Tintin : un héros sans âge


Je vous parle d'un héros que les moins de vingt ans connaissent mal. Je vous parle d'un personnage dont les aventures ont fait le bonheur des plus de vingt ans qui n'ont pas totalement grandi avec Naruto ou Harry Potter. Je vous parle d'un récent nonagénaire qui restera éternellement, selon les dires de son créateur Georges Rémi alias Hergé, «jeune». Tintin vient de fêter ses 90 ans mais il restera toujours cet éternel jeune homme au visage d'enfant surmonté de sa houppe légendaire et intemporelle. On se rend compte que le temps n'arrive pas à avoir raison de la ténacité de ces albums irréductibles qui résistent aux attaques ravageuses qui échouent dans leurs tentatives d'apporter des usures. Les aventures de Tintin, toujours aussi palpitantes que les récits de Jules Verne, dessinées dans un langage graphique facilement déchiffrable appelé ligne claire ou «style Tintin», procurent toujours cette même saveur de délectation. Même si depuis la mort d'Hergé, l'Histoire s'est construite à partir de bouleversements: le «Wind of change» a balayé le nazisme et les fascismes, ces régimes totalitaires qui ont influencé l'inspiration d'où ont découlé des histoires comme celle de l'album Le sceptre d'Ottokar (1939) écrit au lendemain de l'Anschluss (l'annexion de l'Autriche par les Nazis). Si les pages de l'histoire se tournent définitivement, celles des albums de Tintin, même orphelines de leur contexte de naissance, sont toujours des sources de délices inaltérables, indifférentes à la marche de l’Histoire et aux différentes modes imposées depuis par la course du temps. Le «petit pas pour l'homme» de Neil Armstrong, quinze ans après Tintin dans l’album On a marché sur la Lune (1954), n’a pas enlevé son charme à ce dernier. En satisfaisant le désir d’évasion, la soif de suspense du lecteur en le transportant dans des pays réels comme la Chine, l'Inde, le Tibet, ... Ou dans des États fictifs comme la Syldavie ou la Bordurie, Tintin nous emmène dans son monde, nous intègre dans sa diégèse et les inventions d’Hergé ne le sont plus dans notre imagination : pendant longtemps, j’ai vraiment cru en l’existence réelle de l’arme redoutable des trafiquants d’opium des albums Les cigares du Pharaon (1934) et Le Lotus Bleu (1936) : le radjaïdjah, le poison qui rend fou, une des trouvailles géniales d’Hergé. On est séduit par le héros mais pas seulement. Les personnages secondaires, non dépourvus de personnalité aussi originale que celle du personnage principal, sont également des créations issues du génie. Ils participent à la force comique des albums : le tic tautologique des Dupondt, les jurons du capitaine Haddock (d’autres créations originales), la surdité du professeur Tournesol, la Castafiore qui, bien qu’éprise du capitaine Haddock, n’arrive pas à retenir le nom de ce dernier, … Les éclats de rire qu’ils parviennent à provoquer sont des purs moments de plaisir. Quatre-vingt-dix ans après la parution, le 10 janvier 1929, de Tintin au Pays des Soviets, Tintin n’a rien perdu de sa superbe. La preuve : sa présence dans l’actualité. Huit ans après la dernière œuvre cinématographique réalisée par Steven Spielberg, ce dernier sera, avec Peter Jackson, aux commandes d’un autre film sur le héros sans âge. par Fenitra Ratefiarivony
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