Code de la communication - Une minorité de députés vote le crime


Une minorité de députés a voté le code scélérat avec l'amendement à l'article 85 porté par le Sénat. Une décision prise sans tenir compte des recommandations faites en travaux de commission. Dix-huit. Tel est le nombre de députés qui ont scel­lé le sort du code de la communication, hier, à l'Assemblée nationale à Tsimbazaza. Dix-huit élus ont voté pour l'adoption du texte dans sa version comprenant l'amendement à l'article 85 fait par les sénateurs la veille. Selon les récits du député Jaona Ratefiarivony, « seulement vingt-un ont pris part au vote du projet de loi portant code de la communication médiatisée. Nous avons été seulement trois à voter contre son adoption et dix-huit ont voté pour ». Les chaises ont, en effet, été singulièrement vides à la Chambre basse, hier. Outre le Code de la communication, pourtant, des textes comme celui sur la réconciliation nationale, ou encore, l'amendement de l'article 20 de la loi sur la cybercriminalité et un autre projet d'amendement d'une loi organique relative aux Collectivités territoriales décentralisées ont été au menu. « Pour cause d'absence de quorum, l'adoption de l'amendement à la loi organique a été ajournée pour demain [aujourd'hui] », rapporte l'élu contacté. Sans égard des recommandations issues des travaux de commission, par ailleurs, les membres de la Chambre basse ont voté le projet de Code de la communication médiatisée, en incluant l'amendement fait par le Sénat. « La commission a requis que l'on s'en tienne à la rédaction faite par l'Assemblée nationale. Seulement, la séance plénière a décidé de s'en tenir à la version retenue par les sénateurs », déplore le député Ratefiarivony. La majorité « Hery vaovao ho an'i Madagasikara » (HVM) et pro-chef d'État au Sénat a insisté sur le fait que le directeur de publication de l'organe de presse soit le propriétaire ou l'actionnaire majoritaire. Comme porte de sortie aux responsables étatiques qui seraient éclaboussés par cet article 85 nouveau, dont le président de la République, les sénateurs l'ont rallongé d'une phrase écartant les propriétaires exerçant des mandats électifs. Une disposition adoubée donc, par dix-huit députés, hier. Clos Selon le rapport des débats en commission, « le ministère de la Communication a vivement souhaité que l'amen­dement fait par le Sénat soit maintenu pour éviter une crise parlementaire ». L'Exécutif semble, alors, avoir souhaité éviter que le code passe l'épreuve d'un débat entre les deux Chambres parlementaires réunis en commission plénière. Ce qui aurait risqué de mener les débats au delà de cette session extraordinaire. Clore rapidement avec le sujet scélérat semble avoir été le mot d'ordre et les députés pro-pouvoir se son exécutés, bien que les nombres en présence ne s'y prêtaient pas vraiment. Au micro des médias nationaux, hier, Hery Rajao­narimampianina, président de la République, a déclaré que « si cela est nécessaire les discussions sur le code peuvent être reprises ». Pour, visiblement, expliquer l'entêtement du pouvoir à avancer dans sa logique, le chef de l'État table que « ce sont des politiciens qui sont en tête des contestations journalistiques ». Tout en martelant une ouverture au dialogue, l'Exécutif argumente systématiquement sur la récupération politique pour fermer ses portes. Ce qui est chose faite. Le vote téléguidé de la minorité de député, hier, clôt tout dialogue. Comme principal argument pour défendre son projet de loi, l'Exécutif met systématiquement en avant la dépénalisation des délits de presse. Un argument qui a fait mouche chez Roger Nkodo Dang, président du Parlement Panafricain, visiblement. Celui-ci qui a déclaré à l'issue d'une rencontre avec le locataire d'Iavoloha, jeudi que « Madagascar est un état de droit qui a pu dépénaliser les crimes et les délits de presse. C’est déjà une grande avancée dans le concert des pays démocratiques ». Au-delà de ce point d'une portée conséquente, certes, le danger qu'impliquent plusieurs dispositions du projet de code pour la liberté de la presse, celle de l'expression et d'opinion, est largement dénoncée par la société civile et les entités journalistiques internationales. Le fait que les partenaires internationaux de Madagascar s'accordent sur le fait qu'une reprise des discussions autour du texte est nécessaire n'est, aussi, pas anodin. Seulement, le Parlement a tranché. Le verdict appartient désormais à la Haute cour constitutionnelle (HCC). Garry Fabrice Ranaivoson
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