La quadrature du cercle


Des voyants au rouge. Le tableau de bord économique envoie des signaux inquiétants. Même Richard Randriamandrato, ministre de l’Économie et des finances, l’incarnation absolue de l’optimisme béat sous son air débonnaire, a fini par admettre l’évidence. Le taux de croissance de l’économie, en termes réels du Produit intérieur brut, PIB, serait de 1,5% cette année. Au lieu des 5,5 prévus par la loi de finances initiale. Plus qu’un écart, un gouffre abyssal. Le contraire aurait étonné avec l’arrêt des activités nourricières des filières à forts potentiels. Comme le tourisme, victime de la fermeture des frontières et « l’escale à durée indéterminée » des trafics aériens. Tous les mouvements gravitant tout autour endurent une grave situation. Restauration, hôtellerie, location de voitures, guides touristiques, et bien entendu l’agriculture et l’élevage qui ont perdu une grosse part des commandes de leur fidèle clientèle. Même le va-et-vient national, par l’envoi des taxis-brousse au garage, peine à trouver sa vitesse de croisière. En outre, l’industrie du textile, opérant en zone franche, jouissant d’une administration particulière sur le régime fiscal, subit de plein fouet la crise sanitaire actuelle par les effets induits du coronavirus aux États-Unis et partout en Europe. Les deux principales destinations des produits d’habillement made in Madagascar. Le président de la République, Andry Rajoelina, a émis le vœu de ne pas licencier des salariés. Mais suite à la prolongation du confinement aux pays des partenaires, maintenir le statuquo actuel, avec des chiffres d’affaires en chute libre et des charges fixes à honorer, deviendrait intenable. Une entreprise ne peut servir de caserne d’une armée du salut. Le souci de rentabilité dicte l’attitude des actionnaires. Ainsi, malgré les aides financières des bailleurs de fonds dans un souci humanitaire, et non pas de financements productifs, pas moins de 440 millions de dollars pour mettre hors d’état de nuire le covid-19, l’avenir sur le plan économique s’annonce morose. D’autant que ces estimations de Richard Randriamandrato sont tributaires d’autres aléas ou paramètres endogènes. Car il s’agit d’un taux de croissance nominal et non réel. Ce dernier indice doit tenir compte du taux d’inflation ou de la pression démographique. Dans l’une ou l’autre configuration, l’ampleur de la pauvreté, mise en lumière par la distribution des vivres aux éternels assistés, gagnerait en intensité. Tout d’un coup, il semble que tout le monde ait besoin des largesses de l’État providentiel. Beaucoup souhaitent, en sourdine, que ces moments de félicité perdurent. Sans aller au travail, des produits de première nécessité leur sont livrés. Que demander de plus. Les oisifs de tous les quartiers n’en croient par leurs yeux. Ils ont de beaux jours devant eux.
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