Herilanto Iangotiana Rakotondravelo - « La police n’est pas au-dessus de la loi »


Secrétaire général du ministère de la Sécurité publique, Herilanto Iaingotiana Rakotondravelo, apporte des éclaircissements sur les mesures prises par le département, suite à l’émeute de Maroantsetra. Abordant les circonstances des faits, le responsable ministériel martèle que la police nationale ne défend pas les délinquants et que, dans cette affaire et d’autres, la loi sera appliquée. Que chacun assume les conséquences de ses actes, affirme-t-il lors d’un entretien, hier, à son bureau. [caption id="attachment_78689" align="alignleft" width="300"] Le corporatisme n’empêchera pas la recherche de la vérité.[/caption] L’Express de Madagascar. L’affectation, suite aux événements de Maroantsetra, concerne-t-elle donc, tous les policiers de la ville, même les gradés ? Tous sans exception. Que ce soit le commissaire ou les agents de police, personne n’a été épargnée. D’autres hommes ont, alors, été immédiatement affectés afin que le travail puisse se poursuivre. Après l’affectation, qu’en sera-t-il ? Une enquête est déjà ouverte. On ne peut pas fermer les yeux sur le décès d’une personne. L’enquête devra également déterminer ceux qui ont incendié les habitations, puisque la vindicte populaire est, également, interdite par la loi et nous luttons contre cela. La déclaration du ministère indique que le ministre a demandé à la justice de prendre en main l’enquête. Pourriez-vous donner de plus amples explications ? Effectivement, le ministre de la Sécurité publique a demandé que l’enquête soit diligentée par la justice afin qu’il n’y ait aucune partialité dans la procédure. Afin d’éviter les appréhensions sur d’éventuelles parties prises, si c’est la police, par exemple, qui dirige l’enquête. Cela signifie-t-il que le ministre a déjà signé une autorisation de poursuite des policiers impliqués afin de les mettre à la disposition de la justice ? Une autorisation de poursuite n’est pas nécessaire puisqu’il s’agit d’un flagrant délit. Pourriez-vous nous en dire plus ? Le flagrant délit se définit par l’immédiateté ou la proximité des faits avec un indice indéniable. Selon les récits des faits, la personne placée en garde-à-vue et dont la mort a été la cause des fâcheux événements de Maroantsetra, est décédée sur le chemin de l’hôpital. Si une autorisation de poursuite s’avère, toutefois, nécessaire, nous le fournirons. Le ministère l’a affirmé dans sa déclaration, la police nationale n’est pas un refuge pour délinquant. Tous les coupables doivent assumer les conséquences de leurs actes qui qu’ils soient. Personne n’est au dessus de la loi, en particulier, au sein de la police nationale. Le constat est, toutefois, que les enquêtes happant des policiers arrivent rarement à terme. C’est le cas de l’affaire Antsakabary, par exemple. Où en est-il ce dossier, justement ? La procédure est toujours en cours. La poursuite ne s’est pas arrêtée et continue. Il faut, aussi, que nous sachions qu’il y a le secret de la procédure. Tous les acteurs doivent le respecter. L’affaire est entre les mains de la justice, c’est à elle de décider de la conduite du dossier. Dans cette affaire, toutefois, il y eu un temps où la demande d’autorisation de poursuite faite par la justice n’a pas eu d’écho favorable au niveau du ministère. J’en doute fort, mais je ne peux pas trop m’exprimer sur ce dossier car, il y a des points que je ne maîtrise pas du fait que je n’étais pas en poste à l’époque. En principe, en tout cas, lorsque la justice en fait la demande, elle obtient une autorisation de poursuite et l’obtiendra toujours. Si la justice, aujourd’hui, demande une autorisation de poursuite dans le cadre de l’affaire Antsakabary, l’obtiendra-t-elle ? Oui, une autorisation de poursuite sera délivrée. En faisant un rapprochement avec les événements de Maroantsetra. Le constat du public sur la gestion de pareil cas est que la police nationale est le champion du corporatisme. Ne risque-t-on pas encore, de voir des levées de boucliers, cette-fois-ci ? Le policier est un citoyen avant tout. Il n’est pas au dessus de la loi. Quelle que soit la solidarité au sein du corps, même si le corporatisme est fort, la police nationale ne défendra jamais un délit. Si on parle du syndicat, par exemple, il est destiné à défendre les intérêts professionnels de ses membres, mais non pas de défendre l’illégalité. Le corporatisme ne pourra jamais empêcher la recherche de la vérité. Qu’en est-il alors, du bras de fer entre la hiérarchie de la police nationale et le syndicat du personnel sur la suspension de la mission de police de la route ? Il ne s’agit pas d’un bras de fer, juste d’une fausse interprétation de l’ordre de la hiérarchie. La communication a été insuffisante. Il ne peut pas y avoir d’antagonisme puisque le syndicat n’est pas au-dessus de la loi et n’est pas au-dessus du commandement au sein de la police nationale. Un ordre donné doit être appliqué et respecté. Où en sommes-nous donc, au sujet de la mission de police de la route ? La décision de suspension est toujours en vigueur. Les policiers suivront une formation. La formation des formateurs vient de se terminer. Ils dispenseront des formations à tous ceux qui sont chargés de la mission de police de la route dans tout le pays. En matière de formation, justement, des analystes s’interrogent sur l’éventualité que le fait que des policiers soient souvent happés dans des affaires d’exaction, d’abus, ou de corruption, n’aurait-il pas pour cause une faille dans le mode de recrutement et dans la formation ? Il n’y a pas de faille ; ni dans le recrutement ni dans la formation. Nous ne recrutons pas seulement, des âmes, mais également, des corps. Il y a des personnes issues de la société ayant rempli toutes les conditions requises lors des recrutements et de la formation qui dévient, une fois engagées. Je réfute, toutefois, l’affirmation sur le nombre élevé des personnes défaillantes. Si sur un millier de recrues, seulement une ou deux dérapent. Pour d’autres corps des Forces de défense et de sécurité (FDS), il y a des statistiques sur les éléments sanctionnés, ou faisant l’objet de poursuite judiciaire. Pourriez-vous nous en donner s’agissant de la police ? Au risque de revenir sur la question du corporatisme, mais au sein de la police nationale, le linge sale se lave en famille. Contrairement à ce que pourrait penser l’opinion publique, il y a des sanctions contre ceux qui ne respectent pas la discipline. Qu’entendez-vous par cette expression ? Pour être plus précis, cela vaut pour les sanctions administratives et non pas sur le plan pénal. Je le réitère, la police nationale ne protège pas des hors-la-loi. Je tiens, par ailleurs, à clarifier que quand on dit que le linge sale se lave en famille, cela ne signifie pas qu’il n’y a pas de mesure prise contre les indisciplines. Une poursuite suivant le statut et les règles disciplinaires est engagée contre les déviants, sans pour autant en faire un tam-tam. Cette posture, pourtant, renforce les appréhensions du public face à un probable corporatisme au sein de la police nationale. L’intransigeance vis-à-vis des déviances et abus n’est pas perceptible. Il n’est pas question d’accepter les dérives. Seulement, il y a, aussi, l’obligation de réserve à prendre en compte. Nous ne pouvons pas divulguer au public tout ce qui se passe en interne, surtout qu’il y a une procédure administrative à suivre avant de prononcer une sanction. Une innovation de l’administration Rajoelina est l’installation d’un bureau de doléances à la présidence de la République. La gendarmerie a fait la même chose. La police leur emboîtera-t-elle le pas ? Nous mettons une boîte de doléances à la disposition du public. Ce n’est pas une nouveauté, nous réceptionnons les doléances du public depuis longtemps. Mais il semble qu’il n’y a jamais de suite. À vrai dire, c’est le public qui a peur de nous faire part de ses doléances, alors que nous avons une inspection générale de la police nationale qui réceptionne des plaintes concernant les méfaits de nos hommes, et non pas juste des doléances. C’est à l’inspection générale de mener l’enquête sur des faits impliquant un policier et de déférer le dossier devant la justice. Nous défendons nos hommes s’ils n’ont rien fait. Mais encore une fois, nous ne défendrons jamais des hors la loi. Il pourrait s’agir d’une crainte que la plainte soit sans suite, ou entraine des représailles. Garantissez-vous qu’une plainte contre un policier soit traitée de manière impartiale ? Nous l’avons déjà affirmé dans la déclaration du ministère et je le redis, la police nationale ne défend pas et ne défendra pas un délinquant quelle que soit sa qualité. Nous encourageons tout le monde à déposer une plainte en cas d’infraction à la loi perpétrée par un policier. Notre rôle est d’appliquer et de faire respecter l’ordre et la loi. Nous sommes, aussi, tenus par la loi et ne sommes pas au-dessus de la loi. Les faits de Maroantsetra indiquent qu’il y a une crise de confiance. Comment la police nationale compte-t-elle y remédier ? Nous allons reconquérir la confiance de la population par notre travail. Nous avons, par exemple, entendu les plaintes de la population et suspendu les missions de police de la route. Aux usagers de la route de voir, maintenant, si la police de la route est nécessaire ou non. Nous ne palabrons pas, nous préférons travailler et agir. Nous démontrerons par notre travail que nous sommes là pour servir la population.  
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