L’agriculture modernisée pour relancer l’économie


Mis à part le désarroi moral et politique, la faiblesse de l’économie malgache est importante au lendemain de l’insurrection. L’année suivante, elles ne représentent plus que les deux-tiers de ces importations. « Mise à part l’année 1950 presque équilibrée, le déficit est du même ordre jusqu’en 1953 » (« Histoire de Madagascar », 1967). Le Fonds d’investissement pour le développement économique et social, Fides, est l’organisme financier créé par la France en 1946, pour réaliser un plan décennal de développement, arrêté la même année pour les Territoires d’Outre-mer. Dès 1950, le successeur de Pierre de Chevigné, le gouverneur général Robert Bargues, entreprend la réalisation de cette tâche. Les subventions annuelles du Fides, constituées des contributions de la Métropole et du Territoire, « sont destinées à l’accroissement de la production, aux réalisations scolaires et hospitalières ». Les efforts du nouveau gouverneur général portent essentiellement sur la réorganisation des communautés rurales malgaches. Les « Communautés rurales autochtones » sont créées en juin 1950. « Elles résultent d’une longue série d’enquêtes et d’efforts visant à créer la cellule de base du développement. » Cette autogestion financière et agricole suppose la possibilité de trouver des cadres locaux pour cette rénovation rurale. Mais malgré les efforts de l’administration, les Fokonolona modernes connaissent de nombreuses difficultés. Beaucoup de modifications lui sont alors apportées pour la rendre plus efficace. Modernisées sous la forme de CRAM, elles sont encadrées par les secteurs de paysannat, réunis dans les groupements de collectivités. Pourtant, le manque de démonstration et de cadres compétents compromet beaucoup le déroulement de l’expérience. Avant 1952, l’équipement de base reçoit la plus grande part des subventions du Fides. Par la suite, les problèmes sociaux et ceux de la production passent au premier plan. Cependant, l’on envisage aussi la réalisation de projets inscrits dans le plan Rotival et débutent dans le cadre de l’application du plan quadriennal en 1954. Progressivement, la vie politique reprend aussi. À l’Assemblée nationale (française), de 1951 à 1956, le député du premier collège, Roger Duveau, réclame l’égalité entre Français et Malgaches. Il devient secrétaire d’État à l’Outremer sous le ministère de Mendès France en 1954, et « les premières amnisties interviennent ». En outre, la conception d’un État malgache, constitué dans le cadre de l’Union française, c’est-à-dire « la solution fédérale », progresse dans les milieux européens de la Grande ile. « Pourtant, cette solution, en contradiction avec la Constitution de 1946, apparaît encore bien lointaine. » L’arrivée à Antananarivo, du nouveau haut-commissaire André Soucadaux, en octobre 1954, coïncide avec la mise en route du plan quadriennal. Passionné par la culture du coton, le nouveau venu donne une nouvelle impulsion aux travaux d’études et de mise en œuvre des possibilités du BasMangoky. « La conquête rizicole de l’Alaotra, le développement des sisale raies du Mandrare, qui ralentit l’émigration des Antandroy, correspondent au souci de développer la production. » Et surtout, poursuivant l’œuvre de son prédécesseur, André Soucadaux continue la réorganisation de la vie rurale. Les Cram, une vingtaine en 1955, se développent mieux sur les Hautes-terres où elles reposent sur l’ancienne organisation des Fokonolona. Sur le plan politique, le « ralliement des Malgaches » se produit, à partir de 1953, grâce à l’actif d’un enseignant, Philibert Tsiranana. Les auteurs du livre d’Histoire de Madagascar de 1967, le présentent brièvement. Né dans le district de Mandritsara, à Ambarikorano vers 1912, ce fils de paysan obtient à 20 ans, son diplôme d’instituteur officiel à Antananarivo. Après douze années d’enseignement, il est reçu au concours du cadre des professeurs assistants et part pour la France en 1945, afin d’achever ses études. En 1949, il rentre à Madagascar et devient professeur d’Enseignement technique dans la capitale. Resté proche de son pays, il jouit de la confiance de tous. En 1952, il devient conseiller provincial de Mahajanga et représente cette province à l’Assemblée représentative. Son expérience de terriens, sa carrière, sa connaissance de la France, son activité, lui confèrent un grand ascendant sur ses concitoyens. En 1956, il fonde le Parti social démocrate dont il devient secrétaire général. « Sa modération et son bon sens le placent très vite au centre de ce courant d’idées réaliste fait de nationalisme et de prudence paysans. »
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