Le prétexte Philip Mountbatten (1921-2021)


Le Prince Philip, décédé à presque 100 ans (10 juin 1921 - 9 avril 2021), sera enseveli ce jour. Assez anachronique, sans doute, que d’en faire un sujet depuis notre lointaine île de Madagascar. Mais, depuis, et d’ailleurs bien avant, des Chroniques comme «Monsieur, mon cousin» (Chronique VANF, 24 juillet 2010) ou «Prince Consort et Reine glamour» (Chronique VANF, 29.04.2011), j’ai toujours eu une tendresse particulière pour le «Gotha». La République ne fait pas rêver. Et, malgré «Le suicide des empires» à la bataille de Tannenberg (août 1914), «Les rois ne meurent jamais» (José-Alain Fralon, Fayard, 2006). Un sujet inépuisable qui fascine jusqu’aux nations régicides, française ou russe. Depuis l’annonce du décès du Duc d’Édimbourg, j’ai encore appris qu’en 1917, le dernier Tsar de Russie avait demandé l’asile politique à son cousin le Roi d’Angleterre : les Romanov furent sacrifiés sur l’autel de la politique intérieure britannique où le sentiment monarchique s’était étiolé pendant les quarante ans d’invisibilité de la Reine Victoria, veuve et volontairement recluse de décembre 1861 à janvier 1901. J’aime publier, et republier, cette longue énumération que personne ne lira : Henri IV prince de Reuss, Jean Grand Duc de Luxembourg, Charles XVI Gustave roi de Suède, Wittekind prince de Waldeck-Pyrmont, Philippe Ernest prince de Schaumbourg-Lippe, Antoine-Gonthier d'Olenburg, Charles des Deux-Siciles, le Comte de Paris, Duarte de Portugal duc de Bragance, Louis-Gaston chef de la Maison du Brésil, Siméon II roi de Bulgarie, Baudoin 1er roi des Belges, Victor-Emmanuel IV roi d'Italie, le prince Louis-Napoléon, Otto de Habsbourg, Robert archiduc d'Autriche-Este, François-Joseph II prince de Liechtenstein, Léopold-François archiduc d'Autrice Toscane, Charles duc de Wurtenberg, Marie-Emmanuel de Saxe margrave de Misnie, Frédéric-Guillaume prince de Hohenzollern, Juan Carlos roi d'Espagne, Charles Hugues de Bourbon duc de Parme, Albrecht de Bavière, Rainier III prince de Monaco, Béatrix reine des PaysBas, Charles-Auguste de Saxe-Weimar, Frédéric-François V de Mecklenbourg-Schwerin, Maurice de Hesse, ErnstAugust de Hanovre, Louis-Ferdinand de Prusse, FrédéricJosias duc de Saxe-Cobourg-Gotha, Wladimir grandduc de Russie, Michel roi de Roumanie, Alexandre II de Yougoslavie, Elisabeth II reine de Grande-Bretagne, Olav V roi de Norvège, Margrethe II reine de Danemark, Maximilien margrave de Bade, Constantin II roi des Hellènes, Christophe duc de Scleswig-Holstein, Georges Maurice de Saxe-Altenbourg, Georges-Alex duc de Mecklenbourg-Strelitz, Ernest-Auguste de Lippe, Leka 1er roi des Albanais, Marie-Antoinette princesse de Schwarzenbourg, Edouard III d'Anhalt : les souverains et chefs des maisons souveraines de l'Europe descendent tous de Joachim-Ernest d'Anhalt (1536-1586). L'enchevêtrement des dynasties d’Europe est illustré par les surnoms qui accompagnèrent certains "hub" : "grand-mère de l'Europe" (Victoria, reine d'Angleterre), "oncle de l'Europe" (Léopold 1er, prince de Saxe-CobourgGotha, d’abord gendre de George IV d’Angleterre avant d’être élu roi des Belges), "beau-père de l'Europe" (Christian IX, roi du Danemark). Louis-Philippe, roi des Français, et époux d’une Habsbourg-Lorraine, est l’ancêtre commun aux maisons royales de France, de Portugal, de Bulgarie, de Belgique et d’Italie. Vers 1900, cinq trônes européens étaient occupés par un Saxe-Cobourg-et Gotha. Les Oldenbourg étaient rois en Russie, Norvège, Danemark, Grèce. Les Habsourg ont associé leur nom à l’Autriche-Hongrie, mais le roi d’Espagne se trouve être leur descendant. Les Hohenzollern incarnent la Prusse et l’Allemagne, mais détiennent également l’héritage de la maison royale de Roumanie. Pour cause de guerre de 14-18, un conflit entre deux nations, l’Angleterre et l’Allemagne, dont les souverains étaient pourtant cousins, le nom allemand de Saxe Cobourg-et-Gotha de la dynastie anglaise a été changé en Windsor. C’était en 1917. Mais, la famille régnante d’Angleterre demeure une branche doublement germanique : le duc Philippe d’Édimbourg, époux de la reine d’Angleterre, et qui avait renoncé à ses droits au trône de Grèce, avait anglicisé le nom allemand de sa mère, Battenberg, en Mountbatten. C’était en 1947, année de son mariage avec la future Reine d’Angleterre dont il sera le prince consort pendant 68 ans. Sa royale épouse occupe le trône depuis 1952 : cette longévité, qui tiendrait presque de l’immortalité, n’est pas le moindre atout de la Royauté sur la République.
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