À Madagascar, depuis le début des années 90, les principaux acteurs politiques n’ont de cesse d’évoquer la nécessité de la mise en place d’une décentralisation effective, en vue de permettre aux collectivités territoriales de prendre en charge leur propre développement. Mais cela est resté un vœu pieux. Le processus a du mal à aboutir, pour différents motifs. Certains n’hésitent plus aujourd’hui à parler de « vieux rêve ». D’autant que le choix a été plutôt instable au fil des ans, les décisions évoluant au gré des crises politiques et des changements de régime dans le pays. Mais les faits sont têtus: le pays a du mal à concrétiser la mise en place de structures inhérentes à la mise en œuvre d’une véritable décentralisation de pouvoir. Sur ce sujet, les ateliers et les concertations se suivent mais ne se ressemblent pas. On continue à tourner autour du pot. Le processus, depuis des décennies, reste inachevé. La Loi sur la décentralisation de 2014, dans son article 2, spécifie que « Aux termes de l’article 143 de la Constitution, les Collectivités territoriales décentralisées sont les Communes, les Régions et les Provinces ». C’est limpide. Quid du fokontany Pourtant, depuis quelques décennies, l’idée de faire du fokontany une première et principale structure décentralisée a été véhiculée par de nombreuses personnalités politiques, inspirée du principe du « fokonolona » promu par l’ancien ministre de l’Intérieur et chef d’État éphémère, Richard Ratsimandrava, en 1975. L’idée a fait son chemin mais, au fil des dernières années, il n’en fut plus rien. « Une décentralisation effective constitue une réaction par rapport à l’excès de centralisation du pouvoir à Madagascar, et plus particulièrement sous l’époque coloniale marquée par le rôle trop dominant des colons qui représentaient l’État français », explique un Administrateur civil. « L’idée est de promouvoir le développement à partir de la base, avec les ressources locales. Ce qui n’est pas une mauvaise idée en soi, mais au final, le pragmatisme a pris le dessus, tout doit se faire progressivement malgré les velléités d’accélérer le processus », continue-t-il. Cette analyse a été partagée par Malalaniaina Rasamijaona dans sa thèse de doctorat à l’Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco-Paris). « Pour les Collectivités Territoriales Décentralisées, les élus souhaitent souvent que le transfert de compétences se fasse lentement afin de pouvoir les prendre pleinement en charge, faute de disposer des ressources nécessaires. La forme de la décentralisation qui s’appuie sur la mise en place d'entités territoriales sur des bases administratives ne répond pas toujours aux attentes de la population ni à son rejet du système centralisé. Elle ne prend pas en compte les formes d’organisations et d’autorités traditionnelles (ou issues de l’histoire) », reconnaît-elle dans ses recherches, avant de renchérir: « Certaines autorités locales se plient dans un positionnement d’attentisme vis-à-vis du pouvoir central. D’autres détournent la responsabilité de réticence aux progrès en direction de la population locale, comme pour dire que les gens n’acceptent pas d’évoluer ». Loin d’être une panacée Aucun dirigeant de la Grande île, ces dernières années, n’a pourtant affiché une propension claire au centralisme. L’idée de décentralisation a toujours été un des principes fondamentaux de la Constitution malgache. Mais ces analyses expliquent en partie pourquoi il a été difficile d’achever le processus. Une étude commandée par la Banque Mondiale reconnaît aussi cette difficulté d’aller de l’avant, dans ce domaine: « Madagascar, en dépit de son expérience dans le domaine de la décentralisation, reste un pays fortement centralisé avec seulement 3 ou 4% des dépenses exécutées au-dessous du niveau central et très peu de prérogatives décentralisées au niveau local », peut-on lire dans le document qui spécifie clairement que « Madagascar reste un pays très centralisé ». Le pragmatisme veut aussi, dans le même temps, que l’on ne compte pas entièrement sur le principe de la décentralisation pour assurer le développement du pays. L’étude mentionne, en effet, que « la décentralisation, quelle qu'en soit la forme, ne sera pas un remède magique pour surmonter tous les problèmes de développement à Madagascar. Dans de nombreux pays, notamment en Afrique, la décentralisation n'est qu'une tentative de répondre à l'échec de l'État centralisé ou à sa mauvaise gestion. Dans un tel contexte, la décentralisation n'est donc pas la solution miracle ».
À Madagascar, depuis le début des années 90, les principaux acteurs politiques n’ont de cesse d’évoquer la nécessité de la mise en place d’une décentralisation effective, en vue de permettre aux collectivités territoriales de prendre en charge leur propre développement. Mais cela est resté un vœu pieux. Le processus a du mal à aboutir, pour différents motifs. Certains n’hésitent plus aujourd’hui à parler de « vieux rêve ». D’autant que le choix a été plutôt instable au fil des ans, les décisions évoluant au gré des crises politiques et des changements de régime dans le pays. Mais les faits sont têtus: le pays a du mal à concrétiser la mise en place de structures inhérentes à la mise en œuvre d’une véritable décentralisation de pouvoir. Sur ce sujet, les ateliers et les concertations se suivent mais ne se ressemblent pas. On continue à tourner autour du pot. Le processus, depuis des décennies, reste inachevé. La Loi sur la décentralisation de 2014, dans son article 2, spécifie que « Aux termes de l’article 143 de la Constitution, les Collectivités territoriales décentralisées sont les Communes, les Régions et les Provinces ». C’est limpide. Quid du fokontany Pourtant, depuis quelques décennies, l’idée de faire du fokontany une première et principale structure décentralisée a été véhiculée par de nombreuses personnalités politiques, inspirée du principe du « fokonolona » promu par l’ancien ministre de l’Intérieur et chef d’État éphémère, Richard Ratsimandrava, en 1975. L’idée a fait son chemin mais, au fil des dernières années, il n’en fut plus rien. « Une décentralisation effective constitue une réaction par rapport à l’excès de centralisation du pouvoir à Madagascar, et plus particulièrement sous l’époque coloniale marquée par le rôle trop dominant des colons qui représentaient l’État français », explique un Administrateur civil. « L’idée est de promouvoir le développement à partir de la base, avec les ressources locales. Ce qui n’est pas une mauvaise idée en soi, mais au final, le pragmatisme a pris le dessus, tout doit se faire progressivement malgré les velléités d’accélérer le processus », continue-t-il. Cette analyse a été partagée par Malalaniaina Rasamijaona dans sa thèse de doctorat à l’Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco-Paris). « Pour les Collectivités Territoriales Décentralisées, les élus souhaitent souvent que le transfert de compétences se fasse lentement afin de pouvoir les prendre pleinement en charge, faute de disposer des ressources nécessaires. La forme de la décentralisation qui s’appuie sur la mise en place d'entités territoriales sur des bases administratives ne répond pas toujours aux attentes de la population ni à son rejet du système centralisé. Elle ne prend pas en compte les formes d’organisations et d’autorités traditionnelles (ou issues de l’histoire) », reconnaît-elle dans ses recherches, avant de renchérir: « Certaines autorités locales se plient dans un positionnement d’attentisme vis-à-vis du pouvoir central. D’autres détournent la responsabilité de réticence aux progrès en direction de la population locale, comme pour dire que les gens n’acceptent pas d’évoluer ». Loin d’être une panacée Aucun dirigeant de la Grande île, ces dernières années, n’a pourtant affiché une propension claire au centralisme. L’idée de décentralisation a toujours été un des principes fondamentaux de la Constitution malgache. Mais ces analyses expliquent en partie pourquoi il a été difficile d’achever le processus. Une étude commandée par la Banque Mondiale reconnaît aussi cette difficulté d’aller de l’avant, dans ce domaine: « Madagascar, en dépit de son expérience dans le domaine de la décentralisation, reste un pays fortement centralisé avec seulement 3 ou 4% des dépenses exécutées au-dessous du niveau central et très peu de prérogatives décentralisées au niveau local », peut-on lire dans le document qui spécifie clairement que « Madagascar reste un pays très centralisé ». Le pragmatisme veut aussi, dans le même temps, que l’on ne compte pas entièrement sur le principe de la décentralisation pour assurer le développement du pays. L’étude mentionne, en effet, que « la décentralisation, quelle qu'en soit la forme, ne sera pas un remède magique pour surmonter tous les problèmes de développement à Madagascar. Dans de nombreux pays, notamment en Afrique, la décentralisation n'est qu'une tentative de répondre à l'échec de l'État centralisé ou à sa mauvaise gestion. Dans un tel contexte, la décentralisation n'est donc pas la solution miracle ».