces découvertes horrifiantes obligent les Canadiens à affronter la réalité et reconnaître la vérité : il s’agit d’un génocide, et la réconciliation exige de ne pas ignorer cette réalité, elle exige la justice ». Pour sa part, Cadmus Delorme, chef national de l’Assemblée des peuples autochtones parle de « découverte tragique mais pas surprenante ». Il exhorte l’ensemble des Canadiens à appuyer les autochtones en cette période particulièrement difficile, et chargée d’émotion. « Pendant une longue période, le Canada a mené une politique controversée d’assimilation forcée des autochtones. C’était une politique extrêmement nocive, et elle a longtemps été la réalité du Canada. Aujourd’hui les Canadiens sont horrifiés et honteux de la façon dont notre pays s’est comporté. » Après les découvertes de Marieval et de Kamloop, Justin Trudeau a appelé l’Église catholique du Canada à adopter une attitude plus ouverte et responsable quant à son rôle dans les pensionnats. « Je sais que des catholiques à travers le pays, incluant des archevêques et des évêques, sont en train de réfléchir sur la manière de réussir la réconciliation. Je pense que c’est extrêmement important que tous les organismes et institutions qui avaient tenu un rôle dans cette partie de l’histoire canadienne soient là pour aider à la guérison de la plaie. » Et il a exprimé le souhait de voir le gouvernement bénéficier de la collaboration de l’Église pour avoir accès aux archives relatives à ce chapitre de l’histoire. « J’espère qu’on n’en arrivera pas au point où il faudra avoir recours aux tribunaux pour obtenir le partage de ces archives. » On ne peut pas refaire le passé, mais on peut chaque jour s’engager à le réparer.. C’est pourquoi Justin Trudeau a fait de la réconciliation avec les autochtones une de ses priorités. Le Premier ministre a également évoqué la démarche qu’il a personnellement entreprise auprès du Papa François. « Quand je suis allé voir le Pape, je lui ai expliqué à quel point c’était important d’adresser des excuses directement aux peuples autochtones du pays, à partir du sol canadien même et non du Vatican. Le Saint Père a exprimé « sa profonde douleur » face à cette tragédie. Mais d’excuse, il n’en a jamais été question.
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