Les quatre expéditions merina au pays de Tompomanana


Après la guerre de 1860 entre Vezo et Masikoro, Toliara est complètement dévastée. Le roi Lehimiza garde Toliara, capitale de son royaume, mais perd le contrôle de toute la région au nord de Manombo (lire précédente Note). Cette autorité royale sera encore limitée sous son fils, Tompomanana, par « la volonté centralisatrice de la monarchie merina » (René-Louis Ader, Mise au point sur les origines de Tuléar jusqu’en 1897, Bulletin de Madagascar, janvier 1969). Déjà en 1835, une expédition merina est envoyée contre les Bara avec trois mille hommes, conduits par Rainiharo. Ce dernier détache un millier de soldats, sous la conduite de Raombalahisolo, vers Saint-Augustin. L’expédition arrive dans cette ville, quelques jours plus tard, après l’affaire du Voltigeur, et doit se replier devant l’hostilité de la population. Quatre autres expéditions auront lieu. Les colons de Toliara et de Saint-Augustin se réfugient peu à peu sur l’ile de Nosy-Ve, « croyant éviter ainsi des vexations et les redevances habituelles.»Et malgré les demandes de Tompomanana, rien n’est payé. En 1888, près de cinq cents Antefiherenana donnent l’assaut à l’ilot et s’emparent des marchandises. « Or, depuis le traité de 1885, la reine de Madagascar était reconnue par la France responsable de toute l’ile », remarque l’auteur de l’étude. Ce qui se traduit par des représentations de Le Myre de Vilers et la décision d’une expédition. Cette tentative échoue sur l’Onilahy. Une deuxième expédition se déroulera en 1889. Six cents hommes sont embarqués à Morondava sur le Normandy et la troupe débarque à Toliara, le 8 mars. Des pourparlers s’ouvrent avec les représentants de Tompomanana. Mais le roi de Toliara ne veut rien céder et se montre prêt à se battre. Rainimiadana, chef de l’expédition, préfère rembarquer et se réfugie à Andranompasy. Pour ne pas rester sur cet échec relatif, une troisième expédition est décidée. Elle est confiée au prince Ramahatra, cousin de la reine, Ranavalona III. Le 6 janvier 1890, Ramahatra arrive devant Toliara. Les négociations échouent et la ville est bombardée et incendiée. Puis, une ambassade, « chargée d’exposer les intentions pacifiques de la reine », est envoyée auprès de Tompomanana qui accepte de traiter et de se lier par le fatidra avec Ramahatra. Par ce lien de sang, un accord est conclu qui se résume en deux points. D’abord, la liberté de commerce est accordée aux Européens, moyennant des taxes de douanes de 10% ad valorem. Le produit de ces taxes est à partager entre Tompomanana et le gouvernement de Mada­gascar. Ensuite, un gouverneur merina et un poste militaire seront établis à Toliara, tandis que des bureaux de douane sont ouverts à Soalary, Sarondrana, Saint-Augustin, Toliara, Ranobe et Manombo. La question peut être alors considérée comme résolue. Cependant, les choses se gâtent dès 1891. D’après A. Martineau, il semble que le gouverneur de Toliara n’ait pas versé au roi sa part des droits de douanes. Et pendant que l’autorité merina se rend à la résidence de Tompomanana près de Manombo, il tombe dans une embuscade et, blessé, ne rejoint Toliara qu’à grand-peine. Aussitôt, les postes de l’Onilahy sont attaqués et « Toliara reçoit l’assaut de deux mille hommes qui ne sont repoussés que par l’artillerie». Aussi, une dernière expédition est-elle décidée. Huit cent vingt hommes débarquent à Toliara, en juillet 1891. Mais comme l’explique René-Louis Ader, en fait, il s’agit surtout de Betsileo qui ne sont pas toujours volontaires. Il y a des désertions, mais le poste renforcé ne sera plus attaqué. Et si la population vezo ne semble pas avoir apporté toute sa collaboration au gouverneur, ce dernier est ravitaillé par les Bara avec lesquels il entretient d’excellentes relations et qu’il aide même sur le plan militaire en 1894, pour s’emparer de Sakaraha. À l’arrivée des forces françaises en 1896, la garnison merina sera intégrée en une garde indigène. Mais l’indomptable Tompomanana organise une résistance de quelques mois. Lors de la première visite du gouverneur général Gallieni en juillet 1897, le roi refuse de le voir. Il décède l’année suivante vers l’âge de 60 ans, et sera enseveli dans le tombeau royal près de Miary.
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