Docteur Ricardo Andriatsiaronandroy - « Il faut concilier conservation de la biodiversité et développement local »


De la fin février à début mars, une série de soutenances de thèses pour le DEA s’est tenue à la Faculté des Sciences de Toliara. Nous avons interviewé à l’occasion, Ricardo Ratsimba Andriatsiaronandroy, l’un des plus jeunes Docteurs de l’Université. Quel est l'état de notre biodiversité dans la région Atsimo-Andrefana ? La région Atsimo-Andrefana est connue par son concentré de biodiversité très riche et élevée. Cette dernière représente une richesse floristique et faunistique qui a un taux d’endémicité très élevé et joue un rôle socioéconomique important pour la population de la région. Cependant, elle subit depuis plusieurs années une dégradation à la fois liée à l’action de l’être humain, notamment le prélèvement de bois pour divers usages (construction de pirogue, de maison), à la surconsommation (tubercules, poissons, miel, …), à l'introduction d'espèces envahissantes, à la pollution, au changement climatique.  Nous sommes en train d’assister à une érosion massive vers une extinction de masse de la biodiversité de la région et de ce fait, des actions de conservation et de protection doivent être entreprises afin de la préserver. Pourquoi est-ce si important de conserver la biodiversité dans notre région ? À Madagascar, la prise de conscience des autochtones, des élus, de la communauté scientifique de cette crise de la biodiversité a suscité l'émergence de programmes de conservation telles que l’éducation environnementale pour sensibiliser le grand public, la collecte et l’étude de données scientifiques, l’investissement dans des aires protégées, la limitation des impacts environnementaux des grands projets miniers, etc., afin de la reconquérir. Cette biodiversité, qui est indispensable au bien-être et à la santé des êtres humains, possède une valeur à la fois économique, sociale, culturelle et esthétique. Toutefois, parler de la conservation de la biodiversité dans notre région est une question éminemment complexe surtout pour une population pauvre. En avril 2018, vous étiez à la place de l'impétrant. À présent, où en êtes-vous par rapport à la recherche ?  Tout d'abord, après avoir obtenu mes doctorats (ndlr: il est a fois Docteur en biodiversité et environnements tropicaux de l'Université de Toliara et Docteur en géographie de l'Université de l'UBL-France), j'ai eu l'opportunité d'encadrer des étudiants qui préparaient leur Licence en géographie à l’Université d’Angers, et des étudiants en quête de leur DEA en biodiversité et environnements tropicaux à l’Université de Toliara. Ils ont travaillé dans mon domaine de prédilection, notamment la biodiversité végétale, les zones humides, l’écologie, le SIG et la télédétection. Ils viennent d’ailleurs de présenter les fruits de leurs recherches. En même temps, comme j'étais financé par l'Agence universitaire de la Francophonie et l'International Fondation for Science (IFS) en Suède, j'ai passé les mois suivant la soutenance à la rédaction des rapports afin de justifier les dépenses afférentes à mes recherches. Ensuite, comme tout chercheur digne de ce nom, j'ai consacré une partie de mon temps à rédiger des articles scientifiques parus dans des revues internationales telles que l’European Journal Of Applied Remote Sensing, la revue Territoire d’Afrique…, à participer à des colloques (Coastal Hazards in Africa à Tétouan au Maroc, Conférence Francophone Esri SIG à Paris, International conférence, River Culture in Africa : Natural and cultural diversity of the riverscapes à Saint Louis au Sénégal), à réactualiser des cours car la recherche évolue et change perpétuellement. Ceci pour éviter les éventuels retards, un chercheur se devant d’être toujours à l’affût vis-à-vis des nouveaux résultats de recherche nationaux et internationaux. Et par rapport à vos autres activités ? Je m'efforce de rester actif à l’égard de notre association : l’association des Jeunes cadres de la province de Toliara qui est l’aile technique de l’association mère Fizafato (Fikambanan’ny Zanaky ny Faritanin’i Toliara). Sous l’égide de sa présidente actuelle, des projets sur l’adduction/réhabilitation des bornes fontaines, sur les reboisements, l’éducation de base, la santé de la mère et l’enfant dans la partie Sud de la Grande île sont en cours de finalisation. L’association regroupe des jeunes cadres âgés de moins de 45 ans issus des quatre régions de la province de Toliara, à savoir Anosy, Androy, Atsimo-Andrefana et Menabe, et la plupart des activités sont axées sur le développement de la province. Je suis aussi en étroite collaboration avec la Ligue régionale de basket-ball d’Atsimo-Andrefana par le biais de son secrétaire général. Et en tant que commissaire technique national de la Fédération Malgache de Basketball et officiant en tant qu’arbitre de laLigue Île de France de Basketball, j’essaie de contribuer à ma façon au développement de ce sport dans la Région Atsimo-Andrefana. Quels sont vos projets aujourd’hui? Actuellement, je suis en collaboration avec un autre jeune natif de Toliara, Albin Fortunat, dans le but de trouver une solution alternative, pérenne et innovante pour faire face à la sécheresse cyclique dans le Sud du pays. Depuis quelques mois, nous travaillons avec des agriculteurs dans le district de Tsihombe (Androy) pour procéder à des essais techniques. Malheureusement, je ne peux en dire davantage car nous sommes encore dans la phase d'expérimentation du projet. Vous serez le premier à être informé dès que nous aurions un résultat satisfaisant. Votre message pour les jeunes comme vous? Je conseille toujours à mes étudiants d’être solidaires entre eux. Il faut éviter toute forme de clivage (ethnique ou autre), rester à l'affût de connaissances et oser sortir de sa zone de confort. Par ailleurs, on peut être natif de l’Androy, faire ses études à Fianarantsoa, effectuer son stage à Toamasina, se marier avec quelqu’un venant d’Antsirabe et travailler à Antsiranana, par exemple. Enfin, je termine avec une citation que je préfère: « Vis comme si tu devais mourir demain. Apprends comme si tu devais vivre toujours » Gandhi.  
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