Menteries millénaires toujours d'actualité


Sommes-nous vraiment en 2016   Voilà un demi-siècle s’achevait le Concile Vatican II. Il y a cent quarante-sept ans, la reine Ranavalona II, se convertissant au christianisme, procédait à l’autodafé de Rakelimalaza, Rafantaka ou Manjakatsiroa. En 1835, les missionnaires protestants achevaient de traduire la Bible en malgache. Non pas que la geste chrétienne soit un accomplissement civilisationnel, ni que la Bible puisse passer pour une encyclopédie au-dessus de tout soupçon, mais, tout de même, un minimum d’effort intellectuel en structure la trame. Et c’est cette posture intellectuelle que je ne retrouve pas à la lecture de ce qui fait parfois notre actualité. Quand un prophète hébraïque autoproclamé se retrouve poursuivi par les parents des élèves d’une école catholique qui l’accusent de sorcellerie, et que la gendarmerie produit des bouts de bois suspects. On se croirait aux prises avec les prieurs obscurantistes des «Piliers de la Terre» ou leurs collègues «Dadarabe», tous commerçants d’indulgences. Un jour, dans cinquante autres années, dans deux siècles, on procédera à l’archéologie de la presse de notre année 2016. Et les générations futures seraient bien étonnées que, 70 ans après la revendication du retour de l’indépendance, par les députés Joseph Ravoahangy et Joseph Raseta, à l’Assemblée Nationale française, la presse malgache fasse grand cas d’une affaire où la superstition païenne croise la bigoterie révélée sur fond de vile escroquerie. Comme s’il suffisait de se promener en défroque vaguement méditerranéenne de 76 avant Jésus-Christ pour être hébraïque. C’est comme ces islamistes qui fondent leur orthodoxie sur le mode vestimentaire supposé à l’époque, il y a 1400 ans, de Mahomet. Chez les chrétiens, le voile sur les cheveux des bonnes soeurs relève de la même logique qui a vu, comme par hasard, les trois religions dites du «Livre» naître concurremment au Proche-Orient. Que Moïse, Jésus ou Mahomet, soient apparus chez les Papous, chez les Vikings ou chez les Sioux, et c’est toute l’iconographie sainte qui en eût été bouleversée ! Quels saints exotiques nous auraient peints les grands maîtres florentins : un Saint-Paul en pagne le nez percé d’un os de nasique, un Saint-Pierre blond aux yeux bleus entouré de superbes walkyries aux portes du Valhalla, tandis que Dieu ne serait plus ce débonnaire barbu en toge ample et sandales légères parfaitement adaptées au sable arabique ou palestinien... Qu’un escroc essaie de se faire passer pour un énième prophète, il est dans son rôle. Que de pauvres crédules se laissent berner et cotisent au prix fort pour un aller simple à destination du paradis ou de Canaan, c’est que l’éducation au scepticisme aura échoué. Que la presse dite nationale accorde à l’affaire davantage qu’une brève en bout du bout des faits divers fait peur quant à la santé mentale de notre société. Moi, qui croyais que «la fin de l’Histoire» libérale, démocrate et parlementaire, concernerait également la cessation du cycle des révélations en tous genres : un gars, au demeurant lambda anonyme, qui tombe subitement en arrêt, frappé d’apoplexie transcendantale. Déjà, que lui puisse s’en convaincre, dépasse mon entendement. Mais, qu’une petite foule se fasse ses disciples me fait désespérer de l’humanité. Et je plains le/la juge qui, après de nombreuses années passées à s’inculquer le Code Civil, ce monument de raison laïque, dut trancher entre les élucubrations d’un illuminé ou le rapport d’autopsie de «tapa-kazo» et de bout de chiffons. par Nasolo-Valiavo Andriamihaja
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