Les péripéties du deuxième voyage de Lebel en Imerina


La deuxième expédition vers les Plateaux centraux de l’Imerina, du négociant-voyageur Lebel, est constituée de vingt deux Betanimena que lui remettent leurs « pères et mères » en qualité de porteurs et qui lui restent toujours fidèles, de huit Antevongo que lui remet Tsialana, frère du chef de Toamasina, Zakavola, mais qui « le provoquèrent plus de vingt fois», de Betsimisaraka et d’Antatsimo. Comme dit précédemment, il ne suit pas l’itinéraire qu’il a prévu et présenté au gouverneur général de l’Ile-de-France et de Bourbon, François-Louis Magallon (Les tribulations de Lebel, négociant-voyageur sur les Hauts-Plateaux malgaches 1800-1803, J.-C. Hébert, revue historique Omaly sy Anio, juillet-décembre 1979). Ainsi, il se dirige directement dans l’Imenabe, au nord de l’Andrantsay. Dans les lettres qu’il écrit plus tard, Lebel affirme qu’il aurait failli être empoisonné ou assassiné par ses porteurs antevongo, sur l’instigation de Lasalle, son compagnon de voyage. Mais il s’échappe dans l’Imamo, pays situé au Nord-Ouest d’Antananarivo. Une quinzaine de jours lui suffisent, pourtant, pour obtenir des secours, précise-t-il. Il porte plainte alors auprès du roi de l’Andrantsay, suzerain d’Imenabe. Ce dernier fait condamner Lasalle à payer sur le champ cinquante bœufs, dont Lebel garde dix, les autres revenant à ses sauveteurs, et dix esclaves. Par la même convention, la province d’Imenabe devient sa « garantie dans l’attente d’une rançon de deux cents bœufs et trente trois esclaves qu’il ne perçoit pas », mais que le grand seigneur d’Andrantsay aurait touchée à sa place après sont retour sur la côte. « Cette rançon a sans doute signé la mort du petit royaume d’Imenabe et on pourrait la dater de 1803 », signale J.-C. Hébert. C’est pendant qu’il est dans l’Imenabe que le roi de l’Imerina du Sud, Ramaromanompo, le fait mander dans sa capitale, à Anosizato, et lui lance un défi pour fabriquer de la poudre dont il a, sans doute, grand besoin pour se défendre contre les emprises incessantes et inquiétantes d’Andrianampoinimerina. J.-C. Hébert fait remarquer qu’on ne peut s’empêcher de penser au « parallèle étonnant » avec le voyage de Mayeur qui, venu en Andrantsay en 1777, « reçut la visite incognito du roi de l’Imerina qui l’entraine dans ses États. Et le 13 septembre, en cours de route, le roi lui présenta un Malgache capable de fabriquer de la poudre de guerre. Celui-ci n’accepta pas de révéler ses talents devant Mayeur, même contre promesse de 30 piastres ». Durant son séjour à Anosizato, Lebel fait la connaissance de toute la famille royale. Ramaro­manompo, fils du roi défunt Andrianamboatsimarofy chassé d’Antananarivo, est le roi de l’Imerina du Sud résidant à Anosizato ; Reni-Amboa est sa femme favorite ; Ravaonimerina est la sœur de Ramaro­manompo; Razafin’Amboa est la fille de Ravaonimerina, adoptée par Reni-Amboa ; Andriantomponi­merina est l’époux de Ravao­nimerina. Bien que Lebel ait gagné le défi, Ramaromanompo refuse de livrer les esclaves promis. Pire, il est même expulsé du territoire. Il confie ses marchandises à l’épouse et à la sœur du roi, avec qui il semble avoir été dans les meilleurs termes, leur promettant de revenir après « deux mois lunaires ». Puis il est reconduit chez le chef Solo, au sud-est où il peut visiter le pays pendant douze jours. De là, il va au nord-est chez les deux frères « Diantendroka » (Seigneur des cornes). Le négociant-voyageur retourne alors dans l’Ankay, sans doute pour y reprendre des marchandises et revient en Imerina pour y apprendre le décès subit de Reni-Amboa. Andrianampoini­merina profite de la circonstance « pour ravager le royaume du Sud» et exiger d’Andriantomponi­merina qu’il lui remette son épouse Ravaonimerina, « héritière de l’Imerina » selon Lebel. J.-C.-Hébert explique que « Ravao, descendante d’Andrianam­boatsimarofy, était habile à donner naissance à une lignée royale légitime. Andrianam­poinimerina qui entendait régner en maitre, avait donc intérêt à s’assurer de sa progéniture ». Comme Andriantompo­nimerina se réfugie à Antsahadinta, la vallée aux sangsues, c’est là qu’Andrianam­poinimerina l’attaque. Lebel affirme assister à la chute de cette « forteresse », dernier refuge des deux rois de l’Imerina du Sud et de l’Ouest. Il ne décrit pas le siège de ce village qui aurait résisté quinze jours. « Andriantomponimerina, abandonnant sa femme à son rival, prit la fuite. En cédant aux exigences d’Andrianampoinimerina, les deux rois vaincus obtinrent sans doute un répit dans la lutte et Lebel lui-même ne fut pas inquiété. »
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