Gourmandise néolithique


Le Néolithique a inventé l’agriculture et l’élevage. Depuis cette époque, il y a 11.000 ans dans l’ancienne Mésopotamie, entre le Tigre et l’Euphrate, la faune et la flore ont commencé de reculer devant les avancées de l’humain. Aujourd’hui, elles seraient un million d’espèces animales et végétales à être menacées de disparition. En 2016, l’agence des Nations Unies pour l’environnement avait souligné que 60% des maladies infectieuses chez l’homme et 75% des maladies émergentes, étaient d’origine animale : l’exploitation de la faune sauvage et la destruction de son habitat naturel, la déforestation pour faire place à l’agriculture, l’élevage ou l’urbanisation, augmentent d’autant la fréquence et l’intensité des contacts entre l’humain et la faune sauvage, créant les conditions idéales pour les zoonoses. Les chercheurs de l’école vétérinaire de l’Université de Californie ont pris 142 cas de «zoonoses» virales (maladies transmises de l’animal à l’humain) répertoriées depuis 2013, et les ont croisés avec la liste des espèces en danger : les rongeurs, les primates et les chauve-souris ont été identifiés comme hôtes de la majorité (75%) des virus transmis à l’humain tandis que les animaux domestiques sont porteurs de 50% des zoonoses identifiées. Lors de l’épidémie de SARS (février 2003), l’animal réservoir était la chauve-souris et l’hôte intermédiaire la civette palmiste masquée, animal sauvage vendu sur les marchés et consommé dans le Sud de la Chine. Le MERS (septembre 2012) est passé du chameau à l’humain, obligeant l’OMS à prodiguer des conseils, finalement de prudence élémentaire : ne pas boire du lait cru de chamelle, ne pas boire d’urine de chameau, ne pas manger de la viande pas suffisamment cuite. Le Covid-19 (ainsi appelé depuis le 11 février 2020) est passé dans l’organisme humain par la consommation de la viande de pangolin, un animal pourtant protégé car menacé de disparition. Par trois fois déjà, c’est un péché de gourmandise qui permit aux coronavirus de passer d’un animal exotique à l’humain. Certaines habitudes alimentaires doivent être désormais interdites si elles devaient infester 1,5 million de personnes à travers le monde (chiffre au 9 avril 2020) : les animaux auxquels l’organisme humain est immunisé depuis le Néolithique ne manquent pourtant pas. Il y a 9.000 ans, le porc était domestiqué dans l’actuelle région de Turquie, mais également en Chine, l’Italie, l’Europe centrale, l’Inde, le Sud-Est asiatique et la Papouasie Nouvellle-Guinée. C’est le résultat d’études phylogénétiques pour établir la relation des porcs actuels avec la localisation de leurs ancêtres. Généticiens et archéologues se sont associés pour analyser la séquences d’ADN mitochondrial, exclusivement d’origine maternelle, de 700 porcs (sauvages et domestiques) et de restes fossiles provenant de 140 sites archéologiques répartis dans 29 pays d’Europe et du Proche-Orient couvrant une période de 13.000 ans, ainsi que des spécimens modernes. D’autres animaux abondent, familiers à l’organisme humain : le coq et la poule domestiqués il y a 7.000 ans en Inde et en Chine, le zébu domestiqué dans l’Asie du Sud dès le IV-ème millénaire avant J.-C. Depuis février 2020, la Chine interdit le commerce et la consommation d’animaux sauvages. Lors de l’épidémie de SRAS (2002-2003), pareille interdiction avait déjà été édictée mais rapidement ignorée dès la menace éloignée. Ce mercredi 8 avril 2020, un texte, soumis à commentaires publics jusqu’au 8 mai 2020, exclut pour la première fois le chien (domestiqué depuis 20.000 à 40.000 ans) et le chat (domestiqué depuis 5.300 ans) de la liste des animaux comestibles en Chine. Plus question de «manger tout ce qui bouge».
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