état de droit - Recrudescence des vindictes populaires


La situation dégénère à nouveau dans certaines parties de l’Île. Plusieurs localités connaissent un retour en force des cas de vindictes populaires. Colère meurtrière. C’est ce que les habitants de certaines localités du pays laissent se déchainer depuis quelques semaines. Des faits qui se sont succédés et qui défrayent les chroniques témoignent d’un regain de terrain des actes de vindictes populaires. Rien que pour la journée de jeudi, deux cas de lynchage meurtrier, perpétrés par une foule en furie ont été rapportés. L’un s’est déroulé à Mahajanga où un homme a été lynché à mort par une horde d’individus. Les circonstances des faits sont confuses, toutefois, les échos provenant de la Ville des fleurs indiquent que l’homme décédé suite aux sévices qu’il a subi aurait été accusé de « larcin », relativement mineur. L’autre scène de vindicte populaire répertoriée, jeudi a eu lieu à Maroantsetra. Alors que six hommes se sont évadés de prison, le 9 avril, l’un d’entre eux, selon les informations, aurait été appréhendé par les habitants. A suivi alors une lapidation qui a conduit à la mort du présumé fugitif. Les photos de la scène montrent le corps sans vie de la personne avec la tête en bouillie, les membres écartelés ou sectionnés lacéré par des objets tranchants. Maroantsetra qui, samedi dernier, a déjà été le théâtre d’une émeute durant laquelle les habitants ont tenté de prendre d’assaut le commissariat local. Un fait qui est la conséquence d’une probable exaction policière ayant conduit au décès d’un jeune garçon gardé à vue. Lancer la charge contre des autorités locales, éléments de force de l’ordre et même siège d’institution, d’entité publique ou privée, sont des facettes des récentes vindictes populaires. Outre le cas de Maroantsetra, il y a eu la manifestation qui s’est soldée par l’incendie du siège de la société d’eau et électricité Jirama, à Antalaha, le mois dernier. Crise de confiance Cette fois-ci il s’agissait d’un ras-le-bol populaire face aux délestages intempestifs qui a dégénéré. Le fait que des habitants en furie, excédés par certaines situations s’attaquent à des établissements publics ou à des entités matérialisant le pouvoir régalien de l’État n’est, toutefois, pas nouveau. À Ikongo, par exemple, en décembre 2017, la foule s’est ruée vers la prison pour y extirper dix détenus accusés de meurtre, afin de les exécuter. Également pris à partie, il fallait évacuer les employés du tribunal et de la prison de cette localité. Comme quoi, le lynchage populaire tend à s’incruster dans la pratique sociétale. Ceci sans que l’État parvienne à y trouver une solution efficace et durable. Comme le reconnaissent les responsables étatiques à différents niveaux, il s’agit « d’une crise de confiance », envers l’État et l’administration publique. Ces personnalités, comme Christian Ntsay, Premier ministre, lundi, martèlent que les vindictes populaires sont illégaux, inacceptables et sont sévèrement punies. Cela ne suffit, vraisemblablement, pas à dissuader la foule d’exprimer sa colère avec de brutales exécutions de présumés malfaiteurs. Les faits meurtriers de jeudi, par exemple, sont intervenus quelques jours après un atelier portant sur la lutte contre les vindictes populaires qui s’est tenu à Antsirabe, le 4 et 5 avril. Le ministère de la Justice et les départements ayant autorité sur les Forces de défense et de sécurité (FDS), y ont pris part. Jacques Randrianasolo, y a concédé que ce fléau social est causé par l’absence de confiance envers le système judiciaire, principalement, en raison de la corruption. Un point déjà avoué par ses prédécesseurs. Pareil constat est, aussi, reconnu par les différents responsables qui se sont succédé aux commandes des FDS. Les responsables étatiques affirment que la reconquête de la confiance des citoyens passe nécessairement par un changement de comportement. Un changement par l’exemplarité, la probité, l’impartialité et le professionnalisme. Il est probable, cependant, que les efforts affirmés ne soient pas encore perçus par la population pour que le mal qu’est la vindicte populaire persiste encore.  
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