Merci Hergé


Si une relation avec les bandes dessinées peut avoir les caractéristiques d’une histoire d’amour, alors les heures déli­cieuses, passées par l’imagination dans le monde de Tintin, sont comme un perpétuel voyage de noce dans un pays de cocagne aux charmes toujours envoûtants et dont l’attrait est d’un magnétisme invulnérable qui repousse les assauts de la lassitude. Car même des années, voire des décennies, après le coup de foudre qui a frappé un grand nombre de lecteurs, ouvrir et savourer un album de la série des Aventures de Tintin est toujours le prélude à une grande épopée livresque. Et cette source inépuisable de délices est l’œuvre d’un créateur de génie qui a quitté notre monde cruel il y a exactement quarante ans. Mais l’œuvre d’Hergé continue et continuera d’illuminer nos vies. Hergé a construit un monument, un palais qui brille d’une éclatante lumière, faisant connaître à nos yeux éblouis de lecteurs conquis des phases incomparables d’illumination. Suivre les pas de Tintin à travers les planches, qu’on tourne avec cette excitation pimentée par le suspens, est, à chaque fois une exaltante aventure qui peut nous embarquer dans une palpitante chasse au trésor à travers la lecture du diptyque composé du Secret de la Licorne (1943) et du Trésor de Rackham le rouge (1947), dans une guerre contre le milieu de la drogue dans Les cigares du pharaon (1934) et Le Lotus Bleu (1935), dans un voyage qui nous mène vers les rescapés de la civilisation Inca dans Le temple du soleil (1949), dans une atmosphère légère de Vaudeville dans Les bijoux de la Castafiore (1963)... Et le tout est ornementé de joyaux scintillants comme les jurons du capitaine Haddock ou la bêtise des Dupondt. Georges Rémi, alias Hergé, a donné de la saveur à la vie de ceux qui ont su trouver, dans les aventures de Tintin, des instants privilégiés de délectation. Il a su donner du relief à nos journées alors que, pour le dessin, le trait prend largement le dessus sur la nuance. Il a été celui qui a su colorer nos vies en nous prodiguant les produits de son incomparable talent narratif, en nous faisant don d’un héros « toujours jeune », comme ses histoires dont la saveur, toujours grisante, ne peut être effacée par le passage annihilateur du temps. Car quarante ans après le décès de son créateur, le héros sans âge n’a pas perdu son pouvoir enchanteur qui fait toujours le bonheur des fidèles lecteurs qui relisent, avec le même plaisir, les albums intemporels qu’Hergé nous a légués. Quarante ans après avoir perdu Hergé, le monde peut toujours puiser dans ses œuvres, dans les captivantes tribulations de Tintin, de précieux instants de bonheur. Un monde qui, aujourd’hui, plus que jamais, se trouve être dans un manque extrême de héros. Notre gratitude à Hergé, pour son don précieux, devrait être éternelle et nous survivre.
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