Municipales à Nosy Be - La société civile s’offusque


La position des Organisations de la société civile sur l’affaire des municipales de Nosy Be est tranchée. Elles dénoncent une ingérence de l’Exécutif dans les affaires judiciaires. Un rappel du sacro-saint principe de séparation des pouvoirs. C’est ce que les Organisations de la société civile (OSC), signataires d’un communiqué de presse daté du 10 avril, souhaite faire selon le texte. Une missive en réaction à la lettre du ministre de la Justice, adressée à son homologue de l’Intérieur, pour suspendre l’exécution d’une décision du Conseil d’État. Une quinzaine d’OSC y dénoncent « une ingérence pure de l’Exécutif dans les fonctions du pouvoir judiciaire ». Le 30 mars, la Cour administrative a cassé une décision du tribunal administratif d’Antsiranana sur les municipales à Nosy Be. Aussi, le maire en place Gilbert Vita a été destitué au profit du candidat arrivé 3e dans les résultats proclamés en novembre 2019. Le maire en place et le candidat arrivé 2e ont tous deux été évincés par le Conseil d’État. S’estimant lésé, Gilbert Vita a cependant saisi le Garde des sceaux pour une demande en révision de la décision du Conseil d’État. « Une simple lettre ne peut suspendre l’exécution d’un arrêt du Conseil d’État. (…) elle viole l’autorité de la chose jugée (…) », réagissent les OSC. Elles ajoutent que selon la loi organique sur le régime général des élections et des référendums, la juridiction suprême en matière d’élections communales et municipales. Il ne devrait plus y avoir de recours possible donc. Contacté vendredi, Johnny Andriamahefarivo, ministre de la Justice, a indiqué que ne pas tenir compte de la demande en révision aurait entamé le droit à la défense du requérant. Il défend, par ailleurs, la suspension de l’exécution de l’arrêt du Conseil d’État par la préservation de l’ordre public. Lever les doutes Une source judiciaire explique le point de vue du ministre en avançant que la révision est prévue par la loi organique relative à la Cour administrative. « Il s’agit aussi d’une loi organique. Le recours en révision, du reste, sert à lever les doutes sur la légalité et les principes démocratiques ont été respectés », ajoute la source. La procédure de révision implique que la Cour administrative siège en Chambres réunie s pou r t r anche r. « Préserver l’ordre public est aussi un principe constitutionnel », argue-t-il par ailleurs. Une autre voix au sein de la magistrature réplique, toutefois, que bien qu’il soit question d’ordre public, « la démarche du Garde des sceaux est maladroite ». Le magistrat contacté avance qu’il y a « d’autres manières juridiquement défendables de réagir face à pareille situation ». Le dossier de Nosy Be pourrait, du reste, devenir un cas d’école. Outre le débat autour de la lettre émise par le Garde des sceaux, l’opinion judiciaire est aussi divisée sur la possibilité ou non de recours dans cette affaire. Si certains défendent une lecture stricte des dispositions légales, d’autres plaident pour une possibilité de recours. « Une voie de recours évitera un abus de la part du Conseil d’Etat », estime un courant de l’opinion judiciaire. Ce dossier pourrait conforter la position de ceux qui requièrent une refonte en bonne et due forme des textes électoraux. L’arrêt de la Cour administrative du 30 mars suscite en effet des débats. Au-delà de la portée politique et éventuellement d’ordre public de la décision, des observateurs s’interrogent sur les raisons pour lesquelles on n’a pas tenu compte de l’article 300 de la loi sur les ressources et modalités d’élection au niveau des Collectivité territoriales décentralisées (CTD). « En cas de décision d’annulation, s’il a été prouvé que les faits constitutifs d’irrégularités ou les opérations contestées ont altéré la sincérité du scrutin et modifié le sens du vote émis par les électeurs, le tribunal ordonne la tenue de nouvelles élections », prévoit cette disposition.
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