Lebel change d’itinéraire de voyage


Le négociant-voyageur Lebel veut à tout prix mener une deuxième expédition à Mada­gascar, dans les terres intérieures de l’Imerina (lire précédentes Notes). Ce qu’il accomplira du 23 dé­cembre 1802 au 20 janvier 1803. Dans son ouvrage sur ses tribulations sur les Hauts-Plateaux malgaches, J.-C. Hébert fait état de deux récits tardifs qu’il rédige une dizaine d’années après les évènements. Selon l’auteur, le plus complet est le rapport que Lebel envoie en 1816, au gouverneur anglais de l’ile Maurice, Sir Robert T. Farquhar. Ce dernier entreprend, en effet, de s’informer sur Madagascar et entre en relations avec les anciens traitants, dont Lebel, susceptibles de lui fournir les meilleurs renseignements Auparavant, le 18 mars 1815, Lebel envoie une lettre à Barthélémy Huet de Froberville avec qui il est en correspondance. Mais le récit est moins détaillé. Dans sa seconde lettre, il explique au gouverneur anglais que c’était à l’instigation du général François-Louis Magallon de la Morlières, qu’il entreprend ce voyage. Une précision est nécessaire car une erreur s’est glissée dans notre dernière Note. François-Louis Magallon n’était pas ministre français de la Marine, mais gouverneur général de l’Ile-de-France et de Bourbon, depuis le 28 juillet 1803 pour remplacer Malartic, décédé, jusqu’à l’arrivée de Decaen, le 16 aout 1803. Puis il devient lieutenant de ce dernier à Bourbon jusqu’en 1806 et rentre en France en 1807. Selon J.-C. Hébert, ce que Lebel explique à Farquhar une décennie plus tard est contredit par l’une de ses précédentes lettres à Magallon, puisque lui-même y affirme qu’il se lance dans l’aventure à ses frais, n’attendant que l’aide, si besoin est, du gouvernement de la France. Cependant, Magallon lui aurait demandé de se faire accompagner par un autre traitant, dénommé Lasalle, qui habite à Madagascar où il vit maritalement avec une Malgache, Samongourou ou Angourou, sœur du chef Finedou. Dans ses récits, le négociant-voyageur signale que ses relations avec Lasalle « s’aigrissent assez vite », au point qu’arrivés sur les Hauts-Plateaux centraux, celui-ci tente de l’emprisonner. Et au retour, il lui aurait dérobé une partie de ses esclaves et marchandises dont il aurait fait cadeau au chef Finedou. Mais ce dernier lui aurait rendu son bien. Il se fait également « voler deux esclaves et de la poudre à fusil par Soratch), oncle maternel de Faux, fils de Finedou. Ce ‘Soratch’ avait été autrefois, chef de l’ile du lac ». Contrairement aux autres traitants de l’époque, Lebel ne précise pas de façon détaillée l’itinéraire « qu’il comptait suivre avant son départ ». De même, Lasalle ne laisse pas non plus le récit de son voyage. Selon J.-C. Hébert, il n’est pas douteux que les deux hommes parviennent sur les Hauts-Plateaux. Au départ de la côte Est, Lebel aurait dû repasser par Iaroka et par l’Ankay, pays des Bezano­zano, région où il manifeste son intention de retourner, dans sa lettre au général Magallon. Il y précise même qu’il a eu « des conférences avec un de leurs chefs que j’ai rencontré dans les bois d’Ancaye à mon précédent voyage ». Toujours dans la même lettre, il se propose de reconnaitre une voie d’eau qui aurait permis de relier l’Ankay à la mer, en remontant le Mangoro vers le Nord, puis en rejoignant la côte vers l’Est par le Maningory. J.-C. Hébert pense que, trompé par l’assonance des noms des deux rivières, Lebel croit sans doute qu’une communication existe entre elles, peut-être par l’intermédiaire de quelques lacs de l’intérieur. « Il escomptait ainsi trouver un itinéraire plus facile pour la traite. » En réalité, Lebel ne suit pas ce périple qu’il a prévu, c’est-à-dire par le nord du Mangoro. Au contraire, il s’enfonce loin dans l’intérieur, en compagnie de Lasalle. Ainsi, de l’Ankay, il se dirige directement à Imenabe, au nord de l’Andrantsay et au Sud-Ouest de l’Imerina, sans passer par Antananarivo. Le chef Diambenisalama l’y reçoit. D’après J.-C. Hébert, « ses relations avec Dianampoïne (Andria­nampoinimerina) n’étaient donc pas si bonnes qu’il ne le laissait croire». D’ailleurs, les traitants d’esclaves recherchent, de préférence aux Hova- « individus de teint clair et de complexion délicate »- les Mainty- « individus de teint noir et plus robustes » qui constituent une main-d’œuvre plus appréciée dans les iles Mascareignes. J.-C. Hébert précise que « l’Imerina était principalement peuplé de Hova et l’Andrantsay, dont l’Imenabe, était un territoire vassal de Mainty pour lesquels les colons de Maurice et de La Réunion offraient un meilleur prix ».
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