Les premiers grands travaux du canal des Pangalana


«La côte Est de Madagascar est inhospitalière, la mer y est souvent très dure et exposée aux cyclones. Toute la côte Sud-Est, à partir de Tamatave est plate et monotone, frangée de récifs, sans aucun abri naturel» (Robert Raynaud, Revue de Madagascar sur les Voies de communication). La desserte maritime de cette partie du littoral oriental est difficile et dangereuse. En outre, la desserte routière, le franchissement des nombreux cours d’eau qui longent la côte, s’effectue au moyen de bacs qui ralentissent le trafic. Et au XIXe siècle, le remplacement de ces bacs par des ponts définitifs ne saurait être qu’au prix de dépenses onéreuses. Or, entre Foulpointe, à 60 km au Nord de Toamasina, et Farafangana, à 600 km au sud, et en parallèle à la côte, se trouve le canal des Pangalana (Pangalanes en français). « Le jeu combiné des courants, du cheminement des sables, du régime des fleuves et des poussées coralligènes a provoqué la formation de longs sillons parallèles à la côte, dans lesquels coulent les fleuves et les rivières avant de se jeter à la mer. » Il est alors constaté qu’il suffit de peu de travaux pour que ces sillons soient reliés les uns aux autres sur d’assez longues distances, et permettent le passage des pirogues et le transport des marchandises. Ce travail est amorcé avant même la conquête, tant sur l’initiative des populations locales que sur les ordres des souverains merina. Mais à l’époque, ils ont un intérêt strictement local et n’ont pour résultat que de faciliter les relations entre des régions très voisines. Dès la conquête, Gallieni est partisan de continuer l’œuvre de la nature et de réaliser le long de cette côte Est, un grand canal qui suppléerait l’insuffisance des voies routières et maritimes, du moins faciliterait la circulation et l’acheminement des marchandises. « La zone desservie par le canal s’augmenterait tout naturellement des biefs navigables des fleuves côtiers, qui s’étendent parfois jusqu’à une trentaine de kilomètres à l’intérieur des terres. » De 1897 à 1901, un premier tronçon est percé de l’Ivondro à Andevoranto. Ce canal rend de grands services jusqu’au moment où, en 1913, doublé de l’Ivondro à Ambila par la voie ferrée, il perd une partie de son activité. En 1925, un projet complet très étudié de percement de bout en bout du canal, est approuvé. Il est alors prévu que six équipes, disposant chacune d’une drague à godets, perceraient le canal en douze ans. Les caractéristiques adoptées devraient permettre la circulation et le croisement de chalands de quarante tonnes. Ce projet commence à être exécuté, notamment par le percement de la section Andevoranto-Vatomandry, mais vers 1933, ces travaux sont arrêtés pour des raisons budgétaires. Pendant la deuxième guerre mondiale, le manque de caboteurs rend impossible la desserte des ports de la côte orientale et il faut reprendre « aussi activement que possible » les travaux du canal. On s’attaque en particulier, au percement des quelques seuils rocheux. Dans les années 1950, le canal est ouvert au passage des pirogues de deux à cinq tonnes, du Sud de Foulpointe à Toamasina (60 km). Entre Toamasina et l’Ivondry (10 km), il n’existe pas. De l’Ivondry à Vatomandry (130 km), il est accessible aux chalands de trente à quarante tonnes. De Vatomandry à Mahanoro, les travaux en cours devront permettre le passage facile des chalands de trente à quarante tonnes et sont réalisés en régie par le Service des travaux publics à l’aide d’une drague à godets et de deux draguelines. De Mahanoro à Manakara (306 km), il accessible aux pirogues de deux à cinq tonnes. Toutefois, le seuil rocheux de Masomeloka, à 60 km au sud de Mahanoro, constitue sur 9 km, une coupure complète et infranchissable aux plus petites embarcations. De Manakara à Ambahi­kombo (80 km), le canal est accessible de nouveau aux pirogues de deux à cinq tonnes. Et d’Ambahikombo (à 6 km au Nord de Farafangana) jusqu’à cette dernière ville, le canal n’existe pas, mais il est remplacé par une voie ferrée de 0m60. « Sur les sections déjà ouvertes, lacs naturels ou lagunes sont assez vastes pour dispenser de tout travail complémentaire lors du percement définitif. » Dès la Libération, après la deuxième guerre mondiale, si les caboteurs réapparaissent, c’est pour mettre en évidence « la carence des batelages et la difficulté d’effectuer des opérations normales le long d’une côte aussi inhospitalière. » Le percement du canal est donc décidé une nouvelle fois, avec la volonté d’en faire « le moyen le plus économique et le plus commode de desserte de la côte Est », par l’intermédiaire du port de Toa­masina doté d’un équipement adapté à un trafic accru.
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