Des monuments pleins d’histoire à Anatirova


Dans le spécial Tananarive de la Revue de Madagascar édité en 1952, Urbain-Faurec présente le Rova d’Antananarivo, à partir du Palais de la Reine, Manjaka­- miadana. Ce « village dans la ville » est décrit par le R.P. Finaz, incognito lors de sa visite à Ranavalona Ire, en 1855. « Arrivés en face du portail de la Cour, nous descendîmes de nos chaises (filanjàna). Nos conducteurs firent lever successivement quatre rangs de baïonnettes croisées en faisceau, qui s’abaissèrent de nouveau après notre passage. La porte de la Cour s’ouvrit et nous entrâmes du pied droit- c’est le protocole- et chapeau bas… » Urbain-Faurec précise que l’on accède au Rova, après avoir gravi un grand escalier en pierre, par une porte monumentale également en pierre, contemporain du Grand Palais. Et dans ce Rova, des Palais, locaux annexes, nécropole, temple protestant, sont construits à différentes époques. L’urbaniste donne « par rang d’importance » et non « par ordre de dates » quelques-uns de ces monuments qui existaient encore dans les années 1950. Le plus important est sans conteste Manjakamiadana, construit par Jean Laborde, sous le règne de Ranavalona Ire, en 1839-1840. Le R.P. Malzac s’exprime ainsi à propos de ce Palais dans son ouvrage sur le Royaume Hova. « Il (Jean Laborde) bâtit pour la reine Ranavalona Ire, le Palais de Manjakamiadana qui surpassa de beaucoup en magnificence tout ce qui s’était fait précédemment.» Pour donner une idée de ses dimensions, il suffit de dire que l’énorme colonne centrale qui s’élève jusqu’au faîtage, a 39 m de haut, et qu’il a fallu plusieurs milliers d’hommes pour aller la chercher dans la grande forêt à 20 lieues de distance et la transporter à Tananarive. Le Rev. Radley souligne que le transport de cet arbre colossal, extrait de la forêt situé à la descente des plateaux sur Mananjary, « aurait mobilisé 10 000 hommes pour son transport et 2 000 seraient morts de privations, fatigue, ou écrasés. » Dix neuf jours sont nécessaires pour hisser cette fameuse colonne centrale. Ce Palais long de 30 m, large de 18 m et haut de 39 m, a été initialement en bois. Sur le sommet de l’édifice, est placé un grand aigle « en cuivre » qui, déployant ses ailes dans l’espace, symbolise « la puissance hova planant sur toutes les régions de l’ile. » Mais d’autres historiens font remarquer que cet aigle « en bronze » envoyé par Napoléon III, « emblème impérial napoléonien », aurait dû être un « Épervier royal » (Voromahery) qui symbolise « la puissance de la monarchie malgache ». Plus tard, Manjakamiadana est revêtu d’un coffrage de pierre par l’Anglais Cameron, sous le règne de Ranavalona II (1861-1863). Urbain-Faurec indique que c’est « le monument le plus caractéristique et le plus célèbre de Tananarive ». Car du sommet du Rova, Manjakamiadana domine tous les édifices de la ville ainsi que tous les monts-les Douze collines- et toutes les plaines alentour. Près du Grand Palais, Tranovola, la Maison d’argent, a été plusieurs fois reconstruite par Radama Ier, puis par son épouse Rabodonandrianampoinimerina, autrement dit Ranavalona Ire qui l’a réaménagé pour son fils, le prince Rakoto, plus tard Radama II. Celui-ci est assassiné en 1863, dans l’une des Tranokambana (Maisons jumelles), situées près de Tranovola, mais qui ont disparu depuis. Autre palais cité par l’urbaniste, Manampisoa. D’après les Tantara ny Andriana eto Madagascar du R.P. Callet, la reine Rasoherina, après l’avoir fait construire, aurait elle-même donné la signification de ce nom  : « qui s’ajoute  » ou « vient s’ajouter à ce qui est beau ». C’est dans ce Palais en bois, transformé en musée sous la colonisation, que sont conservés quelques vestiges du passé malgache. Urbain-Faurec mentionne que « le divan du milieu qui se trouve dans ce Palais et où l’on peut voir la trace d’un obus, a été transporté là ». C’est Tsarahafatra, au nord de Manampisoa, qui est bombardé, lors de cette expédition française de septembre 1895. D’après Urbain-Faurec, « il ne reste plus sur l’emplacement que des tronçons de colonnes en pierre ». C’est Ranavalona Ire qui a fait ériger ce Palais, dès son avènement. Comme son beau-père Andrianampoinimerina l’a désignée pour régner après son mari et que cette désignation s’accomplit, la nouvelle reine baptise ce Palais, Tsarahafatra, « recommandation ou prédiction juste qui se réalise ». Le Palais aurait servi de demeures à trois reines, Ranavalona Ire, Rasoherina et Ranavalona II.
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