Code de la communication - Des députés règlent leur compte


Les groupes parlementaires pro-pouvoir ont milité pour l'adoption en l'état du projet de code de la communication. Plus que le fond et la portée de la loi, les arguments des défenseurs du texte se sont résumés à des épanchements contre la presse. La censure à légaliser. Pour résumer, c'est ce à quoi s'apparentent les arguments des députés partisans du pouvoir et ayant milité lors des débats sur le projet de code de la communication médiatique. 80 élus ont adopté le texte scélérat dont des articles anéantissent « les libertés d'opinion et d'expression, de communication, de presse, le droit à l'information et l'interdiction des censures », comme le consacrent les articles 10 et 11 de la Constitution. Afin de mobiliser leurs pairs à voter le texte fortement contesté, les élus de la Chambre basse n'ont pas évoqué dans leurs arguments  ni principe de droit, de liberté, ni même le sens ni la portée des dispositions qu'ils ont adopté en pack. Rancœurs et ressentiments contre la presse ont été légions dans les prises de parole sous les regards jouissifs des quelques membres du gouvernement ayant assisté à la séance plénière. « La RNM et la TVM [Radio nationale et télévision nationale] suffisent. Nul besoin des médias privés ». Des mots du député Nicolas Randriana­solo, élu de Betroka, réputé pour ses retournements de veste au gré des tenants du pouvoir. « Les journalistes ne font que colporter des mensonges, désinformer et diffamer ». Une phrase du député Mamy Armand Hanitriniaina, élu MAPAR dans le district de Miandrivazo, qui à l'instar du éhonté Nicolas Randria­nasola, a quitté la ligne politique de la formation sous laquelle il s'est fait élire. « Dix-huit » amendements ont été proposés à l'issue des travaux de commission. « Le HVM [Hery vaovao ho an'i Madagasikara] ne s'opposera qu'aux amendements apportés aux articles 51, 85 et 126, et feront une contre-proposition », a indiqué un membre de ce groupe parlementaire contacté avant la séance plénière. Forcing Les textes contestés par le HVM, à en croire cet élu contacté, concerne notamment la couverture nationale des médias privés, autorisée à l'issue des travaux de commission, la fonction de directeur de publi­cation qui devra être occupée par « un professionnel » du métier, dans la version amendée. Une fois en séance plénière pourtant, certains députés ont tenté une dernière offensive pour faire voter le texte sans amendement, sans égard du marathon de débat et des rectifications en commission. « Un forcing », s'insurge le député Jaona Ratefiarivony, élu de Tsaratanana, après avoir quitté l'hémicycle. « Aucun débat n'est possible dans cette institution. La majorité veut toujours faire un forcing », martèle la députée Christine Razanamahasoa. L'élue d'Ambatofinandrahana et ses pairs du groupe des partisans de Andry Rajoelina (MAPAR) ont également claqué la porte de la séance plénière d'hier. Parmi les opposants au projet au code de la communication, le groupe « Tiako i Madagasikara » (TIM) sont les seuls qui sont restés. Le député Guy Rivo Randria­­narisoa est le seul a avoir voté contre le texte scélérat. Les autres se sont contentés de s'abstenir de toute opinion. Dès le départ, Helson Bresson Erafa, vice-président de l'Assemblée nationale, député de Toliara II, parmi les plus versatiles que comptent l'hémicycle de Tsimbazaza, a plaidé : « Nous voulons que ce projet de loi soit adopté comme il l'a été présenté par l'Exécutif ». La majorité des mem­bres de l'Assemblée nationale a tranché. La suite va dépendre des députés qui devront l'examiner en deuxième lecture. Puis ce sera à la Haute cour constitutionnelle (HCC). Les juges d'Ambohidahy devront statuer sur la portée et la limite des libertés et droits individuels que consacre la Constitution. La vérité blesse Les amendements de ce texte ne comptent pas les articles 7, 20 et 30 du projet de code. Des dispositions qui permettent la liberté d'expression, les investigations journalistiques, ainsi que la liberté d'opinion et d'expression. A entendre les épanchements d'hier et la teneur du texte adopté, rendre public le mauvais comportement, les abus de pouvoir et les gabégies des autorités politiques, responsables étatiques ou administratifs payés par les deniers publics sont interdits. Dire qu'un député est mis en cause dans une affaire de pédophilie, ou que d'autres figurent dans la liste des plus gros exportateurs de bois précieux, sont interdits. Dénoncer la versatilité éhontée des hommes politiques est interdit. Porter au débat public le contenu et la portée d'une initiative de loi avant qu'il passe devant le Parlement est interdit. Faire état de la corruption à tous les niveaux de l'État est aussi interdit. Tout comme du contenu des réunions « à huis-clos » au sein des différentes institutions étatiques. L'année passée, la mise en accusation en déchéance du président de République et des motions de censure ont été décidées durant ces réunions « à huis-clos ». Des frondes où la corruption des députés ont été légions à Tsimbazaza, au point qu'ils se sont eux-mêmes dénoncés en pleine séance plénière. Au lendemain du vote de sa déchéance, Hery Rajaonarimampianina, président de la République himself avait accusé les députés frondeurs de corruption. Des informations, toutes rapportées par la presse. L'adoption de ce code confirme que la seule la vérité blesse. Garry Fabrice Ranaivoson
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